L’Iraq est en proie à un mouvement de contestation de la minorité sunnite qui ne s’arrête pas depuis trois semaines. Des manifestations ont lieu tous les jours. Vendredi, les protestataires ont même bloqué l’autoroute qui relie l’Iraq à la Syrie et à la Jordanie. Des rassemblements ont notamment eu lieu à Bagdad, Samarra, Mossoul, dans le nord de l’Iraq, ainsi qu’à Anbar, la province occidentale
du pays où les sunnites sont majoritaires. « L’injustice, ça suffit » et «peuple exige le respect de ses droits » sont les slogans levés par le mouvement de contestation. Dans le centre de Samarra, au nord de Bagdad, des tribus sunnites ont installé un campement en signe de protestation. Ce mouvement est né quelques jours après l’arrestation le 20 décembre de gardes du corps du ministre sunnite des Finances, Rifaa al-Issawi. Depuis, les manifestations et les actions coup de poing se sont succédé pour dénoncer l’« injustice » et la « marginalisation » dont les sunnites disent souffrir.
Faire plier le chef du gouvernement chiite, Nouri Al-Maliki, est l’objectif des sunnites. Ils l’accusent de stigmatiser leur communauté. Ils demandent la libération de prisonniers et l’abrogation de lois antiterroristes utilisées, selon eux, à leur encontre par le gouvernement de M. Maliki, dominé par les chiites. « Le gouvernement a fait des promesses par le passé, il a fait des promesses hier. Mais qu’il comprenne bien que nous continuerons à manifester jusqu’à ce que nos droits soient respectés », a lancé le célèbre cheikh sunnite Mohammed Al-Hamdoune dans son sermon.
Face à ces contestations et comme signe d’apaisement, le vice-premier ministre, Hussein Chahristani, a assuré cette semaine que 400 prisonniers avaient été libérés depuis la semaine dernière. En outre, l’Alliance nationale chiite du premier ministre a rencontré mercredi dernier au Parlement l’alliance laïque Irakia, qui regroupe de nombreux sunnites, pour tenter de résoudre la crise en répondant aux revendications des manifestants. « Nous devons reconnaître que la tâche sera difficile avant de pouvoir conclure un accord », a déclaré Ali al-Shallah, député de l’Alliance nationale chiite. « Tous les blocs sont d’accord pour donner du temps au gouvernement afin qu’il examine les demandes », a-t-il ajouté. Parallèlement aux protestations, une série d’attentats a visé de nouveau les chiites et a fait des morts et des dizaines de blessés, selon un bilan communiqué par les autorités. Les attentats n’ont pas été revendiqués, mais les groupes extrémistes sunnites visent régulièrement les chiites, les forces de sécurité et les responsables politiques qui leur sont hostiles. L’attaque la plus sanglante s’est produite à Doujaïl, à 60 km au nord de Bagdad, où une voiture piégée a explosé devant une mosquée chiite. Onze personnes ont péri, 72 ont été blessées, selon le chef des services médicaux de la province de Salaheddine, Raad Al-Joubouri.
Dans les environs de Hilla, une ville à majorité chiite située au sud de Bagdad, sept personnes sont mortes dans l’explosion d’une voiture piégée. D’autres attaques ont ensanglanté la capitale iraqienne, ainsi que Hawija, la ville sainte chiite de Kerbala, Touz Khourmatou et Mossoul.
En fait, ce conflit entre les sunnites et Maliki intervient à trois mois d’importantes élections provinciales, qui constitueront un test pour le chef du gouvernement et ses opposants, avant des élections nationales l’année prochaine. En outre et selon des analystes, l’air tendu entre toutes les parties et la détérioration du système sécuritaire font craindre de nouvelles tensions intercommunautaires, dans un pays où la réconciliation nationale peine toujours à être amorcée .
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