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Nouvelles perspectives de coopération

May Al-Maghrabi, Mercredi, 02 décembre 2020

Pour sa première visite au Soudan du Sud depuis la création de ce pays, le président Abdel-Fattah Al-Sissi s’est entretenu avec son homologue Salva Kiir des moyens de relancer la coopération bilatérale et de soutenir la paix et la stabilité régionales.

Nouvelles perspectives de coopération
Les présidents Sissi et Kiir lors d’une conférence de presse conjointe tenue samedi 28 novembre, à l’issue de leurs négociations à Juba.

Pour sa première visite au Soudan du Sud depuis la création de ce pays, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a été accueilli, samedi 28 novembre, à l’aéroport de Juba par le président Salva Kiir. Les deux présidents ont tenu une séance de pourparlers à huis clos au palais présidentiel, suivie d’une séance de négociations élargie en présence des délégations des deux pays. La coopération bilatérale, les dossiers régionaux d’intérêts communs, le processus de paix au Soudan du Sud et la situation dans la Corne de l’Afrique ainsi que le barrage éthiopien de la Renaissance étaient au menu des discussions. Le président Sissi a de même rencontré le premier vice-président soudanais, Riek Machar, évoquant notamment le soutien de l’Egypte aux efforts destinés à concrétiser l’accord de paix de Juba conclu en octobre dernier.

« Cette visite s’inscrit dans le cadre des relations stratégiques entre les deux pays », a déclaré le président Sissi lors d’une conférence de presse conjointe avec son homologue sud-soudanais. De son côté, le président Kiir a loué le soutien de l’Egypte à son pays, notamment les aides humanitaires. Il a souligné l’importance du soutien technique offert par l’Egypte à son pays. Le président Sissi a affirmé l’engagement de l’Egypte à transférer l’expérience égyptienne au Soudan de Sud. En octobre dernier, le premier ministre Moustapha Madbouli s’était mis d’accord avec le ministre sud-soudanais de l’Irrigation, Manawa Peter, pour former un haut comité mixte qui tiendra sa première réunion au Caire avant la fin de l’année, pour étudier les mécanismes d’accroître les investissements bilatéraux.

Au niveau régional, les négociations ont abordé la situation dans le bassin du Nil et la région de la Corne de l’Afrique. Salva Kiir a loué « les initiatives » de l’Egypte visant à exhorter la communauté internationale à respecter ses engagements envers la paix au Soudan du Sud. De son côté, le président Sissi a réitéré « le plein soutien de l’Egypte aux efforts de paix au Soudan du Sud ». « Les deux présidents ont, par ailleurs, discuté de la question de l’eau du Nil et des négociations sur le barrage de la Renaissance. Ils ont souligné la nécessité de conclure un accord juridique contraignant et équilibré sur le remplissage et l’exploitation du barrage et de renforcer la coopération autour du Nil de façon à réaliser les intérêts de tous les pays du bassin du Nil », a déclaré le président Sissi.

Intérêts mutuels

Selon Amira Abdel-Halim, vice-présidente du département des études africaines au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, le Soudan du Sud détient depuis son indépendance 70 % des richesses pétrolières de l’ancien Soudan, et possède des frontières avec les pays de l’Afrique de l’Est, d’où son importance stratégique. « Vu sa position géopolitique sur la mer Rouge et le bassin du Nil, le Soudan du Sud représente une profondeur sécuritaire et stratégique pour l’Egypte », explique-t-elle.

La visite du président Sissi intervient sur fond de conflits au Tigré éthiopien et ses répercussions sur le sort des négociations sur le barrage de la Renaissance déjà dans l’impasse, ainsi que sur la sécurité nationale égyptienne. « La visite vise à coordonner avec les pays de la Corne de l’Afrique pour préserver les intérêts de l’Egypte. La coordination avec Juba est très importante, alors que des milliers de Tigréens fuient vers les pays de la Corne de l’Afrique, le Soudan et le Soudan du Sud. Il n’est pas exclu que parmi les déplacés éthiopiens il y ait des éléments armés », explique Abdel-Halim. Elle note que le rapprochement entre les deux pays s’inscrit aussi dans le cadre de la politique africaine de l’Egypte adoptée en 2014 et qui vise à retrouver son influence sur le continent noir. Sur un autre volet, Abdel-Halim trouve qu’en parrainant la paix au Soudan du Sud, l’Egypte acquiert indirectement l’estime et le soutien de la communauté internationale dans le dossier du barrage éthiopien. « Bien que le Soudan du Sud tente de rester à la même distance de l’Egypte et de l’Ethiopie, son refus de ratifier l’accord d’Entebbe en 2010, qui remet en cause les quotas historiques de l’Egypte et du Soudan dans les eaux du Nil, fait qu’il est plus proche de la position égyptienne », note-t-elle.

Le Soudan du Sud est en quête de reconstruction, et il a aussi intérêt à développer ses relations avec l’Egypte, un pays voisin influent sur la scène régionale et internationale. « Le soutien politique de l’Egypte au Soudan du Sud renforce sa légitimité internationale et contribue à l’instauration d’une paix durable », étaye-t-elle.

Concernant la coopération bilatérale évoquée lors du sommet Sissi-Kiir, l’ambassadeur Mohamad Al-Orabi indique que le Soudan de Sud est riche en ressources naturelles, notamment en pétrole, et il possède des terrains parmi les plus fertiles au monde, alors que l’Egypte possède l’expérience et les compétences techniques dont a besoin Juba en cette phase où le pays cherche à se développer. « Ces atouts favorisent les investissements entre les deux pays dans les domaines de l’infrastructure, de l’industrie agricole, de l’exploitation minière et du commerce, surtout que le Soudan du Sud, après l’instabilité et la guerre civile qu’a connue le pays pendant des années, veut se lancer dans le développement », souligne Al-Orabi. D’où, selon lui, l’importance de la visite du président Sissi à Juba qui a permis « d’explorer et d’identifier les domaines de coopération bilatérale, alors qu’au niveau politique, elle a permis d’unifier les positions, notamment sur le dossier du barrage de la Renaissance et les changements régionaux dans la Corne de l’Afrique », conclut le diplomate.

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