La guerre du Yémen se prolonge.
(Photo : Reuters)
C’est avec l’entrée du conflit yéménite dans la 4e année que coïncide l’arrivée du nouvel envoyé spécial de l’Onu au Yémen, le Britannique Martin Griffith, et surtout ses premières démarches pour rétablir la paix. Une lourde tâche, alors que son prédécesseur, Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, avait jeté l’éponge, suite à plusieurs tentatives infructueuses. Mais Martin Griffith a tout de suite mis la main à la pâte, entamant la semaine dernière ses premières consultations avec les différentes parties, avec pour objectif de relancer la médiation entre les belligérants qui refusent de s’asseoir à la table des négociations.
L’émissaire de l’Onu s’est ainsi rendu à Sanaa puis Riyad. Il s’est entretenu avec des membres du gouvernement yéménite légitime, mais aussi avec des représentants houthis et des responsables saoudiens. « J’ai entendu les différentes parties, et j’ai constaté que tous veulent mettre fin à la guerre. Cela m’a donné l’espoir que l’on puisse trouver un chemin vers la paix. Tous ceux que j’ai rencontrés, que ce soit à Riyad ou à Sanaa, ont montré une volonté réelle de parvenir à une solution politique. Et je vais travailler dur pour y arriver », a déclaré Martin Griffith après sa tournée, tout en promettant de revenir régulièrement au Yémen dans les mois à venir.
Mais l’enthousiasme de Martin Griffith risque de se heurter à la réalité. En effet, trois ans après le début de la guerre entre des rebelles yéménites chiites houthis et la coalition de pays arabes menée par l’Arabie saoudite, le conflit ne cesse de s’enliser et de tourner à la crise régionale. Si l’Iran a, depuis le début, été accusé de soutenir politiquement, financièrement et militairement les Houthis, la question prend désormais plus d’ampleur, notamment suite aux missiles lancés par les Houthis en territoire saoudien. En effet, les miliciens houthis ont tiré, le 26 mars, une salve de 7 missiles balistiques, pour la première fois, en direction de l’Arabie saoudite. Tous ont été interceptés par la défense aérienne saoudienne, a assuré la coalition arabe.
C’est la première fois que la rébellion houthie lance autant de missiles balistiques simultanément en direction de l’Arabie saoudite, un acte qualifié d’agressif et d’hostile. « Le tir de multiples missiles balistiques vers des villes est un développement grave », a affirmé le colonel Turki Al-Maliki, porte-parole saoudien de la coalition arabe, qui, dirigée par Riyad, soutient les autorités yéménites reconnues par la communauté internationale contre les rebelles houthis, soutenus par l’Iran. Et d’ajouter: « La coalition prendra toutes les mesures pour assurer la sécurité du Royaume saoudien ».
Déjà, en novembre 2017, alors qu’un missile balistique Borkan 2H (dérivé d’un engin iranien) tiré depuis le Yémen par les rebelles houthis venait de tomber dans une zone inhabitée de Riyad, l’Arabie saoudite avait évoqué une « agression militaire flagrante » commise par le régime de Téhéran. Et d’affirmer qu’elle se réservait le droit de « répondre à l’Iran au moment approprié et de manière appropriée ».
Téhéran pointé du doigt
Or, cette fois-ci, Riyad n’a pas été la seule à pointer l’Iran du doigt. Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni ont eux aussi condamné ces derniers tirs de missiles contre l’Arabie saoudite. La diplomatie britannique a même demandé à l’Iran de « cesser d’envoyer des armes qui prolongent le conflit » au Yémen. Téhéran n’a pas répondu à Riyad mais à Londres. « Sans l’ombre d’un doute, le Royaume-Uni a une responsabilité directe dans les crimes de guerre commis (…) au Yémen, en vendant des armes aux pays de la coalition sous commandement saoudien », a ainsi répliqué le porte-parole du ministère iranien des Affaires étrangères, dont le pays continue de démentir qu’il arme les Houthis, et ce, bien qu’un rapport d’experts de l’Onu ait conclu, en janvier dernier, que Téhéran avait échoué à empêcher les Houthis de s’approvisionner en drones et missiles balistiques de probable provenance iranienne, violant ainsi l’embargo sur les livraisons d’armes au Yémen approuvé par la résolution 2216 de l’Onu en avril 2015.
Ce n’est donc plus un conflit interne que le nouvel émissaire onusien doit régler, mais un conflit à dimension régionale où personne ne semble prêt à faire des concessions. Le 25 mars dernier à la veille du lancement des missiles sur le territoire saoudien, en célébrant le 4e anniversaire de la guerre, le chef des Houthis, Abdel-Malek Al-Houthi déclarait, menaçant: « Nous sommes prêts à plus de sacrifices parce que notre peuple est devenu plus apte à résister à l’agression ».
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