
Les affrontements continuent entre la confrérie et les forces de l'ordre. (Photo : Alaa Abdel-Bary)
Dans une tentative de retrouver leur capacité de mobilisation dans la rue et de freiner la feuille de route qui avance inexorablement, les Frères musulmans, déclarés organisation terroriste par les autorités égyptiennes en décembre dernier, ont organisé vendredi 7 mars de nouvelles manifestations qui ont tourné en affrontements violents avec les forces de l’ordre. Ces affrontements ont fait 3 morts et 23 blessés au Caire, selon un communiqué du ministère de la Santé. De violents affrontements avec les forces de l’ordre ont également eu lieu dans les gouvernorats de Charqiya, du Fayoum et d’Alexandrie faisant plusieurs blessés. «
Au Caire, plusieurs véhicules de police ont été incendiés. 17 policiers en tout ont été blessés. Il y a eu une soixantaine d’interpellations », explique une source du ministère de l’Intérieur. «
Les manifestants ont fait usage d’armes à feu et ont visé les forces de la police et les citoyens », affirme un communiqué du ministère de l’Intérieur.
Ces manifestations interviennent à l’appel de la « Coalition nationale de soutien à la légitimité » soutenant les Frères musulmans. La coalition avait appelé, dans un communiqué, à une semaine de manifestations baptisée « Nous ne serons pas gouvernés par les sionistes et les Américains » pour s’opposer à la candidature attendue du maréchal Abdel-Fattah Al-Sissi à la présidentielle. Composée de partis islamistes alliés aux Frères musulmans, cette coalition avait vu le jour en juin 2013 pour soutenir le président islamiste Mohamad Morsi. Plusieurs de ses dirigeants à l’instar de Assem Abdel-Magued et Tareq Al-Zomor, cadres de la Gamaa islamiya, ont fui à l’étranger après l’évacuation du sit-in de Rabea. Selon Alaa Aboul-Nasr, l’un des dirigeants de la coalition, le but de ces manifestations est de « s’opposer à la militarisation de l’Etat et de rétablir le processus démocratique ». « Il est absurde qu’après toutes ces vagues révolutionnaires, on assiste à une telle militarisation de l’Etat », dit-il. Il ajoute cependant que la coalition est « ouverte à des compromis politiques pour rétablir l’entente nationale mais à condition de préserver les libertés et de retrouver la voie démocratique. Nous sommes déterminés à poursuivre notre mouvement de protestation tant que nos revendications ne seront pas prises en considération ».
« Ils ne reviendront jamais »
A l’approche de l’élection présidentielle dont la date reste encore à fixer, les Frères multiplient les manifestations. Il s’agit d’une carte de pression sur le pouvoir. C’est en tout cas l’avis de Magdi Chalabiya, secrétaire général du parti du Rassemblement. « Les Frères veulent faire pression sur le gouvernement pour éventuellement obtenir des gains politiques. Les manifestations s’accentueront avant chaque échéance de la feuille de route, mais à mon avis ils ne reviendront jamais dans la vie politique », dit-il. Même son de cloche pour Chehab Wagdi, porte-parole du parti des Egyptiens libres. « Les Frères musulmans veulent montrer au gouvernement qu’ils sont toujours présents », analyse-t-il. L’islamologue Hicham Al-Naggar pense, lui, que les Frères et leurs alliés s’inspirent des groupes islamistes des années 1990 en livrant combat aux appareils de sécurité dans l’objectif de les épuiser. Quant à l’écrivain nassérien, Abdallah Al-Senawi, il précise : « Les Frères musulmans cherchent à s’affirmer une autre fois dans la rue après leur classement sur la liste des organisations terroristes d’abord par l’Egypte puis par l’Arabie saoudite. Les Frères musulmans vont poursuivre l’escalade une fois que le maréchal Al-Sissi aura annoncé officiellement sa participation à la course à la présidentielle et jusqu’à la fin des élections, et ce, pour montrer qu’ils demeurent un acteur incontournable dans la société » .
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