« Certains ont compris que l’objectif de la visite du maréchal Abdel-Fattah Al-Sissi en Russie n’est autre que rendre jaloux les Etats-Unis, pour les obliger à revenir à leurs relations étroites avec le pouvoir en Egypte », écrit Mahmoud Khalil dans le quotidien Al-Watan. Il ajoute : « D’autres ont compris que la visite veut dire que le nouveau pouvoir en Egypte cherche un nouvel allié et qu’Al-Sissi veut remettre le pays dans le giron russe en se basant sur l’historique des relations égypto-russes durant les années 1950 et 1960. Mais en réalité, l’Egypte n’a aucunement besoin de tout cela. Ce dont elle a besoin ce sont des relations internationales équilibrées avec tous. La visite d’Al-Sissi serait d’un grand profit si elle s’inscrivait dans ce sens. Car la mettre dans le cadre d’un divorce égypto-américain pour un mariage égypto-russe suscite beaucoup d’inquiétudes ».
Dans le quotidien Al-Masry Al-Youm, l’éditorialiste Salah Montasser relève que « ceux qui croient qu’Al-Sissi est un autre Nasser se leurrent. Car la conjoncture qui a vu naître le raïs n’existe plus. Et ceux-là n’ont qu’à examiner la carte du monde. Le monde ne cherche plus de leadership, mais des chefs d’un nouveau genre. Nous espérons que Abdel-Fattah Al-Sissi en fera partie quand le peuple l’élira ».
L’Egypte fait barrage au barrage
Nasser était le bâtisseur du Haut-Barrage et Al-Sissi doit faire face au gigantesque barrage de la Renaissance éthiopien dont le coût s’élève à 4,8 milliards de dollars. « Selon mes informations, la partie égyptienne a soulevé la question de ce barrage à Moscou pour que celui-ci use de son poids pour convaincre Addis-Abeba de prendre en considération les droits de l’Egypte dans la distribution des eaux du Nil », écrit Emadeddine Hussein dans le quotidien Al-Shorouk. « Il est clair que l’Egypte table sur le lancement d’une attaque diplomatique pour convaincre l’Ethiopie de retarder la construction du barrage ou d’en modifier les plans ».
Sur un tout autre registre, le site d’information en ligne Mada Masr a publié un article de Hossam Bahgat, ex-directeur de l’ONG des droits de l’homme Egyptian Intiative for Personal Rights, où il explique que l’information selon laquelle l'ex-président Mohamad Morsi a libéré la plupart des islamistes en prison pour différents crimes est fausse. « Lors d’une conférence de presse en novembre dernier, le ministre de l’Intérieur, Mohamad Ibrahim, a déclaré l’arrestation d’une cellule terroriste de 39 éléments extrémistes qui projetait de commettre plusieurs actes terroristes contre la police, l’armée et les églises. Le ministre a ajouté que cette cellule était sous la direction de Nabil Abdel-Meguid Al-Maghrabi, relâché de prison durant le mandat de l’ex-président Mohamad Morsi. Ce djihadiste a été arrêté en 1979 et a été inculpé après l’assassinat de Sadate en 1981 dans l’affaire de l’organisation du djihad. Le problème dans la déclaration du ministre est que Nabil Al-Maghrabi est sorti de prison le 5 juin 2011, c’est-à-dire un an avant l’élection de Morsi à la présidence, sur la base d’une décision de grâce promulguée par le procureur général Abdel-Méguid Mahmoud désigné par Moubarak », affirme-t-il. L’auteur fait remarquer que les médias ont reporté durant les deux dernières années plusieurs déclarations de sources sécuritaires selon lesquelles l’ex-président Morsi est responsable d’avoir promulgué la grâce présidentielle au profit de centaines de djihadistes que Moubarak a mis en prison. Mada Masr a durant les dernières semaines analysé les données officielles disponibles sur les prisonniers qui ont été relâchés depuis la chute de Moubarak, et une toute autre image fut révélée.
800 libérations sous le CSFA
« Il est vrai que Morsi a gracié des centaines, mais la plupart de ceux qui ont bénéficié de la grâce étaient des manifestants jugés devant des cours martiales. Il a cependant effectivement relaxé des djihadistes condamnés dans des affaires de terrorisme, mais la majorité des décisions de grâce en faveur de chefs djihadistes ont été promulguées durant la période du Conseil Suprême des Forces Armées (CSFA). Le rapport de Mada Masr a conclu que Morsi a relâché 27 islamistes durant son année au pouvoir alors que ledit conseil en a relâché 800 », précise Hossam Bahgat. L’auteur rappelle que Khaïrat Al-Chater et Hassan Malek, les deux cadres des Frères musulmans et pourvoyeurs de fonds de la confrérie, ont été relaxés sous le règne du Conseil des forces armées. Il en est de même pour Mohamad Al-Zawahri, le frère du chef d’Al-Qaëda, et qui encourait une peine de mort par contumace datant de 1999 pour actes terroristes. Il conclut : « Aucun des prisonniers relâchés par décision de Tantawi, chef du Conseil militaire à l’époque, ou par des tribunaux militaires n’a été accusé, depuis, d’avoir repris ses activités terroristes, mis à part Zawahri et Maghrabi ».
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