Kobané ou Aïn Al-Arab, son nom en arabe, résiste aux assauts de Daech. Ce qui attire l’attention dans ces batailles de Kobané qui ont pris le devant de la scène mondiale c’est une femme qui conduit les troupes kurdes dans leur combat contre l’organisation Daech. Elle est connue sous le nom de Nalin Afrin, et originaire de la ville kurde de Afrin située au nord d’Alep. Les quelques rares informations sur Nalin est qu’elle a déjà combattu contre le Front Al-Nosra et Daech sur plusieurs fronts. Nalin est un nom kurde qui veut dire la triste, selon Nidal Hanan, un journaliste kurde syrien », rapporte le journal Al-Quds Al-Arabi, basé à Londres.
Les femmes kurdes au combat ont pris le devant de la scène dans ces batailles contre Daech. Mais apparemment, beaucoup de femmes ont pris les armes pour se défendre et défendre leurs familles sans être pour autant aussi médiatisées que « les belles kurdes qui affrontent Daech », comme souvent les qualifie la presse, dont le site égyptien Al-Masriyoune de tendance islamiste.
Le site de la chaîne de télévision iraqienne Al-Sumarya rapporte dans un article, publié la première semaine d’octobre, que les femmes d’Al-Dalouyia dans le sud de Tikrit ont, elles aussi, pris les armes face à Daech. « Oum Akram (50 ans) a pris les armes face à Daech après avoir perdu son mari et ses trois fils dans les affrontements qu’a connus la ville. Elle raconte qu’elle soutient le moral des hommes pour qu’ils continuent à combattre. Elle ajoute qu’il ne lui reste qu’un seul fils encore en vie et il combat avec les membres de la tribu Al-Jabbour aux premières lignes et qu’elle n’hésitera pas elle-même à tuer les membres de Daech ». Le site d’Al-Sumarya ajoute qu'Oum Akram n’est pas la seule : « La plupart des femmes de la tribu Al-Jabbour ont fait de même ».
Cette activité militaire féminine n’est pas pour plaire à Daech qui a exécuté « la semaine dernière neuf femmes à Mossoul par balles, dont une activiste et ancienne députée, dont on a retrouvé le corps dans un puits. Les autres sont deux médecins et des femmes au foyer sans que l’organisation terroriste explique les raisons de leur exécution », rapporte le journal Al-Hayat, basé à Londres.
Dans un article publié dans le journal libanais Al-Safir, Sahar Mandour, journaliste et romancière égypto-libanaise, écrit un article où elle jette un regard sur cet engouement de la presse et des médias arabes pour ces images de combattantes kurdes et l’oppose au discours officiel et officieux ambiant à l’égard des femmes. « La présence féminine s’est accrue soudainement dans l’espace arabe. Nous vaquions à nos combats sociaux, parmi nous des activistes, des désabusées ou des indifférentes, pour nos droits, à commencer par des évidences, comme celle de pouvoir marcher en sécurité dans la rue. Puis suite à l’avènement de cet instant, il y a eu un appel aux femmes dans la révolution comme partenaires ». Elle fait référence ici notamment à la révolution égyptienne du 25 janvier, où les femmes ont vivement été sollicitées et adulées durant les 18 jours. Alors les femmes révoltées, travailleuses et activistes, ont arraché tous leurs droits par les mains. Or, cette adulation est venue sous la forme « respecte-la comme tu aimerais qu’on respecte ta soeur » et non pas en tant que partenaire égal en humanité et en droits sociaux. La question ne tournait pas autour de la propriété de cet être, mais autour de la manière de gérer cette propriété. Et puis il y a eu le conflit et les batailles, et la présence des femmes s’est accrue pour entrer clairement et sans ambages dans le carré de la propriété : un objet de mariage, le mariage du combat, le viol de guerre. L’auteure ajoute qu’avec ces nouvelles images de Kurdes combattantes, les médias et le discours ambiant, pour qui les femmes sont des êtres à protéger comme une mère ou une soeur, se sont pris d’engouement. « Mais cet engouement porte en lui l’exception. Cette exception viendrait-elle du fait que ce sont des Kurdes et pas des Arabes et donc provenant d’une autre culture ? Ou alors viendrait-elle du fait de la dangerosité de l’instant qui a exigé leur sortie des cuisines pour porter le fusil, ce qui implique implicitement leur retour à ces cuisines une fois le danger écarté ? », s’interroge-t-elle.
Dans Al-Hayat, Abir Al-Foran présente, elle, une autre image. « Les femmes, en recevant leur salaire, regardent avec amertume la case de prime de transport qui ne suffit nullement à leurs frais de transport. Cette prime de 700 à 900 rials ne suffit même pas à payer la moitié du salaire d’un chauffeur. Je dois avouer que la femme est une handicapée avec préméditation, car on l’empêche de circuler librement en conduisant sa voiture ». L’auteure ajoute : « On l’oblige à jouer le rôle de la reine tous les matins. Reine, malgré elle. Titre octroyé par ceux qui refusent de la voir conduire et qu’elle paye de sa poche ».
Retour sur le front Daech où presse écrite et sites d’information ont rapporté que plusieurs Ukrainiennes ont rejoint les troupes de l’organisation terroriste. « Un responsable local dans le gouvernorat de Ninive (Iraq) a affirmé que leur rôle est de porter des soins médicaux et sont également chargées d’assassiner les opposants à l’organisation », lit-on sur le site d’information égyptien Akhbareknet. Sur le Web, l’information est souvent rapportée de la sorte : « De belles Ukrainiennes » ou des « Ukrainiennes sexy » ont rejoint Daech. Finalement, des belles Kurdes aux belles Ukrainiennes, Daech, avec ses exactions et ses horreurs, met à nu tous les paradoxes, les contradictions et les non-dits concernant la femme .
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