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Israël sape la solution à deux Etats

Maha Salem avec agences, Jeudi, 11 janvier 2018

Profitant du soutien américain, de la faiblesse des Palestiniens et de l'inaction de la communauté internationale, Israël multiplie les mesures visant à rendre impossible la division de Jérusalem.

Israël sape la solution à deux Etats
Les mesures israéliennes balaient les espoirs de paix au Proche-Orient. (Photo : Reuters)

Depuis la décision américaine de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël, l’Etat hébreu ne cesse de multiplier les mesures visant à imposer le fait accompli et balayant encore plus les espoirs d’une solution à deux Etats. Des mesures face auxquelles Palestiniens et Arabes restent pour le moment impuissants. Pourtant, une réunion regroupant, le samedi 6 janvier, à Amman, les ministres des Affaires étrangères égyptien, saoudien, palestinien, marocain et émirati, en plus du secrétaire général de la Ligue arabe, Ahmad Aboul-Gheit, était consacrée à Jérusalem. « La Ligue arabe va chercher à obtenir la reconnaissance internationale d’un Etat palestinien avec Jérusalem-Est comme capitale, en réponse à la décision unilatérale américaine de déclarer Jérusalem capitale d’Israël », a indiqué, samedi, le ministre jordanien des Affaires étrangères. L’un des objectifs est de réaffirmer « l’invalidité de la décision (américaine) de reconnaître Jérusalem comme capitale d’Israël et le fait qu’elle n’ait aucune conséquence juridique », a déclaré Aymane Safadi, lors d’une conférence de presse conjointe avec le secrétaire général de la Ligue arabe. « Nous chercherons à obtenir (...) la reconnaissance d’un Etat palestinien avec Jérusalem-Est pour capitale dans les frontières de juin 1967 », a-t-il ajouté.

Mais d’ici à ce que cette reconnaissance voit le jour, il sera impossible de faire de Jérusalem- Est la capitale palestinienne, si l’Etat hébreu persiste dans sa politique. En effet, le parlement israélien a adopté, la semaine dernière, un projet de loi visant à compliquer le passage sous souveraineté palestinienne de certaines zones de Jérusalem dans le cadre d’un futur accord de paix. Le texte, approuvé à 64 voix contre 51. Cette loi prévoit que toute cession aux Palestiniens de ce qu’Israël considère comme faisant partie de Jérusalem nécessitera un vote à la majorité des deux tiers des députés. Selon un communiqué du Parlement, la loi permet également de modifier la définition municipale de Jérusalem, certains secteurs de la ville pouvant ainsi être déclarés comme des entités séparées. Parallèlement, le ministre israélien de la Défense, Avigdor Lieberman, a annoncé de nouveaux plans de construction de logements dans les colonies juives de Cisjordanie occupée, des plans qui doivent être présentés ce mercredi. Le nombre de logements concernés n’a pas été précisé. Auparavant, le Likoud, parti du premier ministre Benyamin Netanyahu, avait adopté à l’unanimité une résolution appelant « les responsables élus du Likoud à permettre la libre construction dans les colonies et l’application de la législation israélienne à tous les secteurs d’implantation juive libérés de la Judée-Samarie (nom biblique de la Cisjordanie) ». Un texte qui n’a pas de valeur légale, mais qui, s’il est adopté par le gouvernement, mettrait définitivement fin à la solution à deux Etats dans la mesure où l’étendue d’un éventuel Etat palestinien serait réduite à une peau de chagrin. Ce texte devait initialement être voté en octobre, et Netanyahu avait alors reporté le vote. Aujourd’hui, fort de la position américaine et de l’impuissance palestinienne, Netanyahu a laissé passer le texte, d’autant plus qu’il fait actuellement face à la surenchère du lobby procolonisation et de membres de son propre gouvernement favorables à l’annexion.

Washington menace de suspendre l’aide aux Palestiniens

« Profitant du soutien américain, du silence mondial et de la faiblesse des Palestiniens, l’Etat hébreu concrétise tous ses buts. Les Israéliens savent parfaitement que personne ne peut les arrêter et ils en profitent. Les Palestiniens, eux, restent les bras croisés, alors qu’ils devraient faire vite pour essayer de trouver un soutien ou un allié international qui puissent s’opposer aux Israéliens, puisque la communauté internationale est aujourd’hui préoccupée par d’autres crises », explique Ahmad Youssef, directeur du Centre des études arabes et africaines au Caire. En attendant, le président palestinien, Mahmoud Abbas, se contente de condamnations. Pour lui, le vote du parlement est « une déclaration de guerre » qui n’aurait pas pu avoir lieu « sans le soutien total de l’Administration américaine ». Abbas a déploré que la Maison Blanche ait refusé de condamner les colonies israéliennes, ainsi que les attaques systématiques et les crimes de l’occupation israélienne contre le peuple de Palestine. « Nous espérons que ce vote permettra de rappeler à la communauté internationale que le gouvernement israélien, avec le soutien total de l’Administration américaine, n’est pas intéressé par une paix juste et durable », a affirmé Abbas. La réponse américaine n’a pas tardé. Le président américain, Donald Trump, a menacé de couper l’aide aux Palestiniens « pour sanctionner leur refus de négocier avec Israël ». (319 millions de dollars en 2016, selon des chiffres disponibles sur le site de l’agence de développement USAID). Bien que cet argent soit vital pour l’Autorité palestinienne, dont le budget est lourdement dépendant de l’aide internationale, le porteparole de la présidence palestinienne a assuré que Jérusalem n’était pas à vendre. « Jérusalem est la capitale éternelle de l’Etat de Palestine et n’est pas à vendre pour de l’or ou de milliards », a affirmé à l’AFP Nabil Abou-Roudeina. « Nous ne sommes pas opposés à reprendre des négociations, mais elles doivent être fondées sur le droit international et les résolutions de l’Onu, qui ont reconnu un Etat palestinien indépendant avec Jérusalem-est comme capitale », a insisté le porte-parole pour contester les accusations de Trump. « Nous ne céderons pas au chantage », a également affirmé Hanan Achrawi, une responsable de l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP).

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