Les forces de sécurité ont réussi à désamorcer une autre bombe à quelques mètres de celle qui a explosé. (Photo : AP)
«
Que Dieu bénisse nos soldats qui ont pris pour cible ce poste de police. Ils ont observé ce poste pendant plusieurs jours et ont réussi à poser la bombe en profitant de la défaillance de la sécurité. La victoire de Dieu est très proche ». C’est ainsi que le groupe
Agnad Misr a revendiqué l’attentat de vendredi dernier qui a coûté la vie à un policier et fait 3 blessés. Le groupe a ciblé un point de police de la circulation sous le pont du 26 Juillet, place Libnan. Les forces de sécurité ont réussi à désamorcer une autre bombe à quelques mètres de la première. Dans un communiqué,
Agnad Misr affirme mener une campagne pour venger les «
victimes de la police ». Le groupe, qui déclare ne pas s’attaquer aux femmes, aux enfants et aux musulmans, remercie en outre «
tous ceux qui ont collaboré à l’attaque et qui ont fourni des informations sur ce point de police ».
Qui sont Agnad Masr et les autres ?
Le groupe avait revendiqué dans une vidéo postée sur Internet l’attentat du 2 avril dernier, place Al-Nahda, face à l’Université du Caire et qui avait fait un mort, un colonel de police. Il s’agissait d’une sorte de documentaire sur les 8 attentats commis par le groupe. Plusieurs pages sur Facebook portent également le nom d’Agnad Misr affichant des photos du président déchu Mohamed Morsi. Contrairement à Ansar Beit Al-Maqdes qui est un groupe djihadiste venu de Gaza et qui s’est installé dans le Sinaï avant de se déplacer vers le Delta, Agnad Masr est a priori une petite cellule composée de dix membres au plus et qui agit dans les endroits peuplés, principalement au Caire et à Guiza. « Ces cellules liées à la confrérie des Frères musulmans fabriquent des bombes rudimentaires qui n’ont pas de gros impact. Leur but est de semer la panique et de déstabiliser les forces de sécurité », souligne Naïm Nabil, un cadre repenti du Djihad.
Agnad Misr n’est d’ailleurs pas le seul groupe. D’autres groupes existent comme Al-Forqan et Ansar Al-Charia. Ahmad Ban, chercheur spécialiste des groupes islamistes, pense que Agnad Misr est un groupe de jeunes partisans de l’ex-candidat à la présidentielle Hazem Salah Abou-Ismaïl dont les intérêts concordent avec ceux des Frères musulmans. « Ce sont pour la plupart des jeunes qu’on a trompés avec des idées négatives sur l’Etat », affirme Ban.
Ces groupuscules oeuvreraient en accord avec une nouvelle stratégie consistant à lancer des attaques ciblées et imprévisibles contre les forces de l’ordre afin d’affaiblir leur moral. Ils attaquent des points vulnérables et pas très bien protégés. «
La stratégie de ces groupuscules islamistes consiste à donner l’impression qu’ils sont nombreux afin de faire peur et de semer la panique », explique pour sa part le général Hani Abdel-Latif, porte-parole du ministère de l’Intérieur.
Où est la sécurité ?
« Il faut s’attendre à une multiplication de ces attaques menées avec du matériel rudimentaire au fur et à mesure que l’on s’approche du 26 mai, date de l'élection présidentielle », explique Hani Abdel-Latif. Et d’ajouter que ces attaques visent à entraver la feuille de route au moment où les Frères musulmans ont échoué à rassembler les masses et n’ont plus la force de manifester. « Il ne leur reste plus qu’à faire des attentats dans une dernière tentative pour essayer de retourner la population contre le pouvoir », ajoute Abdel-Latif.
La succession des attentats soulève cependant une interrogation importante, à savoir où est la sécurité ? « Après la révolution du 25 janvier, le ministère de l’Intérieur a été affaibli comme la plupart des institutions de l’Etat », explique Ahmad Ban qui souligne la faiblesse des programmes d’entraînement des policiers. « Par exemple, les postes de contrôle de la police sont devenus une cible facile pour les terroristes. L’absence de la technologie est un autre point faible de la sécurité. Le problème est que la plupart de ces terroristes ne sont pas connus des services de police et n’ont aucun passé dans l’action djihadiste. D’où la difficulté de les arrêter », explique-t-il. « Ces jeunes ont été mobilisés à travers Internet et sont loin d’être des experts dans les actes terroristes. Il serait injuste de dire que les policiers ne font pas bien leur travail car ils travaillent dans des conditions très dures », explique pour sa part Amr Ammar, politologue. Et d’ajouter qu’il existe des pays européens, comme l’Allemagne, qui ont conclu des accords avec l’Egypte pour fournir du matériel anti-terroriste. Mais ces accords sont en suspens depuis la révolution du 30 juillet.
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