Le ministre de la Défense inspecte le pavillon militaire égyptien à l’exposition IDEX 2021, tenue du 21 au 25 février à Abu-Dhabi.
Ahmed Eleiba*
L’Egypte a participé à la 15e édition de l’exposition internationale des industries défensives et militaires IDEX 2021 et à l’exposition maritime internationale NAVDEX 2021, tenues du 21 à 25 février à Abu-Dhabi. Les trois bras de l’industrie nationale militaire égyptienne, à savoir le ministère d’Etat pour la Production militaire, l’Organisme Arabe de l’Industrialisation (OAI) et la Société arabe internationale pour l’optronique étaient présents au pavillon égyptien de l’exposition. L’Egypte y a exposé ses plus récents produits. Il s’agit de blindés chenillés (Sinaï 200, ST 100 et ST 500), et d’autres à roues, ainsi que d’autres types de munitions (légères, moyennes et lourdes) fabriquées par les 17 usines dépendant du ministère de la Production militaire.
Une délégation de haut niveau, présidée par le ministre de la Défense, le général Mohamad Zaki, et regroupant le ministre d’Etat pour la Production militaire, l’ingénieur Mohamad Ahmad Morsi, et le commandant des forces maritimes, le général Ahmad Khaled, a représenté l’Egypte à cet important événement militaire. En marge de l’exposition, le général Mohamad Zaki a rencontré son homologue émirati, Mohamad Al-Bawardi, et le chef d’Etat-major des forces armées émiraties, Hamad Al-Romaïssi. Les entretiens égypto-émiratis ont porté sur les moyens de renforcer la coopération militaire entre les deux pays ainsi que sur le renforcement de la coopération bilatérale dans les domaines militaires et technologiques. Le ministre égyptien de la Défense a d’ailleurs rencontré ses homologues français, serbe et chypriote. Il s’est de même entretenu avec le président exécutif du groupe émirati Edge qui organise l’événement, le président de l’Union des compagnies européennes productrices de missiles (MBDA), la délégation de la compagnie américaine Boeing, ainsi que le président du groupe émirati International Golden Group (IGG), spécialisé dans les industries de défense militaire. Le général Zaki, accompagné de l’amiral Ahmad Khaled, a également visité le pavillon de la compagnie Fincantieri NexTech, la plus grande compagnie spécialisée dans la fabrication des sous-marins et des navires. La délégation égyptienne a visité la compagnie émiratie Al-Hamra, spécialisée dans la Cybersécurité.
De façon générale, les expositions miliaires sont une occasion de s’informer sur les dernières nouveautés dans le domaine des industries défensives et sont surtout une importante passerelle vers les marchés régionaux et mondiaux. Il s’agit également de plateformes régionales et internationales pour discuter des événements contemporains et partager les visions et les expériences. Cette année, l’Egypte a présenté des modèles de chars fabriqués localement à 100 %, alors qu’il y a quelques années, le pourcentage de composants locaux ne dépassait pas les 70 %. Leur viabilité a été testée en Egypte à travers des opérations militaires sur le terrain, prouvant un haut niveau de sécurité pour les soldats, que ce soit pendant les opérations ou pendant le transport. Ces chars ont été expérimentés dans le désert du Golfe et plus particulièrement en Arabie saoudite. L’Egypte tente de développer ses équipements militaires afin de répondre aux besoins locaux avant tout, et de commercialiser sa production à l’étranger.
Une nouvelle stratégie
La participation égyptienne a été élargie cette année pour inclure l’exposition de la défense maritime (NAVDEX), qui comprenait cette année 17 pièces de pays différents (démineurs, frégates, patrouilleurs et navires de ravitaillement). La présence de l’Egypte à cet événement international reflète sa volonté d’entrer en force dans le domaine de la commercialisation militaire qui était très limité auparavant. Autrefois, la participation de l’Egypte aux expositions militaires se limitait à visiter les pavillons des expositions militaires internationales, mais elle n’a jamais exposé ses propres produits militaires. Les choses ont commencé à changer depuis sa participation en 2017 à l’exposition D’Abu-Dhabi. En 2018, l’Egypte a accueilli, pour la première fois, l’exposition IDEX, ce qui l’a placée sur la carte des expositions de la défense militaire pour la première fois de son histoire. En 2019, elle a participé pour la deuxième fois aux Emirats. Et il était prévu que l’Egypte lancerait la seconde édition de son exposition, mais celle-ci a été reportée à 2022 à cause de la pandémie de Covid-19.
Le pavillon de la compagnie Fincantieri NexTech, spécialisée dans le domaine de la fabrication des sous-marins et des navires.
La participation de l’Egypte à cette exposition reflète le développement de la coopération militaire égypto-émiratie. Il s’agit d’un partenariat militaire qui se manifeste dans les exercices militaires conjoints bilatéraux ou au niveau des arrangements relatifs à la sécurité régionale contre les risques et les menaces potentiels. Les deux pays coordonnent principalement en matière de lutte contre le terrorisme. C’est dans ce contexte que la participation des Emirats arabes unis aux exercices Medusa avec l’Egypte, la Grèce et Chypre était remarquable, alors que l’Egypte participe à la plupart des exercices conjoints avec les Emirats arabes unis, que ce soit au niveau des pays du Golfe ou des pays arabes.
Par ailleurs, ces expositions ont une autre dimension, à savoir l’échange des expertises entre les pays participants. Le niveau du progrès d’un pays dans le domaine militaire est mesuré en fonction du nombre de rencontres effectuées par les responsables avec les compagnies militaires du monde entier. Le facteur technologique est l’un des critères d’évaluation. C’est l’une des priorités du preneur de décision égyptien à l’heure actuelle. A cela s’ajoute la sécurité des informations et l’impossibilité de les pénétrer. D’ailleurs, ces expositions sont des plateformes importantes de rencontres entre les leaders militaires et accueillent également les fabricants. Elles offrent donc une opportunité aux différents pays de signer des contrats d’exportation d’armes et des protocoles de coopération militaire.
Il est important de souligner que l’Egypte est entrée dans le domaine de l’industrialisation militaire avancée dans le cadre de partenariats internationaux, et a réalisé un grand essor dans ce domaine. A titre d’exemple, l’Egypte fabrique, conjointement avec la France, la frégate Gowind, en coopération entre l’arsenal maritime d’Alexandrie et le groupe français Naval Group. L’Egypte s’oriente également vers des projets conjoints avec l’Italie et l’Allemagne dans le domaine de la construction des frégates à multiples missions.
Le classement avancé de l’armée égyptienne à l’échelle mondiale rend nécessaire l’adoption de critères avancés au niveau de l’armement. C’est pourquoi l’Egypte doit développer son armement et en même temps acquérir des systèmes militaires internationaux avancés de façon à répondre aux besoins de la défense.
C’est pourquoi l’Egypte a oeuvré, au cours de cette dernière décennie, à diversifier les sources d’armement, une nécessité stratégique reflétée par l’intérêt qu’elle accorde aux expositions militaires internationales, mais aussi au développement de ses relations militaires avec les pays du monde. Ces relations sont aujourd’hui un outil efficace de la politique étrangère dans une région en proie aux troubles sécuritaires et qui grouille de crises et de conflits.
*Président de l’Unité d’armement au Centre égyptien de la pensée et des études stratégiques.
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