700 prisonniers ont bénéficié de la grâce présidentielle depuis avril dernier.
Plus de 700 prisonniers ont bénéficié d’une grâce présidentielledepuis l’appel du président Abdel-Fattah Al-Sissi, le 26 avril dernier, à un dialogue national et la relance des travaux du comité de grâce. Cette semaine, 25 nouveaux prisonniers ont été libérés. Formé en octobre 2016, le comité est composé de 5 membres. Sa mission: examiner le dossier des prisonniers politiques non impliqués dans des crimes terroristes en vue d’une libération. Depuis qu’il a repris ses travaux en mai 2022, le comité a élargi sa coopération avec les institutions de l’Etat et les ONG. Tout prisonnier auquel s’appliquent les conditions de grâce peut désormais présenter une demande de pardon directement aux membres du comité ou à travers les sites électroniques de la Conférence nationale de la jeunesse, du Conseil national des droits de l’homme, et ceux des comités des droits de l’homme du parlement et du Sénat.
Parmi les figures ayant bénéficié de la grâce présidentielle se trouvent les militants Hossam Moëness et Yéhia Abdel-Hadi. D’autres noms comme Alaa Abdel-Fattah, Ahmad Douma et Ziyad Al-Oleimi, figures de proue de la Révolution de 2011, sont sur les listes de libération, selon l’avocat Tareq Al-Awadi, membre du comité. Selon Al-Awadi, les listes comprennent également des journalistes de la chaîne qatari Al-Jazeera et des membres du Mouvement des jeunes du 6 avril.
Des conditions très précises
L’expert constitutionnel Salah Fawzi explique que selon l’article 155 de la Constitution, le président de la République, après avis du Conseil des ministres, détient le droit de grâce et de réduction des peines. « Des conditions très précises gèrent le processus de grâce présidentielle. Toute personne ayant été définitivement condamnée pour infraction à la loi comme la participation à une manifestation non autorisée, l’appel à des rassemblements illégaux ou pour délit de publication peut bénéficier d’une grâce présidentielle. Le chef de l’Etat peut alléger sa peine ou la libérer », explique Fawzi. Et d’ajouter: « Les personnes placées en détention pour affiliation à une organisation terroriste ou pour actes de violence ne sont pas concernées par la grâce présidentielle ».
Concernant les personnes placées en détention provisoire, Fawzi souligne qu’elles sont également exclues. « Les personnes qui font l’objet d’une enquête du Parquet ne peuvent bénéficier de la grâce présidentielle. Ces personnes ne font l’objet d’aucun jugement qui peut être allégé ou supprimé », explique-t-il.
Tareq Al-Khouli, député, membre du comité de coordination des jeunes des partis politiques et membre du comité de grâce présidentielle, affirme que des appels ont été lancés dans le cadre du dialogue national pour modifier les critères de détention provisoire. « Nous avons présenté des alternatives comme l’interdiction de voyage ou l’assignation à résidence qui sont des solutions admissibles pour des personnes qui ne font l’objet d’aucune condamnation. Ces propositions seront présentées au parlement pour étude », affirme Al-Khouli.
Intégration sociale
Le comité de grâce coopère avec les différentes institutions afin de suivre les conditions sociales de chaque détenu afin d’assurer sa réintégration au sein de la société, affirme en outre Al-Khouli. « Nous travaillons actuellement au sein du comité pour que les étudiants regagnent leurs universités, pour que les fonctionnaires retrouvent leur travail et pour que les politiciens pratiquent à nouveau la politique », indique Al-Khouli, qui ne nie pas l’existence de difficultés. « Il faut avouer que nous sommes confrontés à de multiples difficultés, notamment dans les universités dont les règlements interdisent aux étudiants ayant été condamnés à des peines de prison de rejoindre leurs classes. Par ailleurs, certains emplois rejettent les personnes qui ont des antécédents judiciaires. Ces entraves doivent être éliminées à travers de nouvelles législations qui prennent en considération la situation des personnes graciées », trouve le député.
Al-Khouli estime que, politiquement, la reprise des grâces présidentielles est un message clair qui dénote de la volonté de l’Etat d’appliquer la stratégie des droits de l’homme nouvellement adoptée et de créer un climat favorable au dialogue national qui a pour principal objectif d’élaborer une nouvelle feuille de route de la vie politique, économique et sociale en Egypte. « Ces grâces vont créer des ponts de confiance entre les dirigeants politiques et les militants. Ils envoient un message de tolérance aux jeunes militants qui ont été impliqués dans des activités illégales. Une nouvelle chance pour normaliser la vie politique », estime encore Al-Khouli. C’est dans ce contexte que le Conseil national des droits de l’homme a annoncé dans un communiqué que « la réactivation du comité et l’élargissement de son champ de travail confirment qu’il existe une réelle intention de clore un dossier qui tend à déformer l’image de l’Egypte à l’étranger et à avoir des effets négatifs sur toute possibilité de mener un dialogue politique efficace ».
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