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Soudan : L’après-Béchir s’annonce difficile

Sabah Sabet avec agences, Lundi, 22 avril 2019

Malgré l'engage­ment du Conseil militaire de transi­tion à remettre le pouvoir au peuple, les leaders de la contestation appel­lent les Soudanais à intensifier leur mouvement,ouvrant ainsi la voie à une période d'incertitude.

Soudan  : L’après-Béchir s’annonce difficile
Les manifestations se poursuivent dans la capitale soudanaise. (Photo:AFP)

Après la lueur d’espoir née la semaine dernière au Soudan, les choses se compliquent à nou­veau. Bien que les militaires aient promis de transférer le pouvoir aux civils, les responsables de la contes­tation au Soudan ont rompu le dia­logue. Une situation de nouveau tendue qui rend l’avenir du pays inconnu. « Nous suspendons nos discussions avec le Conseil mili­taire » de transition, a déclaré, dimanche 21 avril, un porte-parole des organisations représentant la contestation, Mohamed Al-Amine, qui s’adressait à des milliers de per­sonnes rassemblées devant le QG de l’armée à Khartoum. « Nous consi­dérons le Conseil militaire comme un prolongement du régime » de l’ex-président Omar Al-Béchir, des­titué le 11 avril dernier, a-t-il ajouté en appelant à « poursuivre et inten­sifier les manifestations jusqu’à ce que nos demandes soient satis­faites ». Un autre porte-parole de la contestation, Madani Abbas Madani, a, lui, annoncé que la com­position d’un Conseil civil censé remplacer le Conseil militaire qui était attendue dimanche 21 avril, interviendra « dans quelques jours ». La veille, les dirigeants militaires et les leaders de la contes­tation avaient eu des discussions et convenu de les poursuivre. D’autres séries de discussions avaient égale­ment eu lieu auparavant, selon un responsable de la contestation. Mais apparemment, elles n’ont pas abouti à un consensus.

Pourtant, samedi 20 avril, le chef du Conseil militaire de transition, le général Abdel-Fattah Al-Burhan, avait affirmé à la télévision son « engagement à remettre le pouvoir au peuple », et promis que l’armée répondrait dans la semaine aux demandes des manifestants. Il avait également indiqué que l’équivalent de 113 millions de dollars, en devise américaine, euro et livre souda­naise, avait été saisi dans la rési­dence de M. Béchir. Le président déchu a été arrêté puis emprisonné après sa destitution par l’armée sous la pression de la rue. Et le nouveau procureur général, Al-Walid Sayyed Ahmed, en place depuis quelques jours à peine, a, de son côté, annon­cé des dispositions pour contrôler les biens des hauts responsables du régime de M. Béchir et de leurs familles. Mais ces annonces n’ont pas apaisé la foule qui campe depuis plus de deux semaines devant le siège de l’armée pour réclamer un transfert rapide du pouvoir à une autorité civile, seule à leurs yeux à même de garantir une véritable tran­sition politique.

Interrogations

Cette situation suscite plusieurs interrogations sur l’avenir du pays. Si le Soudan s’engage dans un pro­cessus réel de changement, qui sera sur la scène politique? Comment se fera la transition? Et comment res­taurer la confiance? D’après Dr Aymane Shabana, professeur à l’Institut des études africaines à l’Université du Caire et vice-presi­dent du Centre du bassin du Nil, la situation est très complexe au Soudan. « Il y a une direction mili­taire qui subit des pressions et qui n’est pas totalement cohérente, ce qui la rend vulnérable aux scis­sions ». A la tête du TMC — groupe de dix officiers supérieurs formé à la hâte quand il est devenu évident que, face à la pression de la rue, Omar Al-Béchir devait quitter le pouvoir—, le général Abdel-Fattah Al-Burhan Abdelrahman a pour lui d’être peu connu du public. Cela lui rend la vie moins difficile que celle de son prédécesseur, le général Ibn Aouf avait été contraint à la démis­sion, une journée seulement après la chute de Omar Al-Béchir. Depuis, il est censé avoir été mis à la retraite. Cet homme incarne plus les travers des généraux du régime Béchir que les espoirs des manifestants, ou ceux de l’Association des professionnels du Soudan (SPA). La SPA fait partie d’une coalition, la Déclaration pour la liberté et le changement, qui appelle à continuer de manifester.

L’épreuve de force n’est donc pas terminée. Shabana se demande alors si la direction du mouvement popu­laire, qui a remporté une certaine vic­toire en imposant la principale reven­dication de l’isolement de Béchir, sera « capable de déchiffrer avec précision les rapports de force internes et régio­naux et de maintenir la cohésion interne en attirant une partie influente de la direction des forces armées et des cadres intermédiaires et donc imposer ainsi une nouvelle équation à l’étape suivante » .

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