C’est la première fois que les deux parlements libyens rivaux tiennent des pourparlers directs. La rencontre a eu lieu dimanche dernier à Skhirat, au Maroc, sous l’égide de l’Onu. Leur objectif est de parvenir à un accord sur un gouvernement d’union nationale, désigner un premier ministre et préciser des dates pour des élections législatives et présidentielle. Pour réaliser ces objectifs, des acteurs de la société civile en plus des responsables des deux parlements rivaux ont discuté la quatrième proposition d’accord, présentée par l’émissaire des Nations-Unies en Libye, Bernardino Leon.
Depuis le début des pourparlers au Maroc à la mi-mars, M. Leon faisait des navettes entre les deux groupes, et la tenue des négociations directes est un succès pour lui. Et dans une conférence de presse, les porte-parole des deux camps ont annoncé leur entente sur de nombreux points d’achoppement. « Nous nous sommes accordés sur la majorité des dossiers », a indiqué Abou Bakr Baïra, député au parlement de Tobrouk, reconnu par la communauté internationale. Dans le même sens, Mohamad Saleh Al-Makhzoum, membre au Congrès Général National (CGN), le parlement installé dans la capitale Tripoli, sous le contrôle de Fajr Libya, une coalition de milices, a ajouté : « Après la signature du texte d’accord, chaque partie soumettra le projet à son parlement afin d’obtenir un accord final ».
Selon les analystes, ces longues tractations sont dues à deux raisons. « Tout d’abord, les deux camps s’accrochent bec et ongles à leurs acquis et refusent de présenter des concessions. Chacun veut donc en tirer le maximun. Deuxième raison, à la suite de chaque séance, chaque camp veut discuter les résultats avec son allié, soit son partenaire libyen, parmi les tribus et les chefs des régions, soit son partenaire international », explique Sameh Rachad, analyste au Centre des études arabes et africaines au Caire.
Les discussions traînent donc en longueur. Et ce, malgré les pressions de la communauté internationale. « L’Occident veut rétablir la paix pour former un état stable de peur de l’extension de l’Etat islamique dans ce vaste pays qui souffre d’une absence d’armée organisée, de police forte et qui a un nombre modeste d'habitants », explique Sameh Rachad.
Les parlements rivaux ont tous deux adopté, au cours des 15 derniers jours, une version amendée de ce document onusien. « Nous nous approchons d’une solution. Le fait que tous les participants ont accepté le quatrième document soumis comme base d’une solution finale est très encourageant », a annoncé Bernardino Leon. Le projet de l’Onu prévoit la mise en place pendant un an d’un gouvernement d’union nationale avec un conseil des ministres, dirigé à Tripoli par un premier ministre et deux vice-premiers ministres. La Chambre des représentants, le parlement élu en juin 2014 et réfugié aujourd’hui à Tobrouk, dans l’est du pays, serait le seul corps législatif. Un Conseil d’Etat, corps consultatif de 120 membres, comprendrait 90 membres de l’actuel parlement de Tripoli.
Près de quatre ans après la chute de Muammar Kadhafi en octobre 2011, la Libye compte deux gouvernements et deux parlements rivaux qui se disputent le pouvoir, les uns à Tripoli, les autres à Tobrouk (parlement) et Beïda (gouvernement). L’un des amendements qui viennent d’être adoptés en limite les pouvoirs et renforce l’équilibre entre les deux parties. Les forces rivales s’opposent quotidiennement dans plusieurs localités du pays, faisant des centaines de morts depuis juillet 2014.
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