La communauté internationale voulait éviter que le Liban ne devienne un terrain de confrontation entre l'Iran et l'Arabie saoudite.
(Photo : Reuters)
Le pire a, semble-t-il, été évité au Liban. Ne serait-ce que momentanément. En effet, les forces politiques libanaises, tout comme la communauté internationale, ont tout intérêt à contenir la crise. D’où l’engagement international— mené par Paris — aux côtés du Liban. C’est dans cette perspective que s’est tenue, vendredi 8 décembre à Paris, une réunion du Groupe International de Soutien au Liban (GIS), présidée par les Nations-Unies et la France et à laquelle a assisté le premier ministre libanais, Saad Hariri, qui est finalement revenu sur sa démission.
L’Allemagne, la Chine, l’Egypte, les Etats-Unis, l’Italie, le Royaume-Uni, la Russie, l’Union européenne, la Ligue arabe, le Haut-Commissariat des Nations-Unies pour les réfugiés, le Programme des Nations-Unies pour le développement, le Bureau du coordonnateur spécial des Nations-Unies pour le Liban et la Banque mondiale ont également pris part à cette réunion.
Objectif : réaffirmer l’attachement à la stabilité, à la sécurité et à la souveraineté du Liban, ainsi que le soutien aux efforts réalisés actuellement par les autorités libanaises pour restaurer le fonctionnement normal des institutions et préparer la tenue d’élections législatives d’ici mai 2018, conformément aux normes internationales. Le GIS rappelle la nécessité de protéger le Liban des crises qui déstabilisent le Moyen-Orient et appelle tous les Etats et organisations de la région à travailler à la stabilité et sécurité politique, sociale, économique et financière du Liban dans le respect de sa souveraineté et de son intégrité.
« La communauté internationale voulait à tout prix éviter que le Liban ne devienne un terrain de la confrontation entre l’Iran et l’Arabie saoudite, d’autant plus que l’exemple du Yémen, où le conflit par procuration s’est aggravé avec l’assassinat de l’ex-président, Ali Abdallah Saleh, fait craindre le pire », explique l’analyste Rabha Allam, spécialiste des affaires du Liban au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. Allam explique que « la mobilisation de tous les acteurs politiques libanais afin de préserver la stabilité du pays, en soutenant Hariri et en refusant sa démission, a permis au Liban de dépasser cette crise». Et d'ajouter: « Le président Michel Aoun a eu un rôle distinctif. Malgré son alliance avec l’Iran, il a géré la crise avec objectivité et neutralité. Aussi, ses bonnes relations avec la France ont favorisé la sortie de crise. On a vu comment le président français, Emmanuel Macron, est très vite intervenu pour parvenir à une solution tout en soutenant Hariri ».
Au cours de la réunion de Paris, le GIS a exprimé sa satisfaction concernant le retour à Beyrouth de Saad Hariri, qui est « un partenaire-clé pour la préservation de l’unité et de la stabilité du Liban ». Il a aussi salué la décision de M. Hariri, prise en accord avec le président libanais, Michel Aoun, de poursuivre son mandat à la tête du gouvernement, ainsi que la décision de « dissocier le Liban de tout conflit ou guerre de la région et des affaires internes des pays arabes ». Le GIS a en outre appelé toutes les parties libanaises à mettre en oeuvre cette politique concrète de distanciation et de non-ingérence dans les conflits externes, qui est une priorité importante énoncée dans de précédentes déclarations, notamment dans la Déclaration de Baabda de 2012, tout en soulignant la nécessité de mettre en oeuvre et de respecter pleinement toutes les résolutions du Conseil de sécurité des Nations-Unies, notamment les résolutions 1559 (2004) et 1701 (2006).
Mais cette fameuse politique de distanciation — un principe de base au Liban depuis qu’il s’est affranchi du joug syrien— est-elle concrètement praticable, notamment par le Hezbollah, allié de Téhéran et engagé dans le conflit syrien auprès des forces du régime, alors que c’est justement à cause de la politique du Hezbollah que Hariri avait présenté sa démission? « Le Hezbollah ne veut pas, à l’heure actuelle, aggraver la situation au Liban. Il a paru même soutenir Hariri en l’appelant à rester premier ministre du pays », répond Allam. « Par ailleurs, sur le plan régional, le rôle du Hezbollah est en déclin en ce moment, notamment avec l’approche d’une solution politique en Syrie », estime Rabha Allam.
Et les armes du Hezbollah ?
Mais la problématique du Hezbollah ne concerne pas uniquement son engagement dans des conflits régionaux. L’une des questions majeures au sein du Liban est celle des armes du Hezbollah et son emprise sur le sud du pays. Si la réunion du GIS n’en a pas parlé directement, le sujet a tout de même été évoqué. Les parties réunies à Paris ont exprimé leur profonde inquiétude au vu de toutes les violations liées à la résolution 1701. Votée après la fin du conflit de 2006 entre le Hezbollah et Israël, cette résolution demande au gouvernement libanais de déployer son armée au Sud-Liban et renforce le mandat de la Force Intérimaire des Nations-Unies au Liban (FINUL). A cet effet, le GIS a appelé les Forces Armées Libanaises (FAL) et la FINUL à renforcer leur coopération, afin d’accélérer le déploiement efficace et durable des FAL dans le sud et dans les eaux territoriales du Liban. En outre, le groupe a appelé « toutes les parties libanaises à reprendre les discussions pour atteindre un consensus sur une Stratégie nationale de défense (...), rappelant que les FAL sont les seules forces armées légitimes du Liban, comme énoncé dans la Constitution libanaise et dans l’accord de Taëf ».
Autant d’appels qui prouvent que le règlement de la question du désarmement du Hezbollah n’est pas pour demain. Une question sans cesse reportée. « Aujourd’hui, toutes les forces politiques focalisent sur un seul, ou plutôt un premier objectif, les prochaines élections », conclut Rabha Allam.
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