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Maroc : Retour à la case départ

Maha Salem avec agences, Lundi, 20 mars 2017

Cinq mois après les législatives, le roi du Maroc, Mohammed VI, a confié à l'islamiste Saad-Eddine El Othmani la mission de former un nouveau gouvernement pour sortir de la crise politique.

Maroc : Retour à la case départ
Après 5 mois de crise politique, le roi marocain a confié à Saad-Eddine El Othmani de former le gouvernement. (Photo:AFP)

Après cinq mois de négociations acharnées sans résultats, le roi du Maroc, Mohammed VI, a remer­cié le premier ministre islamiste marocain, Abdelilah Benkirane. Il a confié à l’islamiste Saad-Eddine El Othmani la mission de former un nouveau gouvernement. Une décision devenue nécessaire pour sortir le pays d’une crise politique inédite dans l’histoire récente du Maroc : cinq mois sans gouverne­ment et le remplacement du premier ministre désigné pour « dépasser la situation d’immobi­lisme actuelle », selon un communiqué rendu public par le cabinet royal. Déjà, El Othmani, 61 ans, est le numéro deux du Parti Justice et Développement (PJD, islamiste). Une fois nommé, il a annoncé que « c’est une lourde responsabilité dans ce contexte politique parti­culier », mais le choix d’El Othmani est le plus logique et le plus raisonnable en termes de statut « car il est le numéro deux du parti et son ancien secrétaire général. Il est populaire dans sa formation et apprécié par les autres acteurs politiques. C’est un homme de consen­sus, il n’est pas frontal et son style pourrait trancher avec celui de Benkirane », a déclaré à l’AFP Abdellah Tourabi, chercheur et chroni­queur politique marocain.

A la tête du ministère des Affaires étrangères de janvier 2012 à octobre 2013, M. El Othmani devra désormais surmonter les difficultés aux­quelles a fait face son prédécesseur. A la tête du gouvernement depuis la victoire historique de sa formation islamiste dans le sillage des Printemps arabes en 2011, le secrétaire général du Parti Justice et Développement (PJD) avait été reconduit dans ses fonctions par le roi au lendemain du scrutin législatif du 7 octobre 2016 remporté une nouvelle fois par le PJD. Il n’est toutefois pas parvenu à former une coali­tion majoritaire, malgré cinq mois d’intenses et interminables tractations.

M. Benkirane proposait de reconduire la coalition sortante, une alliance hétéroclite de quatre formations rassemblant islamistes, libéraux et ex-communistes. Mais il a dû faire face à l’opposition de l’ex-ministre de l’Agri­culture, Aziz Akhannouch, nouveau patron du Rassemblement National des Indépendants (RNI), un parti constitué de technocrates et de notables, qui exigeait l’entrée au gouverne­ment de deux autres formations alliées, et la mise à l’écart du parti de l’Istiqlal.

M. Akhannouch, l’une des plus grosses for­tunes du continent, s’est posé comme un nouveau poids lourd de la politique locale et de l’opposition aux islamistes. De fait, la relation entre les deux hommes a vite tourné au bras de fer, plongeant le pays dans une situation d’impasse inédite. Selon les ana­lystes, ils prévoient que cet homme d’affaires est soutenu par le Royaume et sa montée sur la scène politique est une stratégie menée par le Royaume pour diminuer l’influence du parti islamiste sur les Marocains. Avant les élections d’octobre, on attendait l’échec du parti islamiste, mais au contraire, ce dernier a remporté les législatives pour la deuxième fois. Cette victoire a inquiété le Royaume qui, à son tour, souhaite éloigner tous les autres poids ou forces politiques qui existent sur la scène politique.

Difficultés persistantes
Inquiets de l’impasse politique qui plane sur le pays, les dirigeants du PJD ont souligné également que si les conditions posées par ces partis persistent, il sera difficile de constituer un gouvernement, quel que soit le chef du gouvernement désigné. Et de son côté, le parti a appelé à accélérer la formation du gouver­nement, tout en assurant son soutien au nou­veau premier ministre issu de ses rangs. A cet égard, les dirigeants du parti islamiste étaient réunis samedi à huis clos pour décider de la ligne à suivre dans les négociations en vue. Le PJD n’a pas dévoilé la stratégie qu’il adop­tera dans les négociations, mais selon les dirigeants de ce parti, il n’est plus disposé à faire de concessions, renvoyant ainsi la balle dans le camp de M. Akhannouch. « Mon parti avait déjà fait beaucoup de concessions, et ce serait inacceptable que les conditions posées par l’autre partenaire restent inchangées », a déclaré à l’AFP Aziz Rebbah, ancien ministre des Transports et figure de la formation isla­miste avant le début de la réunion. Au Maroc, les lignes idéologiques des partis comptent peu ou pas dans la formation des coalitions, qui travaillent sous la tutelle du roi, chef d’Etat au-dessus des partis, et qui garde la haute main sur la diplomatie, la sécurité ou les secteurs-clés de l’économie.

La nouvelle Constitution marocaine, plébis­citée en juillet 2011, a renforcé le pouvoir politique par rapport au pouvoir monarchique. Elle prévoit en effet que le roi doit choisir le chef du gouvernement au sein du parti arrivé en tête des élections. Le texte ne précise pas, cependant, que celui-ci doit être le leader de sa formation,

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