Le taux de participation aux législatives a atteint 49,2 %. (Photo : AFP)
Deux faits marquants sont à signaler pour les législatives libanaises du 6 mai : une participation inférieure aux prévisions et, surtout, une montée du Hezbollah. Le lendemain du scrutin, le puissant mouvement chiite libanais a salué une « grande victoire » aux législatives qui conforte, selon lui, sa dimension militaire. « C’est une grande victoire morale et politique pour la Résistance », a lancé le chef du Hezbollah, Hassan Nasrallah, lors d’un discours télévisé, utilisant le surnom donné au mouvement en référence à sa lutte contre Israël. « Nous pouvons dire aujourd’hui (...) que l’objectif a été réalisé », a ajouté M. Nasrallah, sans dire combien des 128 sièges du parlement son parti et ses alliés avaient remportés.
Le futur parlement devrait être dominé par les partis traditionnels. Mais le Hezbollah devrait conforter sa position grâce aux alliances qu’il pourrait tisser ou renouveler. Une alliance renouvelée avec le parti chrétien du président Michel Aoun et la formation chiite Amal permettrait à une majorité de se dégager. Le Hezbollah devrait pouvoir ainsi éviter l’ouverture de certains dossiers sensibles, comme celui de son arsenal militaire, auquel il n’a jamais renoncé après la Guerre civile (1975-1990).
Quant au premier ministre sunnite Saad Hariri, il s’avère être le grand perdant. Ce dernier a déclaré que son parti, le Courant du Futur, a perdu le tiers de ses sièges, passant de 33 à 21 députés. Cependant, estiment les observateurs, la reconduction de Hariri au poste de premier ministre n’est pas menacée. « Nous avions parié sur un meilleur résultat et un bloc plus large », a reconnu Hariri, justifiant ce recul en pointant notamment du doigt l’adoption d’une nouvelle loi électorale en 2017. « Le problème de cette loi électorale c’est que plein de gens ne l’ont pas comprise », a-t-il assuré, s’exprimant sur un ton décontracté, plaisantant avec les journalistes. Il a toutefois reconnu que certaines « performances n’étaient pas à la hauteur », sans expliciter.
La nouvelle loi, qui introduit pour la première fois un mode de scrutin proportionnel, a laissé perplexes bien des électeurs, parfois obligés de choisir parmi des listes électorales alliant leurs candidats favoris à des partis qu’ils ne soutiennent pas.
Le partage du pouvoir au Liban entre les différentes communautés religieuses empêche la suprématie d’un seul parti ou d’une communauté au sein de l’hémicycle. Malgré les divergences, et parfois l’animosité, les décisions politiques majeures sont souvent prises par consensus entre les forces politiques rivales, le Hezbollah, le premier ministre, Saad Hariri, et le président, Michel Aoun, orchestrant le jeu. Ces dernières années, le pays a connu des crises à répétition, évitant, souvent de justesse, l’engrenage de la violence, malgré une situation géographique sensible entre la Syrie en guerre et Israël. Indépendamment de l’issue finale du scrutin, le Hezbollah, seule formation à ne pas avoir abandonné les armes après la Guerre civile (1975-1990), devrait continuer à dominer la scène politique.
Faible participation
Outre la montée du Hezbollah, le taux de participation aux législatives libanaises a atteint 49,2 % contre 54 % en 2009. Peu, estiment les analystes et la classe politique libanais, d’autant plus que ces législatives étaient attendues, les dernières remontant à 9 ans. « Après plusieurs reports, et avec la situation grave qui plane sur la région, surtout la Syrie voisine, on s’attendait à un taux de participation plus élevé. D’autant plus que c’était le vrai enjeu et tous les partis ont appelé à une participation massive », explique Dr Ahmad Youssef, directeur du Centre des études et des recherches arabes au Caire. Pourquoi donc ce désintérêt, bien que l’événement ait été particulièrement médiatisé et que son importance soit mise en exergue ? « C’est parce que les Libanais n’ont pas vraiment l’espoir de voir ni vrais changements dans la vie politique libanaise, ni amélioration dans les conditions économiques », estime l’analyste.
Les dernières législatives remontent à 2009. Le parlement a ensuite prorogé à trois reprises son mandat. Invoquant notamment des risques pour la sécurité du pays liés au débordement de la guerre en Syrie, qui a fait rage depuis 2011.
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