Des milliers de personnes sont menacées de famine au Yémen où sévit la pire crise humanitaire du monde. (Photo : AFP)
La trêve signée cette semaine entre les camps rivaux au Yémen à propos de la ville de Hodeida alimente l’espoir d’un retour à la paix dans ce pays, ravagé par la guerre. Depuis juin, les forces progouvernementales yéménites, soutenues par une coalition militaire sous commandement saoudien, sont engagées dans une offensive contre les rebelles houthis à Hodeida, port stratégique de l’ouest du Yémen, devenu principal front du conflit. Se plaignant de marginalisation, les Houthis se sont emparés fin 2014 de vastes territoires du Yémen, dont Hodeida et la capitale Sanaa.
Face à cette situation critique, l’émissaire de l’Onu a poussé les deux camps à s’asseoir à la table des négociations et leur a arraché un accord de cessez-le-feu. Selon les termes de cet accord, le cessez-le-feu doit entrer immédiatement en vigueur à Hodeida. Le retrait des combattants est, lui, prévu dans les prochains jours. Outre la trêve à Hodeida, cet accord prévoit un échange de quelque 15 000 combattants faits prisonniers ainsi que des mesures pour faciliter l’acheminement de l’aide humanitaire à Taëz (sud-ouest), ville aux mains des loyalistes et assiégée par la rébellion. Par ailleurs, les pourparlers inter-yéménites doivent reprendre fin janvier pour tenter de définir un cadre de négociation en vue d’un règlement global. Une entente importante tant attendue non seulement par les Yéménites, mais aussi par la communauté internationale.
Depuis 2014, la guerre au Yémen a fait au moins 10 000 morts et des millions de personnes sont menacées de famine dans ce pays où sévit la pire crise humanitaire du monde, selon l’Onu. Le secrétaire général de l’Onu, Antonio Guterres, a mis en garde à plusieurs reprises contre une détérioration de la situation humanitaire en 2019 au Yémen si des progrès ne sont pas faits pour rétablir la paix dans ce pays déjà dévasté par la guerre. « Le fait que la famine n’a pas encore été déclarée ne diminue en rien notre inquiétude face au niveau très élevé de la faim qui existe au Yémen », a déclaré le chef de l’Onu. Soumis à une forte pression, les rebelles houthis ont salué l’accord inter-yéménite en le considérant comme une réussite, même si le processus reste fragile. En dépit de la trêve, la ville de Hodeida demeure toujours le théâtre de violents combats et raids aériens. Les belligérants se rejettent mutuellement la responsabilité. Les affrontements ont fait une trentaine de morts dont une vingtaine de rebelles houthis.
Optimisme malgré tout
Pourtant, l’optimisme règne. « Ces premiers pourparlers depuis 2016 sont une réussite », a déclaré Daif Allah Al-Shami, ministre de l’Information du gouvernement de salut national non reconnu par la communauté internationale. Partageant le même avis, Mehdi Al-Machat, le président du Conseil politique suprême au Yémen, aile politique de la rébellion, a estimé que c’est un pas positif dans la voie de la réalisation des aspirations du peuple yéménite. « Cet accord de trêve est sans doute le plus important depuis le début de la guerre, en 2014-15. Son application risque toutefois de se heurter à plusieurs difficultés et nécessiter de fortes pressions internationales », affirme le Dr Ahmed Youssef, directeur du Centre des études et des recherches arabes et africaines au Caire.
Conscient de la fragilité de l’accord, l’émissaire de l’Onu au Yémen, Martin Griffiths, a réclamé le déploiement au plus vite d’observateurs internationaux à Hodeida et dans des ports de la province. « Permettre à l’Onu d’avoir un rôle dirigeant dans les ports est un premier pas vital. Nous devons voir cela arriver dans les jours qui viennent », a affirmé Griffiths. Selon des diplomates, quelque 30 à 40 observateurs pourraient être déployés à Hodeida, ville d’environ 600 000 habitants. Dans le conflit yéménite, d’autres points de blocage persistent, notamment celui concernant l’aéroport de Sanaa. La capitale elle-même est entre les mains des rebelles houthis depuis 2014.
Ainsi, aucun accord n’a été trouvé sur cet aéroport international fermé depuis trois ans, il fait de facto l’objet d’un blocus par la coalition progouvernementale. Son ouverture est réclamée avec insistance par les rebelles. En plus, aucun accord n’a en effet été trouvé sur le redressement de l’économie yéménite. La Banque Centrale du Yémen attendait une injection de 3 milliards de dollars de la part du Koweït et des Emirats arabes unis, qui doit contribuer à raviver une économie en ruine. Mais, il faut appliquer l’accord avant toute aide financière.
Lien court: