
La quatrième révolution industrielle, et le rôle de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique dans le développement durable ont été au centre des discussions.
« Entre présent et avenir », c’est sous ce slogan que le premier « Forum mondial de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique » s’est tenu en Egypte, à la Nouvelle Capitale administrative, du 4 à 6 avril. Inauguré par le président Abdel-Fattah Al-Sissi, le forum a vu la participation de 2 000 savants et experts ainsi que 300 personnalités étrangères et des vice-ministres de l’Enseignement provenant de 55 pays. Des représentants des organisations régionales et internationales concernées par l’enseignement supérieur et la recherche scientifique y ont aussi pris part. Quant aux thèmes abordés, il s’agissait notamment de la quatrième révolution industrielle, de l’innovation, des technologies émergentes, du rôle de l’enseignement supérieur et de la recherche scientifique dans le développement durable.
Dans son discours prononcé lors de la séance inaugurale, le président Sissi a appelé toutes les parties concernées à prendre les mesures susceptibles de réformer l’enseignement supérieur en Egypte. « On a besoin de révolutionner l’enseignement supérieur et la recherche scientifique pour pouvoir aller de pair avec les grandes évolutions scientifiques et technologiques que connaît le monde. Cela implique de commencer par le changement du concept même de l’enseignement dans le sens qu’il ne soit un simple outil de gagne-pain, mais plutôt de développement », a souligné le président. Par ailleurs, il a jugé qu’il était temps que l’Egypte rejoigne la quatrième révolution industrielle. A cet égard, il a mis en évidence la nécessité de réformer de fond en comble l’enseignement universitaire en vue de former des personnes aptes à réaliser un véritable développement pour l’Egypte. Un thème que le président a abordé en détail lors de sa réunion, en marge du forum, avec le Conseil suprême des universités, présidé par le ministre de l’Enseignement supérieur, Khaled Abdel-Ghaffar.
Selon les déclarations du ministre de l’Enseignement supérieur, le fait que l’Egypte accueille ce forum confirme sa volonté de coopérer avec les pays du monde en vue de réaliser un essor scientifique et technologique. C’est dans ce contexte que le président Sissi a lancé la plateforme des sciences et de la technologie destinée à installer un système national d’innovation. Il s’agit de créer, en coopération avec le ministère de l’Enseignement supérieur, un site Internet fournissant un accès libre à des articles scientifiques, qui aide à la communication entre les chercheurs, les académiciens aux niveaux local et international, les secteurs gouvernementaux et industriels en sus des entreprises émergentes et des institutions financières, pour devenir « un système national d’innovation ». D’ailleurs, le ministre de l’Enseignement a déclaré que l’Egypte soutenait la création d’une alliance entre les universités arabes et celles de l’Asie centrale, pour servir les questions liées à l’enseignement et à la recherche scientifique. Sayed Tagueddine, doyen de la faculté d’ingénierie de l’Université du Caire, estime que la présence à ce forum d’un grand nombre de pays arabes et étrangers a été une chance pour échanger et explorer les expériences des pays développés et tirer profit de leurs plans de réforme de l’enseignement et de la recherche scientifique, un objectif auquel l’Egypte accorde un grand intérêt. « L’Egypte est plus que jamais convaincue de l’importance d’investir dans ces domaines pour réaliser un véritable développement lui permettant de rattraper les pays développés », explique Tagueddine. A noter que selon le rapport de la compétitivité mondiale pour l’année 2018, en matière de capacité à l’innovation, l’Egypte est passée à la 64e place (sur 140 pays) par rapport à la 109e en 2017. Une avancée notable.
Les participants au forum ont également discuté des défis auxquels sont confrontés l’enseignement supérieur et la recherche scientifique au niveau international, des défis imposés par la transformation au numérique. Il s’agit notamment des défis relatifs à la qualification des diplômés pour le marché du travail, l’amélioration de la qualité de l’enseignement supérieur et l’amélioration du classement des universités égyptiennes à l’échelle mondiale. A cet égard, le ministre de l’Enseignement supérieur et de la Recherche scientifique, Khaled Abdel-Ghaffar, a signé, lors du forum, des accords avec deux des plus grandes entreprises de la transformation numérique portant sur la formation de 10 000 étudiants universitaires sur les manuels numériques.
Au service du développement
Autre thème, la quatrième révolution industrielle et ce qu’elle implique. Ayant pour potentiel d’augmenter les revenus et d’améliorer la qualité de vie des populations à travers le monde, cette quatrième phase des révolutions technologiques porte sur la fusion des technologies qui gomme les frontières entre les sphères physique, numérique et biologique. Mohie Mansour, ancien vice-recteur de l’Université de Béni-Soueif, explique que pour pouvoir rejoindre cette quatrième révolution industrielle, l’Egypte doit commencer par déterminer ses enjeux et ses priorités. « Vu l’écart entre les pays avancés en ce domaine et l’Egypte, elle doit commencer par définir des secteurs dans lesquels elle a déjà réalisé des avancées tels que la nanotechnologie, une science qui peut être exploitée pour développer les secteurs de la santé, industrielle, environnementale ou même militaire. Il faut donc poursuivre les recherches sur fond des résultats réalisés. Et là, il est important de noter qu’il faut toujours lier la recherche scientifique aux besoins des plans du développement et de l’industrie », estime l’expert. Il ajoute que l’Etat doit se doter d’une stratégie intégrale instrumentalisant la recherche scientifique au service du développement des secteurs vitaux tels que la santé, l’agriculture, la technologie et l’industrie. « Lier entre l’industrie et la recherche scientifique contribue à assurer le transfert de technologie et développer l’économie, mais aussi à consolider la compétitivité des entreprises. Et c’est pourquoi l’édification d’un modèle de développement à haut contenu technologique et l’impulsion de l’investissement et de l’économie doivent figurer désormais sur les priorités du gouvernement », appelle Mansour.
Concernant l’intelligence artificielle, le gouvernement a annoncé, en janvier dernier, la mise en place d’une stratégie nationale portant sur la création d’une académie pour l’intelligence artificielle en Egypte chargée de développer ce domaine et de devenir un pays producteur. Or, selon des experts, le manque de financement constitue un principal défi face à ce projet. Ce domaine technologique assez sophistiqué concerne l’ensemble des théories et des techniques devant être mises en oeuvre en vue du processus industriel. « Ainsi, plutôt que d’avoir recours à l’importation, les entreprises peuvent, en coopération avec les universités égyptiennes, lancer de nouvelles innovations. En échange, l’Etat peut fournir à ces entreprises des facilités en termes d’impôts », propose l’expert. Selon lui, l’Egypte doit aussi procéder à la réforme de l’infrastructure technologique telle que l’IT (technologie de l’information) ou le réseau Internet qui souffrent toujours de graves problèmes. Des difficultés qui n’empêchent pas l’Egypte de franchir des pas sur la voie du développement scientifique et technologique, même s’il reste beaucoup à faire.
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