L'attaque de Khan Cheikhoun a fait plus de 80 victimes.
Le régime syrien vient d’être désigné dans un rapport de l’Onu comme responsable de l’attaque au gaz sarin sur le village de Khan Cheikhoun. Le rapport rendu public jeudi dernier a perturbé les préparations des négociations qui se sont ouvertes lundi 30 octobre à Astana, et celles prévues à Genève le 28 novembre prochain. Car ce rapport embarrasse Damas. Des experts de l’Onu et de l’OIAC (Organisation pour l’Interdiction des Armes Chimiques) ont estimé que le régime de Damas était bel et bien responsable de l’attaque qui a tué plus de 80 personnes en avril dernier dans cette bourgade du nord-ouest de la Syrie. Les éléments rassemblés vont dans le sens du «
scénario le plus probable » selon lequel le sarin était contenu dans une bombe larguée d’un avion, affirme le rapport, «
certain que le responsable de cette attaque sur Khan Cheikhoun est le régime syrien ».
Les Etats-Unis, la France et le Royaume-Uni avaient accusé les forces du président syrien Bachar Al-Assad d’être responsables de cette attaque, mais Damas avait démenti toute implication, et rejette catégoriquement le contenu du rapport conjoint de l’Onu et de l’Organisation pour l’interdiction des armes chimiques. « Ce rapport et celui qui l’a précédé ont falsifié la vérité et déformé les informations exactes sur ce qui s’est passé à Khan Cheikhoun », a indiqué un communiqué du ministère syrien des Affaires étrangères. Le communiqué, cité par les médias officiels, a dénoncé la « méthode d’enquête qui s’est basée sur les propos des criminels qui ont commis cet acte immoral à Khan Cheikhoun et sur des témoins douteux ». D’après le ministère, le rapport a été rédigé sur la base « d’instructions de l’Administration américaine et de pays occidentaux pour exercer davantage de pression politique » sur Damas.
Le régime syrien a toujours nié être l’auteur de l’attaque au gaz sarin qui a fait le 4 avril 87 morts. Le président syrien Bachar Al-Assad a même accusé les Occidentaux d’avoir « monté toute l’histoire » pour préparer le terrain à des frappes américaines, menées quelques jours plus tard contre une base du régime.
Quelles conséquences ?
Reste à savoir ce que va faire la communauté internationale après la publication du rapport. Selon un diplomate qui a requis l’anonymat, « Washington et l’Union européenne avaient fait de l’usage des armes chimiques une ligne rouge que Damas ne devait pas franchir, pourtant, le régime d’Assad a été soupçonné à plusieurs reprises d’y avoir recours, et cela n’a pas d’importantes conséquences ». Selon lui, cette question n’a plus d’influence directe sur le cours des événements. « Je pense que cela va surtout servir de moyen de pression dans le processus politique pour obtenir les concessions de la part du régime », estime-t-il.
Du côté des puissances mondiales, les réactions sont différentes. « Une réponse internationale forte est désormais essentielle pour demander des comptes aux responsables de l’attaque de Khan Cheikhoun », a déclaré à des journalistes l’ambassadeur britannique à l’Onu, Matthew Rycroft. « Il appartient maintenant au Conseil de sécurité d’agir en lien avec ces conclusions et de rendre justice », a-t-il ajouté, assurant que Londres était en pourparlers avec Washington sur un projet de résolution sanctionnant la Syrie. Mais une telle mesure ferait probablement l’objet d’un veto de la Russie, alliée du président Assad. Moscou, qui affirme que le sarin retrouvé à Khan Cheikhoun provient de l’explosion d’un obus au sol et non d’une attaque aérienne syrienne, a estimé, vendredi, que le rapport montrait « de nombreuses contradictions, des incohérences logiques, une utilisation de témoignages douteux et de preuves non confirmées ». C’est ce qu’a dénoncé le ministre adjoint des Affaires étrangères, Sergueï Riabkov, à l’agence Interfax. « A la différence de nos interlocuteurs qui dorment et ne rêvent de ce rapport que pour l’utiliser comme une arme pour leurs propres objectifs géopolitiques en Syrie, nous avons tranquillement et professionnellement étudié le contenu de ce document », a-t-il poursuivi. Il a précisé que la Russie, alliée de longue date du régime de Bachar Al-Assad, livrerait une « analyse » plus complète plus tard. L’usage de l’arme chimique dans la guerre en Syrie a été, depuis le début, l’une des questions les plus sensibles.
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