« Une croissance durable dans un monde plein de défis », tel était le slogan de la 8e réunion annuelle du Conseil des gouverneurs de la Banque Asiatique d’Investissement dans les Infrastructures (BAII), qui a eu lieu pour la première fois en Afrique. C’est la ville de la paix, Charm Al- Cheikh, qui a accueilli, les 25 et 26 septembre, cet événement phare de la Banque, tenu en présence de 3 000 participants, dont 106 ministres des Finances et chefs de Banques centrales.
Créée en 2016, la BAII est une institution internationale qui finance des projets de développement durable dans le domaine des infrastructures et de la transition verte. Cette banque, dont le siège est à Pékin, gagne en popularité parmi les pays en développement. Elle est passée de 57 membres fondateurs lors de sa création à 106 membres actuellement, dont l’Egypte. La Banque possède un portefeuille d’environ 231 projets avec des investissements estimés à 44,3 milliards de dollars en Asie, en Afrique et dans de nombreux pays du monde.
La Banque asiatique est considérée comme la deuxième banque multilatérale au monde. Elle est dotée d’une capacité de financement pouvant aller jusqu’à 100 milliards de dollars et bénéficie d’une notation élevée des agences économiques internationales Fitch et Triple A avec une perspective future stable.
Selon des experts, la popularité croissante de la banque parmi les pays en développement est due à trois raisons principales. D’abord, la banque est spécialisée dans les investissements dans les infrastructures, dont ont cruellement besoin les pays en développement qui souffrent d’un déficit important. Ensuite, elle n’impose ni diktats politiques, ni pressions économiques aux emprunteurs. Enfin, la banque consacre une part importante de son capital au financement climatique. La tenue de la conférence annuelle de la Banque à Charm Al-Cheikh est d’une grande importance pour l’Egypte et pour l’Afrique. Selon beaucoup d’observateurs, ce choix est une reconnaissance de l’importance du continent africain dans le développement mondial. Il montre l’intention de la BAII de donner la priorité au financement de projets en Afrique au cours de la période à venir.
« Le fait que la conférence annuelle de la BAII se tienne dans la station balnéaire égyptienne de Charm Al-Cheikh est un message important selon lequel la banque souhaite investir en Afrique et promouvoir une meilleure communication entre l’Afrique et l’Asie », affirme le ministre des Finances et gouverneur de l’Egypte auprès de la BAII, Mohamad Maeit, soulignant que « l’Egypte soutient les stratégies et les objectifs de la banque étant donné qu’elle est l’un des principaux contributeurs à son capital, avec une action évaluée à 650 millions de dollars ».
En fait, l’Egypte est l’un des membres fondateurs et le plus grand actionnaire africain de la banque. La BAII dispose d’un portefeuille d’investissement estimé à 1,3 milliard de dollars américains dans plusieurs projets de développement lancés par les secteurs public et privé en Egypte, surtout dans le domaine des infrastructures. La centrale solaire égyptienne de Benban a été le premier projet énergétique dans lequel la Banque a investi en dehors de l’Asie.
Le poids de l’Egypte
Selon l’expert Abdel-Raouf Al- Idrissi, professeur d’économie à l’Académie arabe des sciences, des technologies et des transports maritimes, « l’organisation par l’Egypte d’un tel événement témoigne de son influence dans la région, notamment après sa récente adhésion aux BRICS ». Et d’ajouter : « Elle reflète aussi le poids de l’Egypte auprès des institutions internationales, dont bien sûr la Banque asiatique. Cet événement est également l’occasion de renforcer la coopération dans de nombreux projets que l’Egypte envisage de lancer en matière d’infrastructures et d’attirer davantage d’investissements directs, surtout que le gouvernement égyptien a récemment lancé le document de propriété de l’Etat, qui offre de nombreuses opportunités d’investissement prometteuses ». Avis partagé par Dr Cherine Al- Chawarby, professeur d’économie à la faculté d’économie et de sciences politiques, et ancienne ministre adjointe des Finances chargée de la justice économique, qui explique que « l’Egypte cherche à diversifier ses sources de financement en augmentant la coopération avec les banques de développement comme la Banque asiatique et la Banque africaine. La tenue de ce type de conférence attire l’attention du monde entier sur le pays hôte, ainsi que sur les avantages et les opportunités d’investissement dont il dispose ».

La centrale solaire égyptienne de Benban a été le premier projet énergétique dans lequel la Banque a investi en dehors de l’Asie.
Un agenda chargé
Quel rôle les banques multilatérales de développement doivent jouer pour renforcer la capacité des pays en développement et les aider à relever les défis économiques mondiaux ? Cette question était au centre de l’agenda chargé et varié des réunions annuelles de la BAII. Les participants ont abordé des sujets-clés comme : « Comment mettre en place une gouvernance internationale placée au service du développement durable et qui va au-delà des frontières ? Comment construire des partenariats pour soutenir les infrastructures de santé mondiales ? Mobiliser des ressources pour financer des activités centrées sur le climat, renforcer le rôle du secteur privé dans le domaine des services électroniques en Asie et en Afrique et mobiliser des ressources et des financements créatifs pour combler le fossé dans le financement des projets ».
Lors de son discours, le président de la BAII, Jin Liqun, a déclaré que la Banque possède une grande expérience et peut jouer un rôle pour satisfaire les besoins en développement et combler le déficit d’infrastructures au Moyen-Orient et en Afrique.
« Il faut prêter attention aux infrastructures au niveau mondial afin qu’elles puissent résister aux chocs résultant des catastrophes naturelles », a déclaré Liqun, soulignant que la plateforme de financement rapide de la banque soutient la transition vers les énergies propres. En fait, la BAII a dévoilé, lors de sa réunion annuelle à Charm Al-Cheikh, son plan d’action climatique qui vise à apporter des capitaux pour soutenir les pays membres à lutter contre le changement climatique. La BAII s’est fixé des objectifs ambitieux, s’engageant à allouer au moins 50 % de son financement annuel au climat d’ici 2025.
« L’Egypte est l’une des plus grandes civilisations de l’histoire de l’humanité et les infrastructures égyptiennes occupent depuis longtemps une place particulière dans l’imaginaire mondial avec des merveilles intemporelles comme les pyramides de Guiza et le Canal de Suez par lequel transite 12 % du commerce mondial. L’Egypte est depuis longtemps le foyer des grandes visions et des rêves d’un nouveau lendemain », a déclaré, pour sa part, le président de la BAII. Dr Sri Mulyani Indrawati, ministre des Finances d’Indonésie, a souligné au cours de son intervention la nécessité d’accorder une plus grande attention à la création d’un environnement législatif et de programmes exécutifs cohérents avec la stratégie de la Banque, visant à stimuler le secteur privé, afin qu’il investisse massivement dans des projets d’infrastructure. Elle a salué les efforts déployés par la Banque dans ce contexte, qui se traduisent par de nombreux partenariats avec le secteur privé dans différents pays membres, notamment dans les domaines de l’adaptation climatique. Le ministre turc des Finances et du Trésor, Mehmet Simsik, a assuré, quant à lui, que la BAII joue un rôle important dans la réduction des risques commerciaux, ce qui encourage le secteur privé à contribuer efficacement au processus de développement durable. Il espère que des solutions innovantes seront mises en place pour soutenir davantage le secteur privé. Enfin, Hassan Allam, PDG de Hassan Allam Holding, a déclaré que l’Afrique compte environ 5,1 milliards d’habitants âgés en moyenne de 19 ans, ce qui signifie une demande croissante sur les investissements dans les infrastructures : « Le rôle du secteur privé est clair et l’opportunité est là. Certains pays ont accéléré leur développement, comme l’Egypte, qui a une expérience pionnière dans ce domaine ».
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