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Electricité  : Quand y verra-t-on plus clair  ?

Ola Hamdi, Mardi, 09 septembre 2014

La panne de courant généralisée qui a frappé l’Egypte le 4 septembre vient rappeler les immenses déficits du réseau électrique, mal entretenu, insuffisant et manquant de carburant.

Electricité
Il faudra beaucoup de temps pour pallier la crise de l'électricité.(Photo : Reuters)

« Le mauvais état du réseau électrique est le fruit de plu­sieurs années de sous-investis­sements », déclarait samedi dernier Abdel-Fattah Al-Sissi lors d’une allo­cution télévisée. Le chef d’Etat a reconnu qu’il n’y a pas de solution miracle au problème de l’électricité. « Nous devons comprendre que le problème de l’électricité ne peut absolument pas être réglé du jour au lendemain (…). L’Egypte a besoin d’augmenter la capacité de son réseau électrique de 12000 mégawatts au cours des 5 prochaines années et cela nécessite un investissement de l’ordre de 12 milliards de dollars ».

L’intervention du président faisait suite à une panne généralisée du cou­rant électrique le 4 septembre. La plupart des gouvernorats ont été tou­chés par cette panne qui a duré plus de 12 heures en continu. La panne a piégé des dizaines de milliers d’usa­gers du métro du Caire. Le trafic du métro a été interrompu sur la totalité de l’une des 3 lignes, et en partie sur une deuxième.

Les pertes du métro se sont chiffrées à 500 000 L.E. après seulement 3 heures de coupure. La panne a stoppé la diffusion de nombreuses chaînes de radiotélévision et a causé de nom­breux désagréments. Elle a eu lieu suite à des promesses du gouverne­ment de régler rapidement le pro­blème récurrent des pannes d’électri­cité.

La demande en électricité dépasse de 10 à 30% la production. Selon les experts en énergie, ce déficit est dû à l’augmentation de la consommation, alors qu’aucune nouvelle centrale électrique n’est entrée en service depuis 2010. Le résultat est que les centrales fonctionnent en surcapacité et ne disposent pas du temps et de l’argent nécessaires à la maintenance. Les livraisons de gaz et de mazout sont irrégulières du fait des problèmes financiers. Pour autant, jamais une coupure n’avait atteint une telle ampleur au cours des dernières années.

Eviter la surchauffe

Pour empêcher la surchauffe du réseau, le ministère de l’Electricité procède à des coupures de courant qui touchent successivement tous les quartiers, villes et villages d’Egypte, mais cette mesure n’est pas une solu­tion de la crise.

Les responsables du secteur de l’électricité ont déclaré à l’issue de la panne que celle-ci était due à « un dysfonctionnement du réseau dans la région ouest du Caire ». Un fait qui relance les interrogations sur la fiabi­lité du réseau. « Outre le problème habituel du carburant qui est insuffi­sant pour la production de l’électrici­té, le réseau est très mal entretenu. La plupart des centrales ont besoin de pièces de rechange. Et il est très rare que des pièces authentiques soient installées, souligne un ingénieur d’électricité qui a souhaité garder l’anonymat. Environ le tiers des cen­trales actuelles ont plus de 50 ans et ne sont plus vraiment opérationnelles. Elles ont besoin d’une remise en état. Or, on continue à les faire fonctionner tant bien que mal ». La remise en état de ces centrales nécessitera sans doute plusieurs années.

Il y a quelques années, sous Moubarak, le ministère de l’Electrici­té avait lancé un projet visant à faire fonctionner les centrales au mazout au lieu du gaz naturel. Or, toutes les pièces de rechange nécessaires à cette transformation n’ont pas été fournies.

L’Egypte souffre d’un déficit de 25% au niveau de la production de l’électricité. Au ministère de l’Electri­cité, les responsables se contentent d’affirmer à la suite de la panne géante: « Référez-vous aux propos du ministre ». Celui-ci avait présenté des excuses au peuple égyptien et affirmé qu’une commission d’enquête serait formée pour déterminer les responsa­bilités dans cette affaire.

Limiter les dégâts

En attendant, le gouvernement multiplie les initiatives pour tenter de mettre fin à la crise. La produc­tion et l’importation de certains cli­matiseurs, gros consommateurs d’énergie, ont été interdites. Le gou­vernement vient par ailleurs de don­ner son feu vert aux cimenteries (grandes consommatrices de gaz et de mazout) pour utiliser le charbon comme énergie alternative, en dépit de son impact sur l’environnement.

L’Egypte et l’Arabie saoudite viennent par ailleurs de signer un protocole pour connecter leurs réseaux électriques. Ces derniers seront connectés par des câbles sous-marins. Coût du projet: 2,1 milliards de L.E. Cela permettra à l’Egypte de se connecter au réseau saoudien hors des heures de grande consommation.

Pourtant, il ne s’agit que de solu­tions temporaires. C’est ce qu’af­firme Ibrahim Al-Assiri, expert en énergie atomique. « Toutes les solu­tions proposées par le gouvernement jusqu’à présent ne règlent pas le problème », dit-il. Selon lui, l’Egypte n’a pas beaucoup d’alternatives pour sortir de la crise. « Il faut diversifier les sources d’énergie pour faire face aux pannes d’électricité. L’Egypte doit s’orienter vers l’énergie nucléaire. Elle a déjà pris beaucoup de retard à ce sujet. Le gouverne­ment doit absolument mettre en ser­vice et rapidement une centrale nucléaire et arrêter d’avoir recours aux centrales électriques sous-entre­tenues. Le monde entier se dirige vers l’énergie nucléaire qui est beau­coup plus propre que l’énergie élec­trique et beaucoup moins coûteuse que l’énergie solaire », propose Al-Assiri.

L’Etat espère régler définitivement le problème de l’électricité d’ici quelques années. Il vise une crois­sance économique de 5,8% au cours des 3 prochaines années et un main­tien du déficit budgétaire aux alen­tours de 10% du PIB. Le président Abdel-Fattah Al-Sissi a été direct lorsqu’il a demandé aux Egyptiens de faire des sacrifices et de supporter les coupures de courant.

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