Les frères musulmans ont perdu leur domination sur le syndicat des Pharmaciens, leur dernier bastion au sein des syndicats professionnels. Les résultats finaux des élections de renouvellement partiel du syndicat général des Pharmaciens ont été annoncés, vendredi, et ont donné vainqueur le courant de l’indépendance, en l’absence des Frères musulmans. Les élections, qui s’étaient déroulées le 6 mars, ont mis fin à 17 ans de règne des Frères musulmans au sein du syndicat des Pharmaciens. Le courant indépendant a remporté 22 sièges sur les 24 du conseil général et tous les sièges des branches locales dans les provinces. Mohieddine Ebeid, du courant indépendant, est devenu le nouveau chef du syndicat. Il a gagné contre son rival, Samir Al-Morsi, soutenu par les Frères musulmans et le parti salafiste d’
Al-Nour. Le nouveau chef des pharmaciens a assuré qu’il ne permettrait plus la politique au sein du syndicat. «
Le syndicat est maintenant libre des Frères musulmans. Il ne fera plus de politique », affirme Ebeid. Le syndicat des Pharmaciens avait ouvert la porte aux candidatures pour les élections, fin décembre et appelé ses membres à participer aux élections. Le scrutin s’est déroulé sous contrôle judiciaire complet. 50 candidats se disputaient les 12 sièges du conseil du syndicat général. Et six candidats étaient en lice pour le poste de bâtonnier, dont Samir Morsi soutenu par le parti d’
Al-Nour. Des représentants de plusieurs partis politiques sont venus assister au scrutin pour soutenir le courant indépendant. Les indépendants estiment que la domination des Frères sur le syndicat a conduit à la détérioration des services. Un certain nombre de pharmaciens exigeaient ainsi de juger l’ancien chef du syndicat, Mohamad Abdel-Gawad, de la confrérie des Frères musulmans. «
Il a pris des décisions politisées qui se sont répercutées négativement sur la profession », souligne Salah Ibrahim, un jeune pharmacien. Mahmoud Adly, un autre pharmacien, est satisfait des résultats des élections. «
Les pharmaciens indépendants ont beaucoup souffert sous le contrôle des Frères musulmans », dit-il. Et d’ajouter que la priorité pour les pharmaciens est la question de la sécurité. «
Nous voulons une autorisation pour porter des armes, car il n’y a pas de sécurité dans les pharmacies. Notre collègue Sayed Al-Darawi a été enlevé de sa pharmacie et personne ne sait où il est », explique Mahmoud Adli.
Les Frères absents de la scène
Les Frères musulmans avaient infiltré les unions étudiantes et les syndicats professionnels durant les années 1970-1980. Leur succès s’expliquait partiellement par le déclin, au cours de cette période, du courant nassérien et de gauche. Le courant islamiste a disputé les élections de l’ordre des Médecins, pour la première fois en 1984, avant d’investir les ordres des Ingénieurs et des Pharmaciens. Au début des années 1990, les Frères ont dominé l’ensemble des syndicats professionnels. L’Etat a, alors, cherché à les en exclure. En 1993, la loi 100 relative aux syndicats professionnels est promulguée et vise à paralyser l’activité des syndicats dominés par les Frères. Plusieurs syndicats sont placés sous séquestre. Après la révolution du 30 juin, les Frères ont perdu les syndicats des Médecins, des Journalistes, des Ingénieurs, et en fin des Pharmaciens.
L’absence des Frères des élections reflète, selon le politologue Yousri Al-Azabawi, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, le recul de popularité de la confrérie après la révolution du 30 juin. Mais il souligne aussi que les Frères eux-mêmes, n’ont pas accordé un intérêt au scrutin. « Ce manque d’intérêt est normal étant donné que les Frères sont pris par d’autres choses plus importantes. Ils sont en lutte avec le gouvernement, qui utilise clairement la politique du bâton contre eux », explique-t-il. Et d’ajouter : « Les membres de la confrérie sont dispersés à l’étranger ».
En fait, cette élection a vu l’absence de la coalition des pharmaciens d’Egypte des Frères musulmans qui a remporté la majorité des sièges en 2011. Selon Al-Azabawi, les Frères se croient capables de regagner leur popularité dans la rue facilement, en raison de la propagation de la pauvreté et de l’ignorance. « L’Etat doit commencer un plan de développement pour satisfaire aux besoins du peuple et pour fermer la porte aux Frères musulmans d’exploiter les pauvres visant à contrôler la rue de nouveau », conclut-il.
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