Des tractations acharnées menées par l’Onu sont en cours pour tenter de sauver le Yémen. La communauté internationale renforce ses efforts pour éviter une bataille entre des rebelles houthis contrôlant le port de Hodeida (ouest), crucial pour l’aide humanitaire, et des forces progouvernementales. Le médiateur de l’Onu au Yémen, Martin Griffiths, s’est déclaré très inquiet devant les risques de cette attaque. « Outre les conséquences humanitaires d’une bataille qui peuvent être évitées, je suis aussi très inquiet concernant l’impact d’une telle attaque sur le processus politique que l’Onu est déterminée à faire avancer », a déclaré Griffiths, en appelant toutes les parties au conflit à créer un environnement favorable à la reprise de négociations politiques et aussi à la réouverture de l’aéroport de Sanaa au trafic commercial. Ce dernier avait été fermé après un blocus décrété par la coalition militaire sous commandement saoudien qui intervient au Yémen depuis 2015 en soutien au gouvernement, chassé de Sanaa par les Houthis et réfugié dans le sud du pays.
Intensifiant ses pourparlers avec tous les camps, le médiateur onusien a proposé de mettre le port de Hodeida sous la supervision directe des Nations-Unies. Mais les insurgés ont posé une liste de conditions en échange de leur retrait de cette grande ville sur la mer Rouge. Selon des sources politiques yéménites, parmi les conditions posées par les Houthis pour un éventuel retrait du port de Hodeida figurent le paiement des salaires des fonctionnaires civils et militaires dans les territoires contrôlés par les rebelles, la réouverture de l’aéroport de Sanaa aux vols commerciaux, la levée totale du siège des ports yéménites et l’arrêt des raids aériens de la coalition saoudienne. Autre condition, des excuses pour la mort d’un chef rebelle, Saleh Al-Samad, tué dans une frappe de la coalition en avril dans la province de Hodeida. Jugées comme des conditions impossibles, elles ont été évidemment refusées par le camp gouvernemental. Réponse: un responsable politique rebelle, Mehdi Al-Mashat, a confirmé que des négociations étaient en cours et que les Houthis seraient prêts à avancer si l’autre camp faisait preuve de bonne foi. « Tout comme notre doigt est sur la gâchette pour défendre notre nation, sa souveraineté, sa sécurité, son unité et son indépendance, nous tendons la main de la paix chaque fois que les autres parties montrent qu’elles sont sérieuses », a affirmé Mashat.
Tractations onusiennes
Une situation compliquée mettant la crise yéménite dans l’impasse une fois de plus alors que Martin Griffiths était, depuis samedi 9 juin, dans la capitale Sanaa, également aux mains des rebelles houthis soutenus par l’Iran, après avoir rencontré le président yéménite Abd-Rabbo Mansour Hadi dans la capitale saoudienne Riyad. « L’envoyé spécial discute avec les parties les pas à effectuer pour faire baisser les tensions, notamment à Hodeida, point d’entrée d’une bonne partie des importations et de l’aide humanitaire au Yémen », a déclaré le porte-parole des Nations-Unies à New York, Stéphane Dujarric. En effet, ces tractations onusiennes interviennent après l’offensive lancée la semaine dernière par les forces gouvernementales appuyées par la coalition militaire commandée par l’Arabie saoudite. Ces dernières se sont rapprochées de Hodeida et étaient sur le point de chasser les Houthis, soutenus par l’Iran. La coalition affirme que Hodeida est un point de départ pour des attaques rebelles en mer et le lieu par lequel l’Iran livrerait des armes aux Houthis, ce que Téhéran dément. Mais les tirs de missiles rebelles vers l’Arabie saoudite se sont intensifiés depuis novembre. Riyad accuse Téhéran de fournir ce type d’armements aux Houthis.
Hodeida, sur la mer Rouge, est le principal point d’entrée des importations de marchandises et de l’aide humanitaire au Yémen, pays au bord de la famine et frappé par le choléra, qui vit la pire crise humanitaire du monde, selon l’Onu. A cet égard, Lise Grande, coordinatrice humanitaire de l’Onu au Yémen, a averti qu’une bataille dans cette ville aurait un impact catastrophique sur les civils. « Notre priorité est de répondre aux besoins de 22 millions de Yéménites en aide humanitaire et en protection. Une coupure des importations via Hodeida pour une longue période fera courir à la population yéménite un risque injustifié », a mis en garde Mme Grande. Selon l’Onu, près de 70% des importations yéménites, y compris les aides humanitaires et les médicaments, transitent par ce port et celui de Salif, juste au nord.
Lien court: