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Journée du martyr : Les deux messages du président

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mercredi, 13 mars 2024

Le président Sissi a pris part samedi au traditionnel symposium culturel, organisé par les Forces armées, à l’occasion de la Journée du martyr. Le chef de l’Etat est revenu sur les grands dossiers du moment, notamment la réforme économique et la guerre à Gaza. Décryptage.

Journée du martyr : Les deux messages du président

Le président Abdel Fattah Al-Sissi a participé samedi 9 mars au 39e symposium culturel organisé par les Forces armées à l’occasion de la Journée du martyr et des anciens combattants sous le titre : « Les traces subsistent ». Le symposium s’est tenu au Centre international de conférences d’Al-Manara au Nouveau Caire. Chaque année, le président de la République, les grands responsables de l’Etat et de l’armée, les rédacteurs en chef des journaux, les familles et enfants des martyrs, ainsi que de nombreuses célébrités prennent part à cette cérémonie en l’honneur des martyrs des forces armées égyptiennes qui coïncide avec l’anniversaire de la mort du général Abdel-Moneim Riyad en 1969.

Le chef de l’Etat a rendu hommage comme d’habitude aux familles des martyrs des forces armées. Au début du symposium, un film documentaire produit par le département des Affaires morales des forces armées a été projeté, mettant la lumière sur les sacrifices des martyrs. Le président Sissi a assisté à un spectacle sur les sacrifices des soldats pour la patrie, suivi d’un documentaire intitulé « Héros de mon pays ». Des enfants de martyrs ont participé à la cérémonie et ont parlé des sacrifices de leurs parents.

Au cours de son discours, le président Sissi a déclaré que c’était grâce aux sacrifices des martyrs que l’Egypte jouit aujourd’hui de la paix et de la sécurité malgré l’instabilité régionale. Il a rappelé que l’Egypte a mené une guerre de 10 ans contre le terrorisme et a affronté la pensée extrémiste.

Un discours rassurant

Le chef de l’Etat est revenu sur les grands dossiers du moment. Dans un premier commentaire sur la décision prise la semaine dernière par le gouvernement d’adopter un taux de change flexible, il a affirmé que cette décision « n’aurait pas été possible sans un financement important », soulignant qu’il a fallu attendre le bon moment pour prendre une telle mesure. « Il y a quelques mois, j’avais dit que je n’accepterais pas cette décision si elle touchait à la sécurité nationale. A l’époque, on n’avait pas assez de liquidités, et si on avait pris cette décision plus tôt, le dollar aurait atteint les 70 ou 80 L.E. », a expliqué le président. Et d’ajouter : « Avec le projet de Ras Al-Hekma et le prêt du Fonds Monétaire International (FMI), nous aurons environ 45 à 50 milliards de dollars de financement ».

La Banque Centrale d’Egypte (BCE) a dévalué, il y a quelques jours, la livre égyptienne par rapport au dollar pour la quatrième fois depuis début 2022, affirmant qu’elle laisserait les lois du marché déterminer le taux de change du dollar. La monnaie locale a connu une baisse significative. Le taux de change du dollar est passé à 49,5 L.E. alors que le taux précédent était de 30,9 L.E.

Le président a également souligné que les conditions économiques difficiles auxquelles est confronté le peuple égyptien, en particulier au cours des quatre dernières années, ne sont pas la conséquence de décisions risquées prises par le gouvernement, mais sont dues aux répercussions des évolutions mondiales et régionales inattendues depuis 2020, notamment la pandémie de coronavirus, la guerre en Ukraine et, plus récemment, la guerre israélienne à Gaza. « Ces évolutions constituent une menace et un défi majeur pour l’Egypte et l’ensemble de la région », a déclaré le président.

Il a exhorté les Egyptiens « à travailler avec diligence et à faire preuve de patience » pour surmonter ces conditions, soulignant que c’est la seule voie viable.

Le président a ajouté que le gouvernement n’avait pas « dilapidé l’argent du peuple égyptien à travers la corruption », soulignant que tous les projets mis en place dans le pays ces dernières années « ont été réalisés en toute transparence ». Ce qui, selon lui, constitue « une réalisation majeure, compte tenu des conditions difficiles que connaît l’Egypte depuis 2011 ».

Sissi a souligné que les pays ne peuvent pas se développer en seulement 10 ans. « Il faut 75 ans pour un pays afin de devenir une nation (développée) », a-t-il affirmé, assurant qu’il aurait souhaité que ce délai soit plus court.

Le professeur de sciences politiques à l’Université du Caire Tarek Fahmy estime que le président a présenté un discours intégral qui aborde les questions politiques, sécuritaires, stratégiques et économiques qui touchent à la vie du citoyen égyptien. « Le président Sissi a tenu à revenir dans son discours sur les dernières mesures et la réforme économique engagée par l’Etat afin de répondre aux interrogations, aux craintes et surtout aux rumeurs qui ont circulé après la signature de l’accord Ras Al-Hekma et la dévaluation de la livre égyptienne. C’est un discours à la fois rassurant et transparent. Ce discours montre que le président suit de manière très minutieuse tout ce qui est dit dans les différents contextes », affirme Fahmy. Et d’ajouter : « Le président a tenu à rassurer les 100 millions d’Egyptiens qu’aucune des décisions qui ont été prises irait contre l’intérêt de la patrie. Il a insisté sur le fait que les conditions économiques commencent à s’améliorer et sont prometteuses pour les années à venir. Ces messages sur la nécessité de travailler à fond et de respecter ces engagements ne sont pas seulement adressés aux citoyens, mais également au gouvernement et aux responsables des projets en cours ».

Gaza, le soutien de l’Egypte se poursuit

S’exprimant sur la guerre à Gaza, le président a répété que l’Egypte « tient à ce que le terminal de Rafah reste ouvert 24 heures sur 24 pour faciliter l’entrée de l’aide humanitaire à Gaza. Nous ne le fermerons jamais », a-t-il dit. « Nous avons décidé d’acheminer l’aide par voie aérienne en raison des difficultés liées à son acheminement par voie terrestre », a dit le président, faisant référence aux restrictions imposées par Israël qui retarde l’acheminement de l’aide.

Plusieurs pays, dont l’Egypte, la Jordanie, les Emirats arabes unis et les Etats-Unis, ont largué de l’aide humanitaire dans la bande de Gaza, y compris dans sa partie nord.

Sissi a également souligné que l’Egypte va « continuer à oeuvrer pour parvenir à un cessez-le-feu, fournir l’aide et porter secours aux personnes touchées par cette immense catastrophe ». Il a réitéré le rejet par l’Egypte de toute déportation des Palestiniens vers le Sinaï, assurant qu’il n’est pas question de trahir la cause palestinienne.

Dans son discours, le président s’est également adressé au peuple palestinien. « Votre douleur et votre angoisse est la nôtre (…) J’ai demandé aux institutions d’évaluer le coût de la reconstruction de Gaza, et nous avons constaté que le coût dépasse les 90 milliards de dollars pour que Gaza retrouve sa structure de base et redevienne vivable », a-t-il dit.

Le professeur de sciences politiques à l’Université du Caire Hassan Salama explique que les messages du président peuvent être divisés en deux parties. Une partie liée à la situation interne en Egypte et les défis persistants et l’autre à l’agression israélienne à Gaza. Un souci pour l’Egypte qui, selon Salama, « n’est pas de moindre importance que les dossiers internes ».

Selon Salama, les propos du président ont souligné les constantes de la position égyptienne en faveur de la cause palestinienne et les mécanismes mis en place par l’Etat égyptien pour renforcer l’adhésion des Gazaouis à leur terre.

L’Egypte déploie de grands efforts pour résoudre la crise à Gaza, que ce soit par une action politique pour parvenir à une trêve ou par l’acheminement de l’aide par différentes voies, notamment terrestre, via le terminal de Rafah, ouvert depuis le premier jour de la crise et qui a reçu des centaines de Palestiniens blessés. « L’Egypte procède également par voie aérienne via le largage des aides humanitaires pour assurer leur arrivée aux endroits inaccessibles par voie terrestre, notamment dans le nord », dit Salama. Et d’ajouter : « Le président a insisté dans son discours sur le fait que l’Egypte ne trahira pas la cause palestinienne. Il a renouvelé ainsi son engagement envers le peuple palestinien frère, qui refuse la liquidation de sa cause. Il n’est donc pas question pour l’Egypte de permettre l’entrée des Palestiniens dans le Sinaï ».

Une position sur laquelle a insisté le chef de l’Etat qui a assuré que « l’Egypte ne cessera pas ses efforts, quel que soit le prix, afin que le peuple palestinien obtienne ses droits légitimes et fonde son Etat indépendant ».

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