Lors de sa rencontre avec Abdelhamid Dbeibah, le président Sissi a souligné l’importance de tenir les élections libyennes à la date prévue.
Ahmed Eleiba*
Le dynamisme que mène Le Caire dans le dossier libyen est lié à la phase décisive que traverse le processus de transition politique en Libye. Conformément à la feuille de route, les élections devront se tenir le 24 décembre prochain. Une échéance cruciale, discutée au Caire le 14 septembre entre le président Abdel-Fattah Al-Sissi, le président du parlement libyen, Aguila Saleh, et le commandant en chef de l’Armée nationale libyenne, le maréchal Khalifa Haftar. Ce dynamisme est également lié au renforcement du partenariat stratégique égypto-libyen qu’a témoigné la tenue de la Haute Commission mixte le 16 septembre. Présidant la délégation libyenne, le chef du gouvernement libyen, Abdelhamid Dbeibah, a rencontré le président Sissi qui lui a réaffirmé « la priorité qu’accorde l’Egypte au rétablissement de la stabilité en Libye de façon à reprendre son rôle régional et international ».
A constater qu’à l’encontre d’autres parties impliquées dans le dossier libyen, l’Egypte adopte une approche globale qui ne se limite pas à la tenue des élections, mais qui s’étend à l’exécution de toutes les étapes de la feuille de route : unifier les institutions libyennes, traiter le dossier des milices armées, mettre un terme à l’ingérence et à la présence militaire étrangères. Des aspects négatifs qui, selon Le Caire, risquent à l’avenir d’affecter le processus politique. Le Caire tient à assurer que le scénario de 2012 ne se reproduira pas. Une tendance aussi liée aux considérations de la sécurité nationale égyptienne, vu que la persistance d’une telle situation se répercutera directement sur l’Egypte.
Par ailleurs, il est prévu que le maréchal Haftar annonce sa candidature à l’élection présidentielle. En vertu de la loi, il devra renoncer à son poste 3 mois avant la tenue des élections. Ce qui implique d’informer Le Caire des arrangements du commandement général libyen au cours de la prochaine période, surtout qu’il existe des procédures relatives à la coordination avec l’Egypte sur la sécurité des frontières. C’est dans ce contexte que le communiqué de la présidence a souligné que Le Caire reste à la même distance de toutes les parties libyennes et tend les ponts de dialogue avec toutes les parties pour rapprocher les points de vue entre les protagonistes libyens, de façon à respecter les échéances de la feuille de route. D’où la présence cette semaine au Caire en même temps de plusieurs dirigeants libyens. Le principal objectif de l’Egypte est d’éviter de voir la naissance d’un gouvernement à l’instar de celui de l’entente nationale ou de voir resurgir des conflits politiques ou armés.
Nouvelle vision
Sur un autre volet, l’accalmie dont témoigne la phase transitoire a contribué à la formation d’une nouvelle vision chez les forces internationales impliquées dans le dossier libyen, basée sur l’entente et la coordination au niveau des intérêts économiques et sécuritaires. Ce qui nécessite évidemment la présence d’un pouvoir central unifié apte à communiquer avec toutes les parties, mais aussi à remédier à l’état de fragilité sécuritaire en Libye ; une fragilité qui s’est répercutée sur la sécurité régionale et européenne, notamment avec des tensions aux frontières, le terrorisme et les migrations clandestines.
Aujourd’hui, toutes les parties estiment que la phase à venir est celle du partage des intérêts économiques dans le cadre du plan de reconstruction de la Libye qui, selon les estimations de l’Union européenne, dépassera les 100 milliards de dollars. Pour l’Egypte, assurer le développement en Libye nécessite une stabilité politique et sécuritaire permettant une distribution équitable des richesses et des revenus. C’est dans ce contexte que la panoplie d’accords de coopération, signés en marge de la Haute Commission conjointe égypto-libyenne d’une valeur préliminaire de plusieurs milliards de dollars, reflète la volonté des deux pays de hisser le niveau de leur coopération économique. A conclure que les arrangements égypto-libyens effectués cette semaine ont été importants pour les deux pays pour soutenir le processus politique en Libye, assurer la stabilité régionale et développer la coopération bilatérale dans un cadre plus large.
*Expert au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram.
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