Les dernières attaques terroristes en France ont des répercussions aussi bien sur le cours des événements sur le terrain, que sur les négociations de Vienne sur la Syrie. Sur le terrain, la France a riposté dimanche en bombardant massivement Raqa, le fief syrien du groupe djihadiste Etat Islamique (EI) et en détruisant un poste de commandement et un camp d’entraînement de Daech, selon le gouvernement.
Une riposte prévisible, selon les analystes. « Même s’ils ne sont pas de la même ampleur, ces attentats ressemblent à ceux du 11 septembre. Et ils auront sans doute des conséquences similaires : actes de vengeance contre la Syrie et l’Iraq comme ce fut le cas contre l’Afghanistan », explique ainsi Dr Mohamad Gomaa, analyste au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram au Caire.
Ces frappes françaises sont intervenues alors qu’à Vienne se tenait une nouvelle réunion internationale sur la Syrie. Une réunion au cours de laquelle il a été question de mettre en place une feuille de route pour une transition politique en Syrie avec des élections d’ici à 18 mois. Un pas en avant, certes, mais qui omet toujours le point d’achoppement le plus important : l’avenir du président syrien, Bachar Al-Assad, Moscou et Téhéran refusant les exigences des pays arabes et européens d’un départ immédiat de leur allié. Pourtant, selon Dr Rabha Allam, experte au CEPS, « la Russie et l’Iran pourraient lâcher Assad, mais à une condition : trouver un autre allié au sein des Alaouites qui protégera leurs intérêts et gardera de bonnes relations avec eux ».
Quelle opposition ?
L’analyste estime aussi que, outre le sort de Bachar Al-Assad, il existe un autre problème de taille, celui de l’opposition : « Quand bien même on parviendrait à un accord sur une transition, on se heurtera à la question de savoir qui représentera l’opposition dans un éventuel gouvernement, qui sera l’objet d’un consensus alors que l’opposition n’est ni organisée ni unifiée ».
D’ailleurs, les réactions de l’opposition à la déclaration de Vienne diffèrent. La Coalition de l’opposition syrienne, principale formation d’opposants en exil, n’a pas réagi officiellement, mais un de ses membres, Samir Nashar, l’a qualifiée de « décevante et irréaliste », notamment en raison de l’impossibilité de tenir des élections au vu de la situation actuelle, avec « la moitié de la population déplacée, un pays ravagé et des infrastructures détruites ». Un autre membre de la même coalition, Anas Al-Abda, s’est montré plus optimiste, considérant le cessez-le-feu comme « une chose positive », mais rappelant que l’accord ne règle pas « le point principal de discorde qui reste le sort de Bachar Al-Assad ».
En effet, le Groupe international de soutien à la Syrie, comprenant une vingtaine de pays et d'organisations internationales, s’est mis d’accord sur la nécessité de mettre en place « un cessez-le-feu dans quelques semaines et réunir le gouvernement syrien et des représentants de l’opposition pour des négociations formelles, sous les auspices de l’Onu, dès que possible, avec l’objectif du 1er janvier » prochain, selon un communiqué publié dans la capitale autrichienne. Il est aussi question d’établir, dans les 6 mois, « un calendrier pour la formation d’un gouvernement de transition et de rédiger une nouvelle Constitution », « Des élections libres et équitables auraient lieu conformément à cette nouvelle Constitution d’ici 18 mois », ajoute le communiqué.
Là aussi, ce sont des « mi-résultats ». « Il est prévisible que certains groupes terroristes comme le Front Al-Nosra ne respectent pas un éventuel cessez-le-feu. L’arrêt des combats nécessite des efforts plus soutenus », explique Dr Rabha Allam. Ceci nous ramène à une autre question importante : La Russie et l’Iran s’opposent aux Etats-Unis et à leurs alliés sur les groupes syriens devant être qualifiés de « terroristes » et ceux pouvant être considérés « opposition ». Pour ce, la Jordanie a été chargée de « coordonner une liste commune de groupes terroristes » sous l’égide du Conseil.
Reste une question de taille : la position du régime. « La Syrie a toujours cru que le processus politique était nécessaire pour parvenir à une solution. Le processus politique devrait respecter la souveraineté nationale et le choix du peuple de désigner ses dirigeants et son président », a déclaré le ministre syrien de l’Information, Omrane Zohbi. Le ton de Damas n’a donc pas changé. De quoi rendre sceptique sur les suites de la déclaration de Vienne.
Lien court: