Vendredi, 15 novembre 2024
Al-Ahram Hebdo > Egypte >

Barrage de la Renaissance : Entre méfiance et espoir

Chaïmaa Abdel-Hamid , Jeudi, 07 septembre 2023

La première session du nouveau cycle de négociations sur le barrage de la Renaissance s’est achevée sans résultats tangibles. Le scepticisme reste de mise quant aux prochaines discussions.

Barrage de la Renaissance : Entre méfiance et espoir
Une nouvelle session de discussions doit se tenir en septembre à Addis-Abeba.

« Pas de changement tangible dans la position de l’Ethiopie », a déclaré l’ingénieur Mohamad Ghanem, porte-parole du ministère de l’Irrigation, en annonçant les résultats de la première session du nouveau cycle de négociations sur le barrage de la Renaissance, tenues les 27 et 28 août au Caire, après une longue interruption, les dernières discussions datant d’avril 2021. Le porte-parole a noté que l’Egypte avait présenté de nombreuses propositions au cours de cette session de négociations visant à réaliser les intérêts des trois pays. Une position qui ne semble pas être la même de la part de l’Ethiopie qui poursuit son intransigeance.

Pour sa part, le chef de l’équipe de négociations éthiopienne, l’ambassadeur Seleshi Bekele, a déclaré que les négociations tripartites étaient menées avec soin et de manière à parvenir à un accord qui « ne limite pas les droits de développement de l’Ethiopie », soulignant que son pays « ne signera jamais aucun document susceptible de limiter ses droits de développement ».

Un négociateur difficile

Toujours la même intransigeance. Quel est donc l’objectif du retour à la table des négociations ? Et quelle chance de parvenir à un accord contraignant pour toutes les parties en négociation ? L’ancien ministre des Affaires étrangères, Mohamad Al-Orabi, explique qu’il semble que la partie éthiopienne n’a l’intention ni de changer de position dans la période actuelle ni même de faire des démarches concrètes sur la voie de la conclusion d’un accord. « Nous faisons sûrement face à un négociateur difficile, qui sait comment manoeuvrer. L’Egypte, par contre, maintient une approche différente fondée sur son long souffle jusqu’au bout pour atteindre ses objectifs de parvenir à un accord qui n’irait pas contre les intérêts des pays en aval et qui réaliserait en même temps les objectifs de développement éthiopiens », explique-t-il. Et d’ajouter : « Comme cela a été le cas depuis le lancement des négociations en 2011, les Ethiopiens oeuvrent à exploiter le temps à leur avantage ».

L’ancien ministre assure également que « l’Egypte ne renoncera jamais à ses objectifs de parvenir à un accord, d’où l’importance de poursuivre les négociations. Elle travaille sur plusieurs axes, à savoir africain, arabe et international. La période à venir sera marquée par un intense dynamisme diplomatique égyptien. Il s’agit de renforcer les positions égyptiennes devant tous les pays du monde et de revendiquer ses droits, d’autant plus que le Soudan est actuellement en période d’instabilité en raison des conflits dont il témoigne ». Une position que l’Egypte réitère à toute occasion. Cette semaine, lors de sa rencontre avec une délégation élargie de haut niveau des Partis démocrate et républicain au Congrès américain, au Caire, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a souligné la position de l’Egypte concernant l’engagement de parvenir à un accord juridique contraignant sur le remplissage et l’exploitation du barrage de la Renaissance, qui tienne compte des intérêts et des préoccupations des trois pays.

Sur un ton plus optimiste, l’expert hydraulique Nader Noureddine voit l’affaire d’un oeil différent. « Il ne faut pas se presser. Il est bien normal à la première session inaugurale de la reprise des négociations, gelées depuis presque 3 ans, de ne pas parvenir à des résultats tangibles. Toutes les parties présentent leurs propositions qui sont en général exagérées, et avec un plafond élevé. Au long des négociations, qui doivent durer 4 mois, ces propositions seront étudiées par les négociateurs qui sont censés parvenir à un compromis consensuel pour les trois parties », explique Noureddine. Il poursuit qu’« il y a de grandes chances que les négociateurs puissent parvenir à un accord au bout des quatre mois, car pour la première fois, celles-ci sont parrainées par les leaders égyptien et éthiopien qui ont donné le feu vert à la relance des négociations. Ce qui exprime une réelle volonté conjointe de parvenir à un accord juridique contraignant et de mettre fin à ces négociations qui durent depuis de longues années ».

A rappeler qu’au cours des trois dernières années, en l’absence d’un accord juridiquement contraignant sur le remplissage et l’exploitation du barrage, comme l’exigeait l’Egypte, l’Ethiopie a achevé unilatéralement les trois premiers remplissages du barrage et entreprend actuellement le quatrième remplissage qui touche à sa fin. L’Egypte a accusé les actions unilatérales éthiopiennes de contrevenir au droit international et à la déclaration du Conseil de sécurité de l’Onu publiée en septembre 2021 sur les moyens de résoudre le différend. Mais lors d’une rencontre qui a rassemblé, en juillet, le président Abdel-Fattah Al-Sissi et le premier ministre éthiopien, Abiy Ahmed, en marge du Sommet des pays voisins du Soudan qui s’est tenu au Caire, les deux leaders ont convenu d’entamer des négociations urgentes pour se mettre d’accord sur le remplissage du barrage de la Renaissance et les règles de son fonctionnement.

Une prochaine rencontre a été annoncée par le ministère éthiopien des Affaires étrangères dans un communiqué signalant que les délégations des trois pays ont convenu de se rencontrer à Addis-Abeba en septembre pour tenir une autre session de négociations afin de résoudre le différend. L’Egypte, par la voix du porte-parole du ministère de l’Irrigation, Mohamad Ghanem, a confirmé sa participation à ce nouveau round.

Mots clés:
Lien court:

 

En Kiosque
Abonnez-vous
Journal papier / édition numérique