La coalition arabe intervenant au Yémen sous commandement saoudien a annoncé une trêve de 48 heures. Cette annonce surprise intervient alors qu’un autre cessez-le-feu a été annoncé à l’initiative du secrétaire d’Etat américain, John Kerry. Ce cessez-le-feu avait pourtant été rejeté par le camp du président yéménite, Abd-Rabbo Mansour Hadi, qui a dit dans un premier temps, ne pas être au courant de cette initiative. Mais sous forte pression de l’Onu et de la communauté internationale, la nouvelle trêve a été décidée par la coalition à la demande du président Hadi pour rétablir la paix au Yémen et assurer la distribution d’aide humanitaire à travers le pays. Ces annonces simultanées témoignent aussi bien de la complexité de la situation que de l’impuissance internationale. Ce qui n’augure de rien de bon.
« L’initiative de Kerry a été rejetée par le camp du président yéménite, car elle prévoyait, outre une trêve, la formation d’un gouvernement d’union nationale avant la fin de l’année et une vraie participation des Houthis au pouvoir. Ce qui veut dire qu’elle accepte et concrétise la présence et le pouvoir des Houthis », explique Dr Moatez Salama, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire. « D’ailleurs, ce cessez-le-feu a été annoncé après des négociations avec les rebelles uniquement à Mascate, ce qui a inquiété le camp du président Hadi et qui l’a poussé à décider, lui, d’une autre trêve mais selon ses conditions », explique Salama.
Or, malgré l’annonce de ces deux trêves, les combats se sont poursuivis sur les différents fronts de guerre au Yémen. Et le camp de Hadi a répété que le cessez-le-feu ne serait renouvelé que si les rebelles chiites houthis et leurs alliés le respectent et laissent passer de l’aide humanitaire dans les villes qu’ils assiègent, dont Taez (sud-ouest). Par ailleurs, la coalition a prévenu qu’elle ripostera si les Houthis ou leurs alliés procèdent à une quelconque activité militaire ou mouvement de troupes durant la trêve. Selon un communiqué, la coalition exige aussi que les rebelles envoient leurs délégués à la commission de désescalade et coordination, créée à l’initiative de l’Onu et basée à Dhahran, dans le sud de l’Arabie saoudite, pour superviser une cessation des hostilités. Du côté des Houthis, le porte-parole militaire des rebelles, le général Charaf Loqman, a indiqué que ces derniers observeraient la trêve, à condition que « l’autre partie la respecte ».
En se renvoyant ainsi la balle, les protagonistes de la guerre au Yémen répètent le même scénario et ne laissent aucune chance à la trêve de tenir pour qu’elle puisse être un prélude à un règlement politique. Six tentatives de cessez-le-feu ont jusqu’ici échoué. La dernière annoncée sous l’impulsion de Washington, de Londres et de l’Onu, pour le 20 octobre dernier, a volé en éclats dès son entrée en vigueur.
Le médiateur de l’Onu pour le Yémen, Ismaïl Ould Cheikh Ahmed, avait initié en octobre un plan de paix espérant remettre les parties autour d’une table de négociations. Quelques mois auparavant, les pourparlers de paix interyéménites, qui s’étaient tenus à Koweït pendant trois mois sous l’égide de l’Onu, avaient été suspendus sans résultat en août dernier.
Avec toujours les mêmes divergences qui reviennent: le camp Hadi exige le retrait des rebelles des territoires conquis depuis 2014, dont la capitale Sanaa, et la restitution des armes lourdes saisies. En revanche, les Houthis exigent un arrêt des raids aériens de la coalition et la formation d’un gouvernement d’union nationale qui les inclut en vue d’un règlement politique.
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