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Défaite des Frères dans leur dernier bastion

Ola Hamdi, Mardi, 17 décembre 2013

Les Frères musulmans ont perdu, pour la première fois depuis 28 ans, le contrôle de l'ordre des Médecins. Un fait qui traduit le recul de popularité de la confrérie.

Defaite
Les Frères expliquent leur défaite par leurs arrestations massives au cours de la récente période.

Changement historique à l’ordre des Médecins. Les Frères musulmans, qui dominaient le conseil du syndicat depuis 28 ans, ont perdu leur monopole sur l’établissement. Les Frères ont perdu la majorité qu’ils détenaient au sein du conseil au terme des élections de renouvellement partielles, et ce, au profit d’une coalition rivale indépendante. La liste des candidats anti-islamistes a remporté 11 des 12 sièges au syndicat général laissant un siège seulement à la liste « Médecins pour l’Egypte » des Frères musulmans. Les indépendants ont remporté la totalité des sièges au Caire et à Alexandrie.

Les indépendants contrôlent à présent 15 des 24 sièges du conseil du syndicat. La liste indépendante était formée d’une coalition établie en 2011 et composée de deux groupes, à savoir « Médecins sans droits » et « Médecins de Tahrir ». En 2011, cette coalition avait remporté 6 des 24 sièges au sein du conseil. Le syndicat était alors dominé par les Frères musulmans. « Malgré le mauvais temps, les médecins sont venus en masse pour libérer leur syndicat des Frères musulmans. Les médecins veulent un syndicat qui sert leurs intérêts et pas ceux d’un courant politique », affirme Khaled Samir, membre de la coalition indépendante.

Les indépendants estiment que la domination des Frères sur le syndicat a conduit à la détérioration des services. Des représentants de partis politiques laïques sont venus assister au scrutin pour soutenir le courant indépendant. Parmi eux Ihab Al-Kharrat, dirigeant du Parti social-démocrate, et Mahmoud Al-Alayli, du parti des Egyptiens libres. « Après plus de 28 ans de contrôle des Frères sur le syndicat, celui-ci passe sous le contrôle de la gauche. C’est un fait historique ». Les résultats confirment la faible capacité des Frères à mobiliser. Selon Abdel-Ghafar Chokr, président du parti de l’Alliance populaire socialiste, « le succès du courant indépendant est un bon indice pas seulement pour l’ordre des Médecins mais pour l’Egypte tout entière ». Selon lui, les Frères ne vont pas disparaître de la vie politique et leur retour dépend de leur capacité à reconnaître leurs erreurs. Pour Mokhtar Nouh, leader dissident de la confrérie, la défaite des Frères était prévisible parce que, selon lui, ils ont perdu leur crédibilité. « Les Frères ont perdu la confiance des citoyens au niveau des unions d’étudiants. A présent, ils ont perdu leur monopole et leur rôle dans les syndicats professionnels », explique Nouh.

« Beaucoup sont en prison»

Les Frères, eux, expliquent leur défaite par les arrestations massives dont ont fait l’objet les Frères au cours de la récente période. C’est ce qu’affirme Ahmad Lotfi, membre de la confrérie. « La plupart des médecins ont choisi de rester à la maison parce qu’ils ne sont pas convaincus par une élection sous le régime militaire, et beaucoup sont en prison et ne peuvent pas se rendre aux urnes », déclare-t-il. Soumis à la pression des autorités sous les régimes de Nasser et de Moubarak, les Frères ont concentré leurs activités sur les unions estudiantines, les clubs des professeurs d’université et les syndicats professionnels durant les années 1970-1980. Leur succès s’explique partiellement par le déclin, à la même période, du courant nassérien et de la gauche. Le courant islamiste a disputé les élections de l’ordre des Médecins pour la première fois en 1984, avant d’investir les ordres des Ingénieurs et des Pharmaciens. Au début des années 1990, les Frères avaient dominé l’ensemble des syndicats professionnels. L’Etat a alors cherché à les en exclure. En 1993, la loi 100 relative aux syndicats professionnels est promulguée et vise à paralyser l’activité des syndicats dominés par les Frères. Plusieurs syndicats sont placés sous séquestre. La défaite des Frères musulmans à l’ordre des Médecins est un coup dur pour la confrérie. Elle intervient dans un contexte politique tendu. Cette défaite symbolise le déclin de la popularité des Frères, car l’ordre des Médecins était l’un de leurs derniers bastions. Pour Amr Hachim, analyste du Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, les salafistes remplaceront les Frères au cours de la période à venir.

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