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Loi sur les manifestations : La mobilisation continue

May Atta, Mardi, 16 septembre 2014

Tandis que la grève de la faim lancée la semaine dernière par des activistes réclamant la suppression de la loi sur les manifestations gagne du terrain, un recours contre la loi a été présenté cette semaine devant la Cour constitutionnelle.

Loi sur les manifestations :
Après trois mois de détention, Alaa Abdel-Fattah, ici avec sa soeur, est enfin libre. (Photo: AP)

La loi sur les manifestations, promulguée en novembre dernier et contestée par la société civile, continue à faire des remous. Tandis que le mouvement de grève de la faim, lancé la semaine dernière par des activistes et des militants des droits de l’homme, prend de l’ampleur, un recours a été présenté samedi devant la Cour constitutionnelle contre le texte par trois avocats : Kahled Ali, ancien candidat à la présidence, Mohamad Adel et Tareq Al-Awadi. La loi, promulguée le 24 novembre 2013 par l’ancien président intérimaire Adly Mansour, oblige les manifestants à informer les autorités au moins 3 jours à l’avance de la tenue d’une manifestation et donne au ministère de l’Intérieur le droit d’interdire cette manifestation s’il juge qu’elle représente une menace pour la sécurité. Plusieurs activistes ont été emprisonnés en vertu de cette loi depuis le mois de janvier, dont Alaa Abdel-Fattah et sa soeur Sanaa, Ahmad Maher, fondateur du mouvement du 6 Avril, l’activiste Ahmad Douma et d’autres. « Nous avons contesté les clauses 8 et 10 de la loi qui rendent obligatoire la permission du ministère de l’Intérieur pour organiser une manifestation. Ces deux clauses sont en contradiction avec 13 articles de la Constitution de 2014, dont les articles 1, 4, 5, 15, 53, 65, 73 et 85 », note Mohamad Adel. L’article 73 de la Constitution donne aux citoyens le droit d’organiser des réunions publiques, des marches, et des manifestations pacifiques « tant qu’ils ne portent pas d’armes ». Le droit de réunion privée est garanti également par la Constitution, et l’exercice de ce droit ne nécessite pas de préavis. Les forces de sécurité n’ont pas le droit d’assister à de tels rassemblements. Ils n’ont pas non plus le droit de les surveiller ou de les espionner.

Les avocats expliquent dans leur recours que malgré l’évolution positive de la Constitution de 2014 par rapport aux Constitutions précédentes, des lois anciennes, comme la loi 114 de 1923, donnent plus de libertés que la loi actuelle.

« L’article 10 de la loi donne au ministère de l’Intérieur la liberté de refuser les manifestations sans raisons déterminées. Or, le ministère a le droit de refuser seulement lorsqu’il y a menace pour la sécurité. Nous demandons à ce que les gens aient le droit de manifester, et si le ministère de l’Intérieur veut refuser, il doit, lui, recourir à la justice, et il appartient à celle-ci de trancher », explique Tareq Al-Awadi.

Outre le recours devant la Cour constitutionnelle, des activistes ont entamé dimanche 7 septembre une campagne de grève de la faim en solidarité avec les prisonniers d’opinion dans le pays. La campagne, baptisée « Guibna akherna » (nous en avons assez !) appelle à la suppression de la loi sur les manifestations et exige la libération des personnes détenues en vertu de cette loi, comme le blogueur et activiste Alaa Abdel-Fattah, condamné à 15 ans de prison en juin dernier pour avoir violé la loi, et qui a entamé, le 19 août, une grève de la faim pour protester contre sa détention. Sa soeur Sanaa Seif est également détenue pour avoir pris part illégalement à des manifestations. Les grévistes cantonnés au siège du Conseil national des droits de l’homme et au siège du parti Pain et liberté ont vu leur nombre augmenter. « Ils sont 150 à présent. Nous avons décidé de continuer cette campagne jusqu’à ce que la loi soit modifiée et que les activistes soient libérés », précise Emad Hamdi, membre du Courant populaire et l’un des responsables de la campagne. Et d’ajouter : « Des journalistes ont rejoint notre mouvement et observent eux aussi une grève de la fin au syndicat. Il y a aussi 7 partis politiques, dont le Courant politique et le parti d’Al-Dostour ».

Une modification de la loi est-elle possible ?

Nasser Amin, membre du Conseil national des droits de l’homme, a évoqué la semaine dernière une telle possibilité. « Nous demandons la modification de cette loi depuis sa promulgation. Nous avons demandé au gouvernement de Hazem Al-Beblawy, puis à celui de Mahlab, et dernièrement lorsque le président Abdel-Fattah Al-Sissi a rencontré le président du Conseil, Mohamad Fayeq, en juillet dernier, ce dernier a demandé la modification de la loi. Nous avons ensuite rencontré Ibrahim Al-Héneidi, ministre de la Justice transitoire, il y a trois semaines, et nous avons demandé la modification des articles 8 et 10, ainsi que l’annulation de tous les articles qui se trouvent déjà dans le Code pénal. En plus, nous avons demandé à annuler la peine de prison et nous avons accepté l’amendement », explique Amin. Mais Amin ajoute que le ministre a promis de discuter le cas avec le président et les responsables, sans donner un espoir de modifier la loi.

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