3 496 mosquées seront consacrées cette année à la retraite spirituelle.
Le ministère des Waqfs (biens religieux) a annoncé cette année une série de mesures visant à mieux contrôler les mosquées et les zawyas durant le mois du Ramadan et à éviter leur instrumentalisation à des fins extrémistes. Le ministère a préalablement déterminé les thèmes des sermons du vendredi durant le mois sacré. Ceux-ci porteront sur la tolérance et la solidarité sociale pour contrer le fanatisme. 3 496 mosquées seront consacrées cette année à la retraite spirituelle. La durée du prêche du vendredi ne doit pas dépasser les 20 minutes et la leçon de la prière des tarawihs sera de 10 minutes seulement.
D’ailleurs, les imams qui ne sont pas inscrits au ministère et qui ne possèdent pas de permis de prêche ne sont pas autorisés à diriger les prières ni dans les mosquées ni dans les zawyas. Ainsi, tout imam qui souhaite diriger la prière des tarawih doit présenter au préalable une demande écrite au ministère des Waqfs. Idem pour les imams qui veulent donner des leçons de religion dans les mosquées.
« Des représentants du ministère surveilleront de près les lieux de culte pour vérifier que les imams se conforment aux thèmes fixés et qu’ils n’abordent pas des thèmes politiques ou lancent des appels à la haine ou au sectarisme », prévient Gaber Taie, responsable au ministère des Waqfs. Il ajoute que le ministère a récemment soumis 2 000 mosquées salafistes à son contrôle et a changé les noms de certaines mosquées qui portaient les noms de groupes de personnalités islamistes comme la mosquée Hassan Al-Banna en référence au fondateur des Frères musulmans, devenue la mosquée de Béni-Souef.
Le problème des zawyas
Depuis 2014, les mosquées et les zawyas sont soumises, en vertu de la loi, au contrôle du ministère des Waqfs. Les zawyas sont de petites mosquées de moins de 80 m2 très souvent installées au rez-de-chaussée des immeubles. Certaines ont été utilisées au cours des dernières années pour propager des idées extrémistes.
Beaucoup de ces zawyas échappent encore au contrôle du ministère des Waqfs en raison notamment de leur grand nombre (32 000) et le manque d’imams azharis. Omar Hamrouche, secrétaire de la commission des affaires religieuses au parlement, explique que depuis l’entrée en vigueur de la loi sur les mosquées, la grande majorité des zawyas sont sous le contrôle du ministère des Waqfs. « Cependant, il est difficile de contrôler à 100 % ces petites mosquées souvent construites sans permis. Les habitants des quartiers où se trouvent des zawyas non autorisées sont ainsi appelés à prévenir les services de sécurité ou le ministère des Waqfs pour qu’ils prennent les mesures nécessaires », appelle Hamrouche. Il rappelle aussi que le nombre d’imams azharis ne suffit pas pour couvrir toutes les zawyas.
Le député Choukri Al-Guindi, membre de la commission religieuse, réclame, lui, la fermeture de toutes les zawyas. « Il y a plus de 130 000 mosquées en Egypte. Nous n’avons donc pas besoin des zawyas. Il faut être réaliste et reconnaître que le budget du ministère des Waqfs ne suffit pas pour nommer un imam dans chaque zawya. Mieux vaut donc les fermer définitivement », insiste Al-Guindi.
Ahmed Kamel Al-Béheiri, chercheur spécialiste des groupes islamistes au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram, insiste également sur l’insuffisance des imams. « Le ministère ne peut couvrir, dans l’état actuel des choses, qu’environ 70 % des mosquées », affirme Al-Béheiri. Selon lui, la solution ne réside pas dans la fermeture des zawyas, mais dans un meilleur contrôle des imams. « Le ministère peut se suffire de mieux surveiller les imams qui travaillent dans les zawyas », affirme Al-Béheiri.
Au-delà de ce débat sur le contrôle des zawyas, des spécialistes se demandent si, avec le grand essor des télécommunications et d’Internet, les zawyas représentent toujours un danger idéologique ... Le général Hatem Saber, expert sécuritaire et spécialiste de la lutte contre le terrorisme, estime que l’influence des zawyas a beaucoup régressé par rapport aux années 1990. « Il est vrai que mal contrôler les mosquées et les zawyas peut être instrumentalisé par les extrémistes. Mais le plus dangereux aujourd’hui, ce sont les réseaux sociaux et les moyens de télécommunications utilisés par les groupes extrémistes pour propager leurs idéologies et recruter des nouveaux éléments ».
Selon les statistiques, la plupart des Egyptiens qui ont rejoint les rangs de Daech ont été recrutés via les réseaux sociaux. « Il faut contrer ce phénomène pour mieux lutter contre le fanatisme qui nuit à la religion », conclut Saber.
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