Al-Ahram Hebdo : Existe-t-il un lien entre l’attentat d’Al-Arich survenu cette semaine et la récente livraison du terroriste Hicham Al-Achmawi par la Libye à l’Egypte ?
Khaled Okacha : Certes. L’extradition vers l’Egypte d’un terroriste important comme Hicham Al-Achmawi est un message dissuasif pour toutes les organisations terroristes dont Daech. Je pense que cet attentat est un acte de représailles après l’extradition d’Al-Achmawi.
— Ne trouvez-vous pas bizarre qu’un ancien officier, comme Al-Achmawi, devienne un terroriste ?
— Lors d’un récent discours, le président Sissi a commenté cette affaire en faisant la comparaison entre le martyr l’officier Ahmad Al-Mansi, qui a été tué dans le Sinaï par des terroristes alors qu’il défendait son pays, et Hicham Al-Achmawi, l’officier devenu terroriste et qui a trahi son pays. Deux caractères antagonistes même s’ils étaient tous les deux officiers dans le même bataillon. Dans tous les pays du monde, on peut trouver des exemples similaires de personnes souffrant de troubles psychologiques et qui perdent le chemin. Et ce sont ces personnes que les organisations terroristes cherchent à recruter pour profiter de leur expérience militaire. — Pourquoi l’extradition d’Al-Achmawi a-t-elle été diffusée en direct par la télévision publique ?
— C’est un message aux terroristes que l’Egypte ne renoncera jamais à sa lutte contre le terrorisme, et c’est aussi un message aux familles des martyrs que leurs fils ne sont pas morts en vain. Il s’agit aussi d’un message au monde entier quant à l’importance de la coopération entre les pays en matière de lutte antiterroriste.
— Quelle est l’importance de cette extradition d’Al-Achmawi vers l’Egypte ?
— L’Egypte a le droit de juger Al-Achmawi. Il était l’un des terroristes les plus recherchés en Egypte. Le mouvement Ansar Al-Islam qu’il a fondé en Libye a planifié des attaques terroristes en Egypte à partir de la Libye. D’où l’importance de son extradition. Il doit être jugé pour ses crimes. Il existe des preuves qu’il était impliqué dans plusieurs opérations terroristes. Rappelons qu’il a été condamné à mort par contumace par la justice militaire. Par ailleurs, Al-Achmawi dispose d’informations importantes sur les organisations terroristes. Il connaît la nature de leur armement, leurs tactiques ainsi que leurs sources de financement. Des informations dont pourra profiter l’Egypte dans sa guerre antiterroriste.
— Mais pourquoi la Libye ne l’a-t-il extradé que 8 mois après son arrestation ?
— C’est parce qu’il a commis des attaques terroristes en Libye depuis 2014. Ancien membre de Daech, Al-Achmawi a fondé le mouvement Al-Mourabitoune, qui a prêté serment à Ayman Al-Zawahri, chef d’Al-Qaëda. Il a également fondé une faction proche d’Al-Qaëda appelée Ansar Al-Islam en Libye. Il était donc normal que les autorités libyennes le soumettent à une enquête avant de le remettre à l’Egypte. Dans le cadre de la coopération sécuritaire entre les deux pays, les instances libyennes ne se sont pas opposées à ce qu’une délégation judiciaire et sécuritaire égyptienne prenne part à l’enquête effectuée en Libye sur Al-Achmawi.
— Comment évaluez-vous la coopération égypto-libyenne en termes de lutte contre le terrorisme ?
— L’affaire Al-Achmawi est un exemple concret sur la nature de la coopération égypto-libyenne, deux pays confrontés au terrorisme. Depuis 2013, l’Egypte a renforcé sa coopération sécuritaire avec la Libye. Consciente des retombées de la propagation du terrorisme sur la sécurité régionale, l’Egypte coopère d’ailleurs avec d’autres pays en matière de la lutte antiterroriste.
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