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Syrie : Le dilemme d’Idleb

Maha Salem avec agences, Mardi, 28 août 2018

Le régime syrien prépare une offensive pour reprendre la province d’Idleb, frontalière de la Turquie. Une offensive qui se heurte au refus des Turcs et des Américains.

Syrie : Le dilemme d’Idleb
Soutenues par les Russes, les forces gouvernementales syriennes se préparent pour l’offensive à Idleb. (Photo : AFP)

Idleb, une province du nord de la Syrie, à la frontière turque, et près de la province côtière de Lattaquié, fief du régime Assad, sera la cible de la prochaine offensive de l’armée syrienne. Le ministre syrien de la Défense, Abdallah Ayoub, a réitéré la détermination du pouvoir à reconquérir la province d’Idleb, ultime grand bastion insurgé dans le nord-ouest du pays. « Idleb va revenir sous la houlette de la nation et tout le territoire syrien sera débarrassé du terrorisme », a insisté Abdallah Ayoub. L’offensive se prépare donc bel et bien. Mais elle est peu probable sans accord d’Ankara, parrain traditionnel des rebelles. Cette région, dont la quasi-totalité échappe au contrôle de Damas, était une des zones de désescalade mises en place en Syrie à l’issue des négociations de paix d’Astana, parrainées par la Russie, la Turquie et l’Iran.

Selon des experts, le régime ne peut pas agir sans tenir compte de la Turquie, parrain traditionnel des rebelles, qui y a installé des postes d’observation et déployé des forces. Pour sa part, Ankara, qui accueille déjà plus de trois millions de réfugiés syriens et cherche à éviter tout nouvel afflux, pourrait négocier et éventuellement se mettre d’accord avec Moscou sur la nécessité d’éliminer les djihadistes à Idleb, mais sans une offensive d’envergure contre la province.

« Le régime syrien contrôle actuellement presque tout le sud. Et les rebelles qui y luttaient ont été contraints de partir vers le nord. On pensait qu’il n’y aurait pas de combats dans le nord et que le contrôle de cette région serait organisé selon des accords tacites ou annoncés entre les pays concernés de ce conflit. Mais, une offensive dans le nord soutenu par l’allié russe annonce un changement de stratégie. De même, elle annonce une vraie guerre, car elle est refusée par les Américains, les Turcs et les Kurdes », explique Dr Sameh Rashed, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, au Caire.

Bras de fer russo-américain

Et le bras de fer a d’ores et déjà commencé. Pour soutenir son allié, la Russie a accusé les rebelles syriens de préparer une attaque chimique dans la province d’Idleb pour pouvoir ensuite en accuser le régime de Damas, donnant un prétexte aux Occidentaux pour frapper les positions de l’armée syrienne dans la région. L’accusation russe est intervenue après les récentes déclarations du conseiller à la sécurité nationale du président américain Donald Trump, John Bolton, qui a prévenu que Washington réagirait très fortement si l’armé syrienne avait recours aux armes chimiques dans son offensive pour reprendre la province d’Idleb, ultime fief insurgé du pays. « Washington était inquiet à l’idée que le président Bachar Al-Assad puisse à nouveau utiliser des armes chimiques. Mais que les choses soient claires : si le régime syrien emploie des armes chimiques, nous réagirons très fortement et ils feraient bien de réfléchir un bon moment avant une quelconque décision », a déclaré Bolton. De son côté, la Turquie a mis en garde Moscou contre une possible catastrophe en cas de solution militaire à Idleb. « Une solution militaire causerait une catastrophe non seulement pour la région d’Idleb, mais aussi pour l’avenir de la Syrie. Les combats pourraient durer longtemps, les civils seront touchés », a déclaré le chef de la diplomatie turque, Mevlüt Cavusoglu.

En réponse aux mises en garde américaine et turque, le porte-parole du ministère russe de la Défense, Igor Konachenkov, a affirmé dans un communiqué que le groupe djihadiste Hayat Tahrir Al-Sham (HTS, formé de membres de l’ex-branche d’Al-Qaëda), qui domine à 60 % les groupes rebelles réunis dans la région, était en train de préparer une nouvelle provocation pour accuser le gouvernement syrien d’utiliser des armes chimiques contre la population civile de la province d’Idleb. Konachenkov a également accusé les services secrets britanniques de participer activement à cette provocation, pour donner encore une raison aux forces américaines, britanniques et françaises de mener des attaques aériennes contre les forces du gouvernement syrien.

Concrètement parlant, les préparatifs vont bon train. Le chef de la diplomatie syrienne, Walid Mouallem, effectuera une visite officielle à Moscou à la fin du mois d’août. Dans le même but, le ministre iranien de la Défense, Amir Hatami, a rencontré dimanche 26 août son homologue syrien à Damas.

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