Le président abdel-fattah al-sissi est arrivé, dimanche, à Berlin pour participer à la conférence du G20, tenue dans le cadre du Pacte du G20 avec l’Afrique. Un programme lancé en juin 2017 à l’initiative de la chancelière allemande, Angela Merkel, avec pour objectif de promouvoir les investissements privés en Afrique, notamment dans le domaine des infrastructures. A ce jour, douze pays africains sont engagés dans cette initiative, dont l’Egypte. Le G20 représente 85 % de l’économie mondiale, 80 % du commerce international et les deux tiers de la population.
La visite du président Sissi à Berlin et sa participation aux travaux du G20, les 19 et 20 novembre, ont un double enjeu puisqu’il y prend part en sa qualité de président de l’Egypte et de président de l’Union africaine. A Berlin, il fut question du renforcement de la coopération bilatérale avec l’Allemagne, un important partenaire de l’Egypte dans plusieurs domaines, ainsi que de la stimulation des investissements destinés à l’Afrique et des dossiers bilatéraux, régionaux et internationaux d’intérêt commun, avec les leaders du monde participant à cette plateforme.
Agenda chargé
Lundi, le président s’est entretenu avec Eckart Von Klaeden, vice-président de la société Mercedes-Benz, des opportunités de développement de la firme allemande en Egypte. Le chef de l’Etat s’est entretenu également avec une délégation de l’Union fédérale allemande des industries de la sécurité et de la défense des perspectives de coopération militaire entre les deux pays, notamment le lancement de projets entre l’Union, le ministère égyptien de la Production militaire et l’Organisme arabe pour l’industrialisation. En outre, le président a pris part à un dialogue mardi à Berlin, afin de discuter des possibilités d’améliorer l’environnement des affaires et d’accroître l’investissement du G20 en Afrique. A noter que le volume des investissements allemands en Egypte a atteint 7,4 milliards d’euros en juin 2018 et devrait atteindre 11 milliards d'euros fin 2019, selon le président de la Chambre de commerce et d’industrie allemande. L’industrie représente 61 % des investissements allemands et la coopération égypto-allemande en matière de projets de développement est à la hauteur de 2,4 milliards d’euros.
Les activités du président Sissi ont inclus une visite lundi au Bundestag (le siège du parlement allemand), où il a été reçu par son président, Wolfgang Schäuble, et des députés allemands. Les discussions ont porté sur le renforcement de la coopération parlementaire et l’échange des expertises entre les deux pays. La lutte contre le terrorisme, l’immigration illégale et les crises régionales ont été au centre des pourparlers lundi au siège de la présidence allemande entre le président Sissi et son homologue allemand, Frank-Walter Steinmeier. Lors de la rencontre, le président Sissi a exprimé la volonté de l’Egypte de « renforcer la coopération bilatérale dans maints domaines, notamment économique, à la lumière de la réussite du programme de réforme économique de l’Egypte ». De son côté, le président allemand a indiqué que son pays « soutenait le processus de développement en Egypte par le biais des investissements conjoints et l’échange des expertises ». Les deux présidents ont passé en revue les derniers développements en Syrie et en Libye ainsi que la cause palestinienne. Les deux dirigeants ont été d’accord sur la nécessité de parvenir à un règlement équitable et global conforme aux résolutions internationales. Par ailleurs, le président allemand a loué les efforts de l’Egypte visant à régler les crises régionales, à lutter contre le terrorisme et à stopper l’immigration illégale, de même que ses efforts pour diffuser la culture de la tolérance religieuse et du vivre-ensemble. Les deux présidents ont ensuite assisté à un dîner de travail, organisé par le président allemand en l’honneur des chefs d’Etat participant à la conférence du Pacte du G20 avec l’Afrique (CWA). Mardi, le président Sissi a rencontré la chancelière allemande, Angela Merkel. Il a participé aux travaux du sommet du G20 et a prononcé le discours de l’Egypte. Selon le politologue Hassan Salama, la visite du président Sissi en Allemagne et sa participation aux travaux du G20 représentent « l’occasion pour l’Egypte d’inclure le point de vue de l’Afrique aux discussions du G20 sur des questions mondiales qui affectent directement les perspectives économiques et le développement du continent africain ». D’ailleurs, l’Egypte en profitera pour promouvoir les opportunités d’investissement au pays, souhaite le politologue. Selon lui, la visite du président en Allemagne est hautement positive.
Egypte-Emirats, 20 milliards de dollars d’investissements
Quelques jours avant son déplacement en Allemagne, le président Abdel-Fattah Al-Sissi avait achevé une visite réussie de deux jours aux Emirats arabes unis où il a été décoré de l’Ordre de Zayed, plus haute médaille décernée aux Emirats arabes unis. La visite s’est soldée par la signature de trois protocoles de coopération dans les domaines de la main-d’oeuvre, des impôts et des assurances sociales ainsi que la création d’une plateforme d’investissement de 20 milliards de dollars. Cette plateforme est destinée à « mettre en oeuvre des projets économiques et sociaux vitaux pour les deux pays », a indiqué le prince héritier d’Abu-Dhabi, cheikh Mohamad bin Zayed Al Nahyan, sans toutefois préciser les niveaux de participation respectifs des deux pays. « Le nouveau fonds d’investissement devrait être géré par Abu Dhabi Development Holding Company et le Fonds souverain d’Egypte. Il servira à lancer des projets d’investissement stratégiques communs, des fonds spécialisés et des outils d’investissement dans un certain nombre de secteurs dont l’industrie, l’énergie, les télécommunications, la technologie, l’immobilier, les services logistiques et les infrastructures. A noter qu’aujourd’hui, le volume des échanges commerciaux bilatéraux s’élève à 5,3 milliards de dollars, alors que les investissements émiratis directs en Egypte s’élèvent à 7,6 milliards de dollars », souligne l’expert économique Rachad Abdou.
Selon lui, il s’agit d’un mécanisme qui favorise l’augmentation des investissements communs. « Cette plateforme permettra d’investir des fonds dans des projets de développement bilatéraux et permet aux deux pays de décider ensemble des domaines d’investissement alors qu’auparavant, c’était le pays qui accorde le don ou le prêt qui choisissait le domaine d’investissement », indique Abdou. Mostafa Abou-Zeid, directeur du Centre égyptien pour les études économiques, ajoute que la création de cette plateforme permettra d’échanger les expériences entre les deux pays en matière de fonds souverains.
La sécurité régionale, une priorité
Au niveau politique, le président Sissi et le cheikh Bin Zayed ont tenu une séance de négociations jeudi en présence des délégations des deux pays. Selon le communiqué de la présidence, les deux leaders ont discuté des crises régionales et de la lutte contre le terrorisme. Lors de la rencontre, le président Sissi a affirmé que « l’Egypte ne tolérera aucune atteinte à la sécurité et à la stabilité des pays du Golfe qui font partie intégrante de la sécurité nationale de l’Egypte ». De son côté, cheikh Bin Zayed a loué le rôle axial de l’Egypte dans la défense de la sécurité régionale ainsi que ses positions soutenant les Emirats.
Selon Tarek Fahmi, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, l’engagement de l’Egypte à défendre la sécurité du Golfe est un message fort à l’Iran qui cherche à déstabiliser la région. « Il intervient au moment où les Etats-Unis ont annoncé la création d’une force maritime internationale dans le détroit d’Ormuz pour escorter les navires et les protéger des agressions iraniennes répétitives », affirme Fahmi. Même si l’Egypte n’a pas annoncé si elle fera partie de cette coalition, les déclarations du président sont un message selon lequel l’Egypte demeure un acteur principal de la défense de la sécurité du Golfe. Selon Fahmi, la visite hisse la coopération bilatérale à des niveaux plus élevés et confirme la convergence politique entre les deux pays sur les dossiers régionaux d’intérêt commun.
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