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Citoyenneté : Le pari gagné

May Al-Maghrabi, Mercredi, 13 janvier 2021

En félicitant le pape Tawadros à l’occasion de Noël, le président Sissi a mis l’accent sur l’importance de l’unité nationale. Parallèlement, le Conseil des ministres a dressé un bilan des efforts déployés par l’Etat entre 2013 et 2020 pour consolider l’Etat-nation à tous les niveaux.

itoyenneté : Le pari gagné
Rencontre virtuelle, le 6 janvier, entre le président Sissi et le pape Tawadros II, à l’occasion du Noël copte.

Le président Abdel-Fattah Al-Sissi a tenu à partager avec les coptes la célébration de Noël, une tradition qu’il maintient depuis 2015. « Il faut oeuvrer à conserver l’unité nationale, surtout que les forces du mal croient pouvoir y porter atteinte en la frappant », a prévenu le président lors d’une rencontre virtuelle tenue, mercredi 6 janvier, avec le pape Tawadros II, patriarche de l’Eglise copte orthodoxe, pour le féliciter à l’occasion du Noël copte. Le président a d’ailleurs souligné son engagement à donner l’exemple de l’Etat-nation en ancrant les principes de diversité idéologique et religieuse. « L’identité religieuse de tout citoyen égyptien ne doit avoir aucun impact sur ses droits ou ses devoirs », a t-il affirmé. De son côté, le pape Tawadros II a remercié le président Sissi de tenir à la tradition de féliciter en personne les coptes, soulignant « la valeur de ce geste et les messages qu’il envoie sur l’engagement du président de la République à préserver l’unité nationale et les principes de citoyenneté qui sont l’un des facteurs de la force de l’Egypte ».

Une participation virtuelle du président Sissi à la célébration de Noël qui vient confirmer son engagement à l’établissement des piliers de l’Etat-nation. Un engagement démontré par le rapport du Conseil des ministres publié le 6 janvier, énumérant les mesures prises par l’Etat depuis la Révolution du 30 juin 2013 jusqu’à fin 2020, aux niveaux politique, social et législatif, en vue d’instaurer l’Etat-nation, basé sur l’égalité entre les citoyens et la coexistence pacifique entre les religions. Le rapport affirme que, grâce aux efforts déployés par l’Etat, l’Egypte est devenue « un modèle de l’Etat-nation », efforts qui lui ont valu « l’appréciation de la communauté internationale », selon le rapport, qui souligne également que l’Egypte maintient de bons rapports avec le Vatican dans le cadre du dialogue interreligieux.

Pas concrets

Aujourd’hui, ces principes se sont transformés en des politiques concrètes, comme l’argumente le rapport qui passe en revue les initiatives étatiques prises dans ce sens. Au niveau législatif, la loi unifiée sur le statut personnel des chrétiens en cours d’élaboration par les trois Eglises (orthodoxe, catholique et protestante) et le ministère de la Justice représente une importante évolution législative citée par le rapport. Est notamment citée la loi sur la construction des églises, promulguée en 2016 et qui détermine les conditions et les procédures nécessaires pour la construction des églises, ainsi que celles sur la régularisation du statut des églises construites avant sa promulgation. Une loi qui est venue répondre à « un droit et une revendication des coptes qui persistait depuis 150 ans ». Ainsi, depuis son entrée en vigueur et jusqu’à fin 2020, le statut de 1 800 églises et annexes a été régularisé. Aussi, la plus grande cathédrale au Moyen-Orient a été construite dans la Nouvelle Capitale administrative. Et, au total, 40 églises ont été construites alors que 34 autres sont en cours de construction dans les nouvelles villes entre juillet 2014 et décembre 2020. Sans compter la restauration de toutes les églises visées par des attaques terroristes en 2013. Le rapport fait également référence à la formation par le président Sissi d’un haut comité pour la lutte contre les conflits sectaires ainsi qu’à ses directives d’annuler les textes incitant à la violence et à l’extrémisme des programmes scolaires.

Au niveau constitutionnel, le rapport met en relief les plus importants articles des différentes Constitutions de l’Egypte, dont celle de 2014 qui est venue renforcer les principes de citoyenneté et garantir la liberté de culte. Entre autres, il cite l’article 64, stipulant que « la liberté de croyance est absolue. La liberté de la pratique religieuse et l’édification des lieux de culte pour les fidèles des religions célestes sont un droit organisé par la loi ». Sur l’égalité, l’article 53 stipule que les citoyens sont égaux devant la loi, en droits, en libertés et en devoirs publics, sans aucune discrimination. « La discrimination et l’incitation à la haine sont des crimes pénalisés par la loi, et l’’Etat assure les mesures nécessaires pour éliminer toutes formes de discrimination », ajoute l’article.

Emanant de ces principes constitutionnels, le rapport met en relief l’augmentation de la représentation des chrétiens au parlement avec 31 députés élus au Conseil des députés de 2021 contre 5 en 2012, alors qu’au Sénat, le nombre de sièges remportés par des chrétiens a été de 24 en 2020, contre 15 en 2012.

Indices positifs

Des efforts qui ont surtout eu des portées tangibles sur la stabilité, comme l’indique le rapport, se référant aux indices internationaux. Selon un rapport de la Commission américaine des libertés religieuses internationales, l’Egypte a connu une baisse de 29 % de la violence sectaire entre 2018 et 2019 et est sortie du classement des pays où la situation est « préoccupante » pour la quatrième année consécutive. D’ailleurs, l’évaluation de l’Egypte sur l’indice de stabilité politique et d’absence de violence dans le rapport sur la gouvernance de la Banque mondiale est passée à 12,9 points en 2019, 12,4 points en 2018, 9,1 points en 2017 et 2016, 8,6 points en 2015, 7,6 points en 2014, 7,1 points en 2013, 7,6 points en 2012 et 6,6 points en 2011. D’ailleurs, l’Egypte a progressé de 14 positions, occupant la 100e classe en 2020, contre la 114e en 2014, sur l’indice de sécurité et de paix sociétale de l’Institut pour l’économie et la paix.

Des avancées positives appréciées par les chrétiens d’Egypte, comme l’affirme l’intellectuel copte Kamal Zakher. Selon lui, l’ensemble des politiques adoptées depuis 2014 reflète une volonté politique sincère du régime d’apporter des solutions cruciales aux problèmes dont se plaignaient les chrétiens depuis des décennies. « La discrimination et la marginalisation sont des maux parmi d’autres dont ont souffert les chrétiens. Auparavant, ils étaient écartés des postes-clés, la construction et la restauration des églises était interdite, etc. Des inégalités qui faisaient d’eux des citoyens de second degré, ce qui n’est plus le cas aujourd’hui », avoue Zakher. Par ailleurs, il trouve que le renforcement de l’Etat-nation relève de la sécurité nationale et non seulement d’un principe démocrate ou d’un droit constitutionnel et humain. « Raviver les tensions sectaires est une carte souvent jouée pour déstabiliser ou fragiliser un régime quelconque. C’est dans ce contexte que l’engagement du régime de traiter ce dossier a réussi à faire avorter les complots tissés, depuis 2013, visant à frapper l’unité nationale et, par la suite, la stabilité du pays », indique Zakher. Mais pour l’intellectuel, « si l’Etat a jeté les fondements de l’Etat-nation, sa concrétisation dépend de la conscience du citoyen de l’importance de la diversité et de l’acceptation de l’autre, un défi idéologique que médias et institutions éducatives doivent relever ».

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