Des centaines d’avocats ont manifesté devant leur syndicat contre le système de facturation électronique.
Le délai d’inscription des entreprises et des professionnels indépendants au nouveau système de facturation électronique de l’Autorité fiscale égyptienne (ETA) a été prolongé du 15 décembre 2022 au 30 avril 2023 en raison du refus par six syndicats professionnels du nouveau système. Le délai vise à permettre aux négociations en cours entre les syndicats opposés au système et le ministère de Finances d’aboutir à une formule consensuelle. Le nouveau système oblige toutes les entreprises enregistrées à la Taxe sur la valeur ajoutée et vendant des biens ou des services taxables à s’enregistrer et à soumettre des factures électroniques sur le site Web de l’ETA.
Cette mesure, qui vise à numériser les services fiscaux pour lutter contre la fraude fiscale et faciliter les procédures, se heurte au refus de plusieurs professionnels. Avocats, médecins, dentistes, pharmaciens, vétérinaires et ingénieurs jugent ce nouveau système inadéquat à la nature de leur métier. Le président de l’ordre des Avocats, Abdel-Halim Allam, a déclaré que « les avocats s’opposent à l’inscription obligatoire au nouveau système pour diverses raisons valides ». Les avocats ont manifesté cette semaine à plusieurs reprises contre ce système au siège de leur syndicat dans le centre du Caire. « Les avocats dénoncent un système de facturation qui les accablerait de frais exorbitants », estime l’avocat Tareq Al-Awadi, membre du conseil d’administration du syndicat, craignant que les frais de mise en place du système puissent dépasser ce qu’un cabinet d’avocat moyen gagne en quatre mois.
Difficultés d’application
Sur les obstacles qui entravent l’application du nouveau système, Nabil Abdel-Salam, membre du conseil d’administration de l’ordre des Avocats, explique que les avocats ne facturent pas leurs clients à intervalles réguliers, et les honoraires sont généralement divisés en plusieurs versements en fonction des procédures en cours. « L’ordre des Avocats apprécie les efforts du ministère des Finances et de l’administration fiscale pour numériser le paiement des taxes. Mais il est important de souligner que l’ordre des Avocats compte 600 000 membres dont la plupart dispose d’une carte d’identité fiscale, comme l’exige le syndicat pour bénéficier de ses services », indique-t-il, ajoutant que parmi les problèmes auxquels les avocats sont confrontés figure aussi le fait que certains sont incapables de documenter tous les frais généraux qu’ils engagent dans le cadre de leur travail, tels que les frais qu’ils versent au tribunal, ceux de communication, les factures d’électricité pour leurs bureaux ou l’essence pour le transport. « Les avocats devraient être exemptés de l’inscription au système de facturation électronique parce que les procès ne sont pas des produits qu’un avocat vend au client à prix fixe. De plus, lorsqu’un avocat prend en charge une affaire, cela peut durer 10 ans. C’est aussi un facteur qui doit être pris en compte lors du calcul des impôts », argumente Abdel-Salam.
Même son de cloche chez des médecins. Moustafa Ahmed, professeur à la faculté de médecine de l’Université d’Aïn-Chams, trouve qu’il serait difficile de concevoir une facture uniforme lorsque les services varient d’une clinique privée à l’autre et parce que les honoraires varient d’un médecin à l’autre. A la suite d’une réunion d’urgence du conseil d’administration du syndicat des Médecins tenue cette semaine, un communiqué publié a précisé les revendications des médecins dont le refus d’assumer aucun frais financier et administratif qu’impliquent l’enregistrement au système de facturation électronique et l’appel à un amendement législatif rapide à la Chambre des représentants qui exclut les médecins et les professions libérales non commerciales de la facturation électronique. Pour leur part, les pharmaciens ont indiqué que le grand nombre de médicaments vendus dans les pharmacies et qui atteint 15 000 genres, y compris ceux soumis et non soumis à la Taxe de la valeur ajoutée, rend difficile la soumission d’une facture pour chaque vente. Quant aux ingénieurs, ils ont rappelé qu’il existe déjà un dossier fiscal contraignant pour toute personne qui exerce le métier. « A la première année, l’application de la facture électronique impose des frais exagérés pour l’enregistrement, l’authentification et la signature électronique. Ceci est répété chaque année, ce qui n’est pas proportionnel au niveau de revenu d’une grande tranche d’ingénieurs travaillant saisonnièrement », selon le communiqué du syndicat des Ingénieurs.
Le ministre des Finances, Mohamed Maeit, a déclaré qu’il a ordonné la création de comités conjoints du ministère et des syndicats professionnels opposés au nouveau système dont les avocats, les médecins et d’autres pour étudier le problème et trouver des solutions qui « apaisent leurs craintes ». Maeit a promis de prolonger le délai de l’entrée en vigueur du système pour les syndicats concernés au mois d’avril 2023 jusqu’à ce que les comités terminent leur travail et que le ministère prenne les décisions nécessaires concernant les mécanismes d’application en fonction de leurs recommandations.
Magdy Sakhi, sous-secrétaire de l’ordre des Avocats, a salué la décision du ministre de Finances. « Lors de la réunion avec le ministre de Finances, on a abordé les raisons du rejet de la facture électronique. Le ministre a ensuite ordonné la formation d’un comité composé de quatre personnes de l’administration fiscale et de quatre de l’ordre des Avocats pour étudier les raisons du refus du nouveau système et la possibilité de s’y conformer. Mais pour le moment, les avocats tiennent au refus de s’inscrire à ce système et leurs raisons sont valides », indique Sakhi.
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