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Algérie : Tentatives pour sortir de l’impasse

Sabah Sabet avec agences, Mardi, 30 juillet 2019

Alors que le mouvement populaire se poursuit en Algérie, partis politiques et membres de la société civile algérienne ont érigé un « pacte » pour mettre fin au statu quo. Une conférence de dialogue est également prévue ce samedi 6 juillet entre les acteurs de la vie politique.

Quatre mois après le début, le 22 février dernier en Algérie, du mouvement de contestation qui a poussé le président Abdelaziz Bouteflika à la démission le 2 avril, la scène est toujours la même. Pour la 19e semaine consécutive, et sous un dispositif policier renforcé, les manifestants algériens se sont rassemblés, vendredi 28 juin, dans les rues d’Alger pour réitérer leurs demandes et dénoncer le régime en place. Pour mettre fin à ce dangereux statu quo, des personnes issues de partis politiques, d’associations et de la société civile ont érigé la semaine dernière un « pacte », exigeant la libération des détenus politiques et une transition démocratique vers de nouvelles élections. C’est lors d’une réunion au siège du parti d’opposition, le Rassemblement pour la Culture et la Démocratie (RCD) à Alger, mercredi 26 juin, que ce « pacte » a été écrit par un comité de rédaction représentant les différentes sensibilités, et qui pose les conditions d’une sortie de crise pacifique et démocratique. La déclaration précise qu’aucune négociation ne s’avère possible sans que quatre préalables soient respectés. Le premier concerne la libération immédiate de tous les détenus politiques et d’opinion. Pour entamer le dialogue, les participants exigent également « la libération du champ politique et médiatique » et « l’arrêt immédiat des harcèlements judiciaires et des menaces contre les citoyens, les militants des partis politiques et de leurs organisations, du mouvement associatif, des syndicalistes, des militants des droits de l’homme, des journalistes, etc. ». Les signataires du manifeste souhaitent également que le gouvernement mette un terme au « bradage des richesses nationales », précise Ouamar Saoudi, député RDC à Alger. La prochaine étape, prévue dans les jours à venir, consistera à adopter une feuille de route pour organiser concrètement cette transition.

Les diverses forces démocratiques ont certes tardé à se réunir, affaiblies par les vingt années du règne du président Bouteflika, mais, mercredi dernier, les participants se sont dits « déterminés à oeuvrer dans un cadre unitaire ouvert à toutes les forces qui se reconnaissent dans l’alternative démocratique pour permettre au peuple algérien de recouvrir toute sa souveraineté », a assuré Saïd Salhi, le vice-président de la Ligue algérienne des droits de l’homme, en saluant « un mouvement historique », tandis que Ouamar Saoudi espère, lui, que la transition ne prendra pas plus de neuf mois, prévoyant déjà que l’assainissement des fichiers électoraux se révélera comme la tâche la plus épineuse.

Dialogue de sourds

Mais le chef d’état-major, le général Gaïd Salah, présentant le pouvoir actuel et qui fut durant 15 ans un pilier de la présidence Bouteflika (1999-2019), rejette invariablement les revendications des manifestants. Au lendemain de l’annonce du pacte, le commandement de l’armée a accusé les partisans d’une telle transition de vouloir protéger les anciens responsables politiques et hommes d’affaires liés à Bouteflika, visés par les nombreuses enquêtes pour corruption récemment ouvertes par la justice, encouragée par l’armée. « Ceux qui veulent instaurer des phases de transition (…) veulent protéger la corruption en reportant la lutte lancée contre elle », a-t-il dit, réitérant n’avoir aucune ambition politique. M. Gaïd Salah appelle les Algériens à « comprendre » les décisions de l’armée, alors que les manifestants demandent chaque semaine son départ et demandent un « Etat civil ».

Le chef d’état-major a aussi implicitement réaffirmé que l’armée resterait aux commandes tant qu’un nouveau président ne serait pas élu. Le tout est désormais de savoir combien de temps durera cette transition. D’un côté, l’armée s’attache à appliquer la Constitution, qui stipule la tenue des élections dans un délai donné, tandis que le mouvement populaire veut une période de transition d’un autre genre afin d’aboutir à une réelle démocratie. Or, l’annulation de la présidentielle du 4 juillet place le pouvoir intérimaire dans une situation délicate, la Constitution prévoyant que le président par intérim Abdelkader Bensalah rende le pouvoir à un président élu d’ici le 9 juillet, et il s’est avéré impossible d’organiser un scrutin avant ce délai.

Selon les analystes, seul un dialogue entre les acteurs politiques est à même d’aboutir à une sortie de crise. Dans ce cadre, une conférence de dialogue doit se tenir ce samedi 6 juillet. Plusieurs personnalités doivent y participer, mais pas ceux de l’ex-alliance présidentielle et tous ceux qui ont soutenu le 5e mandat de Bouteflika, selon Lakhdar Benkhellaf, membre de la coordination de la conférence cité par le site TSA (Tout Sur l’Algérie). Cité également par TSA, le député Abdelaziz Rahabi, du Front de la justice et du développement (parti à mouvance islamiste réformiste), pense que la conférence devrait dégager une feuille de route consensuelle qui servirait de base pour le futur dialogue avec le pouvoir.

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