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Processus de paix : Une rencontre sans résultat concret

Maha Salem avec agences, Mercredi, 08 juin 2016

Comme prévu, la réunion tenue vendredi à Paris pour tenter de relancer le processus de paix israélo-palestinien n'a donné aucune avancée.

Processus de paix : Une rencontre sans résultat concret
l'automne 2016, la communauté internationale devrait organiser une conférence de paix avec la présence des Israéliens et des Palestiniens. (Photo : AFP)

Sans la présence des Israéliens ni celle des Palestiniens, la communauté internationale a réaffirmé vendredi dernier son soutien à la solution à deux Etats. La conférence, tenue vendredi dernier à Paris sous l’impulsion française, était une première étape de l’initiative française pour relancer le processus de paix, un prélude à l’organisation d’une conférence de paix à l’automne 2016, avec cette fois-ci les deux parties concernées. Ce qui équivaut à dire que ce n’était pas plus qu’une simple rencontre. Une tentative que les Palestiniens espéraient fructueuse, mais que les Israéliens ont d’emblée rejetée, étant hostiles à toute ingérence autre qu’américaine sur ce dossier.

Une trentaine de ministres et représentants de pays arabes et occidentaux, de l’Onu et de l’Union européenne ont participé à la réunion parisienne. Dans leur communiqué final, les participants ont réitéré que le statu quo n’était pas tenable et se sont dit alarmés par la situation sur le terrain, en référence à la poursuite des actes de violence dans les territoires occupés et des activités de colonisation. Ils ont cité les textes internationaux de référence, particulièrement les résolutions de l’Onu, comme bases de négociations. « La perspective de deux Etats est en grave danger, nous approchons d’un point de non-retour au-delà duquel elle ne sera plus possible. Il faut agir en urgence pour préserver cette solution, la réanimer avant qu’il ne soit trop tard », a mis en garde le chef de la diplomatie française Jean-Marc Ayrault.

Partageant le même avis, les participants arabes ont exprimé leur volonté de lancer la roue du processus de paix dont les dernières négociations directes remontent au printemps 2014. « L’initiative arabe de 2002 envisageant la normalisation des relations avec Israël et un retrait israélien des territoires palestiniens reste la meilleure base pour aboutir à la paix », a estimé le chef de la Diplomatie saoudienne, Adel Al-Jubeir.

Des déclarations, sans plus. L’impuissance de la communauté internationale n’a pas pu outrepasser l’intransigeance des Israéliens. Ce qui fait que les annonces concrètes ont été très limitées, Ayrault ayant proposé de lancer un travail sur les incitations possibles en matière économique, de coopération et de sécurité régionale, pour convaincre les parties de revenir à la table des pourparlers. Les Européens tentent ainsi d’ouvrir des voies de dialogue loin des voies traditionnelles de la diplomatie. « En économie, l’Europe, premier partenaire commercial d’Israël et premier bailleur de fonds de l’Autorité palestinienne, a un rôle crucial à jouer », a souligné la chef de la Diplomatie européenne Federica Mogherini.

Les groupes de travail devraient se réunir avant la fin du mois, mais cette fois, ils essayeront de convaincre le premier ministre israélien, Benyamin Netanyahu, et le président de l’Autorité palestinienne, Mahmoud Abbas, de travailler étroitement avec eux. En première réaction à cette réunion, l’Organisation de Libération de la Palestine (OLP) s’est empressée de saluer cette initiative, qualifiant la réunion d’étape très importante. Mais, le ministre palestinien des Affaires étrangères, Riyad Al-Malki, a toutefois affirmé que les Palestiniens attendaient un meilleur communiqué final, accusant des pays importants — qu’il n’a pas nommés — d’avoir tout fait pour faire disparaître certains points contraignants. « De nombreux points fondamentaux n’ont pas été inclus alors que nous pensions qu’ils le seraient. Nous attendons maintenant plus d’informations des Affaires étrangères françaises », a affirmé Malki à l’AFP.

Un avis partagé par d’autres responsables palestiniens. Saëb Erakat, numéro deux de l’Organisation, a insisté à ce que « le message qu’elle envoie est clair : si l’on permet à Israël de poursuivre ses politiques de colonisation et d’apartheid en Palestine occupée, l’avenir sera à plus d’extrémisme et de sang versé plutôt qu’à la coexistence et à la paix », a déploré M. Erakat, en ajoutant que « nous avons mené des négociations bilatérales avec Israël, la puissance occupante depuis plus de 25 ans sous le parrainage des seuls Américains, et n’ont abouti à rien, et les Israéliens continuent de violer tous les accords que nous avons signés », soulignant que durant cette période, le nombre de colons israéliens dans les territoires occupés avait triplé. « Ce qu’il faut, c’est un véritable mécanisme qui mette un terme définitif à l’occupation israélienne et résolve toutes les questions relatives au statut final, ainsi qu’un calendrier clair et limité », a expliqué Erakat, faisant référence aux épineuses questions des réfugiés et du statut de Jérusalem.

Quant à Israël, elle a qualifié l’initiative française d’occasion manquée. « La réunion de Paris restera dans l’histoire comme n’ayant d’autre effet que de durcir les positions palestiniennes et d’éloigner les perspectives de paix », a affirmé le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Emmanuel Nahshon. Avant même sa tenue, la réunion de Paris avait été rejetée par Israël. « Elle échouera », avait prédit le directeur du ministère israélien des Affaires étrangères, Dore Gold, en ajoutant que la seule manière d’obtenir un accord régional stable qui « nous permettra de créer une paix véritable au Moyen-Orient est que les parties s’entendent entre elles », a déclaré Gold dont le pays rejette toute approche multilatérale.

Internationaliser le règlement

Sur ce point, en revanche, les Palestiniens soutiennent pleinement la démarche d’internationaliser le règlement du conflit. « Une intervention internationale est nécessaire pour sauver la solution à deux Etats », a estimé l’ambassadeur palestinien à Paris, Salman Al-Herfi. Très réservé sur ce principe d’internationaliser le règlement du conflit, le secrétaire d’Etat, John Kerry, a affirmé que « nous ne pouvons pas imposer de solution de l’extérieur, nous devons avoir des négociations directes et je vais continuer à encourager cela », vantant ses contacts réguliers avec Netanyahu et Abbas. Cette déclaration a étonné les analystes, car Kerry est souvent considéré comme le médiateur malheureux de négociations israélo-palestiniennes en 2013 et 2014, il n’a pas pu mener de négociations directes entre eux. A cet égard, les Etats-Unis, acteurs historiques et incontournables dans le dossier, ont décidé de s’impliquer dans la démarche française et la volonté française de relancer la roue de négociations.

En fait, en organisant cette réunion et en lançant son initiative, la France avait plusieurs objectifs. « Tout d’abord, Paris espère jouer un rôle important et plus efficace au Moyen-Orient, d’autant plus que les relations entre les pays arabes et les Américains sont actuellement tendues. Le meilleur moyen de concrétiser cela est de relancer les négociations de paix, car le conflit israélo-palestinien est une crise chronique. En plus, Paris craint une augmentation de la menace terroriste et estime qu’il y a un certain lien entre les menaces terroristes et le blocage du processus de paix. Mais Paris a mal choisi le timing pour essayer de relancer le processus de paix, car le gouvernement de l’Etat hébreu est l’un des plus à droite de l’histoire du pays, tandis que les Palestiniens sont plus divisés et affaiblis que jamais », explique Dr Ahmad Youssef, professeur à la faculté de l’économie et de sciences politiques à l’Université du Caire.

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