Al-Ahram Hebdo : La récente décision du gouvernement de déclarer la confrérie des Frères musulmans « groupe terroriste » a soulevé des réactions très controversées. Comment justifiez-vous cette décision du point de vue juridique ?
Ahmad Al-Boraï : Cette décision était à l’étude depuis le verdict en septembre interdisant les activités de la confrérie et de son parti politique ainsi que le gel de ses avoirs financiers. Les Frères étaient accusés d’incitation à la violence et au meurtre. Lorsque tous les éléments juridiques ont été réunis, le gouvernement a pris cette décision et a déclaré les Frères musulmans « organisation terroriste ».
— Certains sont d’avis que cette décision va inciter les Frères à basculer davantage dans la violence. Qu’en pensez-vous ?
— Le recours à la violence par les Frères n’est pas nouveau. Ils l’ont toujours fait. Nous savons qu’ils veulent renverser le régime et leur méthode depuis leur création il y a 83 ans n’a pas changé, ils ont eu recours à la violence, à la destruction et aux assassinats. Nous sommes tout à fait conscients de leur plan et les appareils de sécurité sont prêts à encore plus de sacrifice afin de faire échouer les Frères musulmans.
— Certains pays, notamment les Etats-Unis, se sont dits « inquiets » de la décision du gouvernement égyptien. Qu’en pensez-vous ?
— Ces réactions n’ont aucun sens et ne nous obligeront jamais à reculer. Il serait inacceptable que nous restions silencieux face à un terrorisme aveugle sous prétexte que nous craignons les réactions internationales. Face à la violence croissante des Frères, le gouvernement n’avait pas d’autre choix. Certains pays comme la France et la Russie ont condamné fermement le terrorisme actuel en Egypte. Face à ce danger qui menace les citoyens, nous ne devons prêter aucune attention à la position des autres pays. Si l’Administration américaine pense qu’en soutenant les Frères musulmans, elle peut récupérer l’argent qu’elle a donné à la confrérie, ou qu’elle peut mettre à exécution le plan d’implantation des Palestiniens dans le Sinaï, nous disons que ce groupe terroriste ne reviendra jamais au pouvoir car le peuple égyptien l’a rejeté, et s’opposera à son retour et non pas le gouvernement, l’armée ou la police. La preuve en est qu’après l’attentat terroriste à Mansoura, qui a fait d’énormes dégâts, il y a eu des manifestations dans cette ville et à Mahalla. Les gens brandissaient des slogans tels que « Vous avez 48 heures pour partir » et « La peine de mort est la solution ». Faut-il attendre qu’une guerre civile éclate ?
— Le gouvernement a décidé de geler les avoirs de 1 055 associations oeuvrant dans le domaine caritatif et soupçonnées de coopérer avec les Frères. Comment cette décision va-t-elle prendre effet sur le terrain ?
— La Banque Centrale a prévenu 44 banques du pays de la décision de geler les avoirs de ces associations. Nous avons juste besoin d’un peu de temps pour appliquer correctement la décision, afin de maximiser les bénéfices et minimiser les pertes. Les banques doivent nous informer de la nature des comptes dont disposent ces associations et le montant des sommes déposées. Nous préparons en ce moment une liste d’observateurs qui seront chargés de gérer ces associations et contrôler leurs comptes.
— Quel est le but de cette décision ?
— Le but est de garantir que les fonds des ONG ne soient pas exploités dans des activités qui nuisent à la sécurité nationale. Les conseils d’administration des ONG continuent à faire leur travail normalement, mais ils n’auront pas accès aux comptes sans prendre la permission des comités de contrôle formés par le ministère.
— Mais ont-elles le droit de recevoir des dons ou des aides ?
— Oui parfaitement. Elles ont le droit de recevoir des dons qui seront déposés sur leurs comptes bancaires, mais elles ne peuvent pas accéder directement aux comptes.
— Ne pensez-vous pas que cette décision nuise à un grand nombre de citoyens, qui bénéficient de l’aide fournie par ces associations ?
— Nous avons tous les renseignements concernant les citoyens qui obtenaient ces aides et les services rendus par ces associations. Nous n’allons pas permettre que les besoins des pauvres soient exploités à des fins maléfiques.
— La décision peut-elle avoir des répercussions négatives sur le plan économique ?
— Non, il n’y aura aucune répercussion de ce genre sur le plan économique. La preuve en est que la Bourse n’a pas été influencée par cette décision. Les investisseurs sentent que l’Egypte est sur la bonne voie et que l’avenir sera meilleur.
— Pensez-vous que cette décision ait une influence sur le vote en faveur de la Constitution ?
— Toutes les tentatives des Frères musulmans de gâcher le référendum des 14 et 15 janvier n’auront aucun effet. Le gouvernement est parfaitement conscient de leur plan et leurs mouvements qui seront affrontés avec fermeté.
— Pourquoi avez-vous décidé de ne pas changer les conseils d’administration de ces associations ?
— La décision de ne pas changer les conseils d’administration est dans l’intérêt général et l’intérêt des employés qui travaillent dans ces associations en attendant que les comités de contrôle achèvent leur travail. Tout changement dans les conseils d’administration pourrait avoir des effets néfastes et ne serait pas conforme à la loi.
— Existe-t-il d’autres mesures prises par le ministère de la Solidarité sociale pour faire face au terrorisme ?
— Une réunion se tiendra prochainement avec le Dr Mohamad Mokhtar Gomaa, ministre des Waqfs, pour discuter des mécanismes permettant de placer les mosquées affiliées aux ONG sous la direction du ministère et nommer des imams accrédités par le ministère à la place de ceux qui répandent des idées destructrices. Effectivement, ces mosquées étaient exploitées pour diffuser des idées extrémistes servant les intérêts politiques des Frères musulmans.
— Etez-vous pour l’élection présidentielle avant les législatives ?
— Je suis pour l’élection présidentielle d’abord, mais je soutiendrais le résultat du dialogue entre le président, Adly Mansour, et les forces politiques et révolutionnaires sur cette question. En fin de compte, ce qui importe c’est d’appliquer la feuille de route.
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