Baptisée «
le sommet de l’espoir », la rencontre des chefs d’Etat et de gouvernement arabes est prévue les 25 et 26 juillet courant à Nouakchott. Selon Ahmed Benhelli, secrétaire adjoint de la Ligue arabe, l’ordre du jour du sommet comprendra tout ce qui concerne les questions de l’heure vécues par la région arabe ; citons entre autres le rôle arabe actuel, la sécurité nationale arabe, et tout ce qui s’y rapporte, en termes de lutte contre le terrorisme et de création de la force arabe commune, la situation au Yémen, en Libye, en Syrie et d’autres sujets d’ordre économique.
Le sommet devrait également discuter tous les aspects et les développements de la question palestinienne, de la coopération entre la partie arabe et les autres regroupements et ensembles, l’ingérence dans les affaires internes arabes, en plus du dossier de la réforme de la Ligue arabe et de ses institutions. « Je pense que l’espoir de la réussite du prochain sommet existe, mais les défis qui s’y posent sont remarquables », pense Mohamad Ezz Al-Arab, expert au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. « Les conflits araboarabes sont considérés comme étant l’une des principales sources de menace du système régional arabe et de son institution mère, à savoir la Ligue arabe. Avec en plus les différends récents de nature ethnique, religieuse et identitaire au sein des pays arabes, stimulés par certaines forces extérieures qui visent à démanteler le système régional arabe et à réaliser certains intérêts stratégiques, citons entre autres l’Iran et la Turquie », ajoute-t-il.
La ligue joue le rôle d’observateur, ses réactions et communiqués montrent toujours sa faiblesse et sa passivité. « Concernant les questions arabes, on ne peut pas dire que le rôle de la Ligue arabe soit nul, mais plutôt, c’est un mauvais rôle qui ne prend pas en compte les différentes dimensions », affirme Dr Ahmed Youssef, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire. Effectivement, les divisions arabes apparaissent plus clairement à l’échelle de la crise en Syrie qui est absente des sommets arabes. « Après la suspension du travail de la mission d’observateurs de la Ligue arabe en Syrie en 2012, on a constaté l’apparition de deux camps au sein de la Ligue arabe ; le camp pro-Assad soutenu par l’Algérie, l’Iraq et le Liban, et l’autre anti- Assad soutenu par les pays du Golfe, excepté le Sultanat d’Oman », remarque Rabha Allam, chercheuse au CEPS. « Le fait que la Ligue arabe a exclu la Syrie de ses activités représente une vraie contrainte face à toute solution de la crise syrienne et au travail de Ligue arabe », constate Dr Youssef. Selon Allam, « il n’est pas prévu que le prochain sommet adopte des décisions importantes à l’égard de la crise syrienne, mais plutôt, ça pourra être une opportunité afin d’examiner la livraison de l’assistance humanitaire à la population syrienne sous blocus, ce qui pourra ouvrir la voie vers un nouveau cycle de négociations sous l’égide des Nations-Unies ».
A propos de la crise libyenne, « on a vu que la ligue a joué un mauvais rôle lorsqu’elle avait encouragé l’intervention militaire extérieure en Libye, en appelant le Conseil de sécurité de l’Onu à autoriser la mise en place d’une zone d’exclusion aérienne en Libye. Une telle décision a cédé la place à l’engagement de l’Otan en Libye qui, d’une part, a mis fin au pouvoir de Kadhafi, mais, d’autre part, a conduit la Libye au chaos », clarifie Dr Youssef. Quant au Yémen, La ligue arabe avait agi d’une manière qui diffère des deux cas précédents. « La ligue n’a pas commis de fautes fatales comme c’était le cas en Syrie et en Libye, mais son rôle était passif. En plus, ce sont les Nations-Unies qui gèrent les négociations sur l’avenir du Yémen », ajoute Dr Youssef.
Préoccupation majeure
Le secrétaire adjoint de la Ligue arabe, M. Benhelli, avait annoncé que la question du terrorisme et de ses implications sur la sécurité nationale arabe sera au centre des travaux du sommet de Nouakchott, différentes approches de lutte antiterroriste seront examinées. Selon Dr Amira Abdelhalim, experte au CEPS, « la Ligue arabe souffre de plusieurs lacunes au niveau de l’adoption des stratégies de la lutte antiterroriste en les comparant à celle de l’Union africaine ». Dr Youssef constate que « du point de vue théorique, le conseil de la Ligue arabe prend de brillantes décisions au niveau de la lutte antiterroriste, mais ce sont de belles paroles qui attendent d’être concrétisées ». « J’ai l’impression que la création de la force arabe commune pourra être un atout important pour accroître la capacité de la ligue de défendre les intérêts de ses Etats membres, mais l’équilibre des pouvoirs au sein de la Ligue va entraver sa mise en place », prévoit-il. Quant à la question palestinienne, la Ligue arabe, comme toutes les autres organisations mondiales, n’a jamais réussi à faire des pas concrets. Elle n’a jamais pu relancer la roue des négociations de paix bloquées depuis des années, ce qui pose un défi supplémentaire devant le prochain sommet (lire page 5).
Quel espoir ?
Le prochain sommet pourra toutefois être tenu avec succès et pourra être une étape positive vers la sortie du monde arabe de sa stagnation et transcender les obstacles auxquels la plupart des pays arabes font face. Mais à condition de prendre en compte certains facteurs. « Ce n’est pas logique de jeter tous les fardeaux arabes sur les épaules du secrétaire général dont les pouvoirs sont limités. Le maximum qu’il pourra faire sera la réforme administrative du secrétariat général de la Ligue », pense Dr Youssef. « Quant à la vraie réforme de la Ligue arabe et l’activation de son rôle, cela doit émaner d’une vraie volonté des Etats membres », affirmet- il. « Il y a une nécessité incontournable que la Ligue commence d’étudier profondément la nature des différents conflits qui menacent l’unité du monde arabe. A mon avis, c’est la première étape indispensable afin de garantir l’activation du rôle de la Ligue arabe à long terme », conclut Dr Youssef.
Lien court: