Al-Ahram Hebdo : A l’approche du lancement officiel de la première séance du Dialogue national, comment les participants s’y préparent-ils ?
Ahmed Kamel Al-Béheiri : La structure du Dialogue a été définie et la formation des commissions sur les trois axes du dialogue (politique, économique et social) a été achevée. Les participants au dialogue organisent, dans les gouvernorats, des ateliers pour écouter les propositions des citoyens, afin de prendre en considération ces propositions, et surtout les sensibiliser à l’importance de ce dialogue qui commence dans quelques jours.
— Huit mois, n’est-ce pas une longue période pour préparer le dialogue ?
— Nous admettons que le délai a été long, mais il faut savoir que ce dialogue fait suite à une rupture de presque 7 ans entre les différentes composantes de la société, qu’il s’agisse du pouvoir ou des forces politiques. Il y a donc une certaine méfiance. Il a fallu des actions concrètes mais timides pour rétablir cette confiance, surtout avec les figures de l’opposition qui se trouvent pour la première fois impliquées de manière importante dans un travail sociopolitique. La libération des détenus est l’une des mesures qui ont contribué au rétablissement de cette confiance.
— Comment la diversité des courants politiques se reflétera-t-elle sur le dialogue ?
— La présence de nombreux partis enrichit le dialogue. Cet espace réservé aux discussions constructives est la voie vers la réforme politique, économique et sociale souhaitée. Les résultats du dialogue seront l’expression de tous ces courants politiques.
— Quels sont les dossiers prioritaires qui seront abordés ?
— L’aspect politique est, à mon avis, le plus important, car ce dialogue est avant tout politique. Les cinq comités qui travaillent sur les dossiers politiques se sont entendus sur la nécessité d’amender certaines législations. Il s’agit d’abord de la loi sur les élections parlementaires. Nous avons besoin d’un scrutin électoral proportionnel de liste plutôt que celui des listes fermées et absolues. Ce système permet une réelle représentation des courants politiques au parlement.
Il faut également modifier le Code pénal, notamment l’article sur la détention provisoire, l’une des principales pommes de discorde entre le pouvoir et les partis d’opposition. Il faut absolument réduire la durée des détentions provisoires comme l’exige la stratégie nationale des droits de l’Homme lancée par l’Etat. La loi sur les municipalités et celle sur la liberté des médias figurent aussi parmi les priorités dans l’axe politique.
— Et comment l’aspect économique sera-t-il abordé ?
— Changer les législations et les politiques nécessite de longues années. Raison pour laquelle il faut plutôt travailler sur des mesures dont les résultats seront rapidement ressentis par la rue égyptienne et qui permettent d’alléger le fardeau qui pèse sur les citoyens. Par exemple, le comité économique peut proposer la suspension temporaire (et non l’annulation) de la taxe sur la valeur ajoutée uniquement sur les produits de base. Cela permettra de réduire les prix de 14 % sur les denrées alimentaires de base et les médicaments.
— Existe-t-il des mécanismes qui permettent de mettre en oeuvre les recommandations du dialogue ?
— Malheureusement, nous n’avons pas de véritables mécanismes, mais nous travaillons à l’invitation du président de la République. Nos recommandations seront soumises au président, qui aura recours à son pouvoir constitutionnel pour les mettre en oeuvre. Les projets de loi seront soumis au parlement et de nouvelles mesures seront prises par décrets présidentiels. Nous avons d’énormes espoirs que nos recommandations seront mises en vigueur.
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