L'opération militaire en Sinaï a débouché la liquidation d'un nombre des éléments terroristes et l'arrestation d'autres.
Les cibles des attentats terroristes se diversifient avec l’attaque d’un navire militaire en Méditerranée, la semaine dernière. Une escalade qui intervient, des jours après l’allégeance d’Ansar Beit Al-Maqdes, le groupe terroriste le plus actif dans le Sinaï, à l’Etat islamique (voir enc). Beit Al-Maqdes se fait désormais nommer « Wilayat Sina ».
Jeudi dernier, deux policiers et trois soldats ont aussi été tués par des hommes armés dans deux attaques différentes dans le nord de la péninsule du Sinaï, où l’armée mène une campagne contre les fiefs terroristes. Lors de la première attaque, des inconnus ont exécuté deux policiers après leur avoir demandé de descendre d’une voiture. Dans la seconde, trois soldats qui étaient dans un taxi collectif ont été tués par des hommes armés. Au Caire, une bombe a explosé, jeudi matin, dans un wagon de métro, provoquant une bousculade qui a fait 16 blessés. Mercredi, une autre explosion a eu lieu dans le train de Mansoura faisant une dizaine de blessés.
Mais l’attaque du navire maritime est la plus meurtrière. C’est la première fois que les forces maritimes soient visées par des attaques terroristes. Mercredi 12 novembre, un navire de l’armée à Damiette, dans le Delta, était attaqué par des inconnus. Cinq militaires étaient blessés et transférés à un hôpital militaire, alors que 8 autres sont portés disparus. Selon le communiqué présenté par le colonel Mohamad Samir, porte-parole de l’armée, le navire militaire a été attaqué, mercredi, par quatre bateaux non encore identifiés en Méditerranée. L’attaque a eu lieu à 70 kilomètres au nord-est du Delta du Nil, face au port de Damiette. La vedette de la marine qui se livrait à une patrouille de routine a été approchée par plusieurs bateaux de pêche qui ont ouvert le feu. L’équipage de la vedette a résisté, ce qui a permis aux hélicoptères de la base navale de Port-Saïd d’intervenir et de couler les bateaux des agresseurs. Le porte-parole a confirmé que les quatre bateaux utilisés étaient détruits et 32 personnes ont été arrêtées.
Tournant périlleux
Des zones d’ombre subsistent toujours sur les circonstances de cette attaque maritime. Les informations sont rares sur la nature de cette opération ainsi que sur ses auteurs. Des experts estiment qu’il s’agit d’un tournant périlleux dans les opérations terroristes, qui visent l’armée et la police depuis la destitution du président islamiste Mohamad Morsi en 2013. L’expert en sécurité Sameh Seif Al-Yazal n’exclut pas le fait que les attaquants puissent avoir une nationalité étrangère, visant par là la Turquie et le Hamas palestinien. « Il s’agit d’une attaque maritime d’envergure qui ne peut être perpétrée qu’en coopération avec des services de renseignements étrangers. Le but de l’opération aurait été de capturer la vedette et son équipage. Les enquêteurs cherchent à savoir si les attaquants ont reçu un soutien logistique étranger », a estimé Al-Yazal, dans des déclarations à la chaîne privée CBC. Pour sa part, l’expert militaire, Abdel-Moneim Al-Saïd, pense que les agresseurs sont partis du port de Damiette. C’est pour cette raison qu’ils n’ont pas été soupçonnés par les gardes-côtes au début. « Le scénario le plus probable est que les attaquants sont des Egyptiens affiliés à l’un des groupes terroristes qui activent dans le Sinaï », estime Al-Saïd. Il exclut le fait que ces bateaux de pêche proviennent d’une côte étrangère. « Il n’est pas possible que ces petits bateaux de pêche soient arrivés ni de la côte turque, vu la longue distance qui sépare les deux pays, ni de la côte de Gaza, soumise à une surveillance des forces israéliennes. Il faudra prendre d’autres mesures draconiennes pour assurer le contrôle des frontières maritimes devenues une nouvelle cible des attaques terroristes », souligne Al-Saïd. 48 heures après l’attaque, des hommes encagoulés, proclamant leur appartenance à l’Etat islamique, ont diffusé une vidéo sur Internet, revendiquant leur responsabilité de cette attaque maritime. La véracité de cette vidéo n’a pas encore été confirmée.
Contexte tendu
Cette attaque maritime intervient dans un contexte tendu, où l’Egypte est le théâtre d’attentats visant les forces de sécurité. Les terroristes ont concentré leurs attaques contre la police et l’armée dans le nord du Sinaï. Mais des observateurs redoutent l’expansion du terrain d’opérations terroristes, à cause de la vaste campagne militaire menée dans le Sinaï, suite au récent attentat meurtrier de Rafah au nord du Sinaï, qui a fait 30 morts parmi les militaires. A l’issue de cet attentat, l’armée a décidé de créer une zone tampon à Rafah. Ces opérations militaires en cours ont débouché sur la liquidation de dizaines d’éléments terroristes et l’arrestation d’autres personnes, dont certains appartiennent, selon les communiqués de l’armée, au groupe d’Ansar Beit Al-Maqdes. Toujours selon les forces armées, 77 fiefs terroristes ont été détruits au nord-Sinaï au cours des deux dernières semaines. Selon Ahmad Ban, spécialiste des mouvements islamistes, ces coups durs ont poussé ces groupes terroristes à multiplier leurs attaques en réponse à cette guerre anti-terroriste menée par l’armée dans le Sinaï. « L’expansion des opérations terroristes était prévue après l’intensification des coups militaires contre les groupes terroristes dans le Sinaï. Assiégé dans le Sinaï, le groupe Ansar Beit Al-Maqdes tente de prouver sa résistance à cette guerre. Sa tactique se base, actuellement, sur l’élargissement des terrains d’opérations. Il vise à épuiser les forces militaires, en ouvrant de nouveaux fronts de confrontation, notamment aux frontières. Cette récente attaque maritime oblige les autorités sécuritaires à combattre, dorénavant, sur les frontières terrestres et maritimes », indique Ban. Il met en garde contre de probables attentats terroristes menés à partir des frontières libyennes, où le déploiement sécuritaire est médiocre. « La mission de l’armée se complique à cause de l’élargissement des fronts de combat. Les terroristes profiteront de la concentration des opérations militaires dans le Sinaï pour asséner de nouveaux coups à l’armée, dans d’autres endroits », prévient Ban. Il ajoute que cette attaque constitue une évolution dans leurs opérations dévoilant la capacité accrue des groupes terroristes, qui optent pour des frappes plus sophistiquées et plus ciblées. Cela exige une révision des stratégies sécuritaires.
Le groupe Ansar Beit Al-Maqdes a revendiqué vendredi, dans une vidéo, l’attentat suicide ayant provoqué la mort de 30 soldats dans le Sinaï le 24 octobre dernier. Sur la vidéo, un kamikaze, dont le visage a été flouté, promet de nouvelles attaques contre les forces de l’ordre. « Le Sinaï va se transformer en une voiture piégée. Il sera une bombe qui détruira vos maisons. Nous allons vous décapiter, couper vos mains et vos jambes », lance la personne sur la vidéo. Une guerre morale à laquelle les forces armées n’ont pas tardé à y répliquer. Sur sa page Facebook, le porte-parole de l’armée a publié une vidéo intitulée « Le message de l’armée égyptienne à partir du Sinaï », montrant des extraits d’opérations militaires menées dans le Sinaï contre les fiefs terroristes. Des soldats affirment, dans cette vidéo, que l’armée égyptienne dispose de combattants habiles et courageux à la hauteur de ceux qui ont remporté la guerre de 1973 .
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