Al-Ahram Hebdo : Comment s’effectuent les tests de dépistage de drogue, déjà lancés pour certains fonctionnaires en 2014 ?
Amr Osman : Le Fonds de lutte contre la toxicomanie effectue, à l’improviste, des analyses de sang chez les fonctionnaires, afin d’identifier les toxicomanes et les consommateurs de drogues. Cela en coordination avec les ministères et les instances concernées, pour se doter d’une base de données sur le nombre de fonctionnaires dans chaque établissement. Jusqu’à présent, les tests de dépistage ont été positifs dans 250 cas sur 8000 fonctionnaires dans les 8 ministères qui ont effectué le test.
— Comment les fonctionnaires ont-ils réagi au dépistage ?
— La plupart ont été coopératifs. Plus de 4000 fonctionnaires ont, par ailleurs, appelé volontairement la hotline du fonds (16023) pour bénéficier d’un traitement. En revanche, ceux qui refusent d’être traités seront passibles de sanctions allant jusqu’au licenciement.
— Pourquoi, selon vous, est-il important de lutter contre la toxicomanie parmi les fonctionnaires ?
— En général, la productivité d’un fonctionnaire drogué diminue considérablement jusqu’à devenir un fardeau pour l’instance dans laquelle il travaille. Dans d’autres cas, la situation est encore plus grave quand il s’agit de métiers dont dépend la vie d’autrui, comme un conducteur de train ou de véhicules. C’est pourquoi le gouvernement met en place des mesures strictes pour éviter les conducteurs conduisant sous l’influence de drogue, et ce, en coordination avec les ministères de l’Education, de la Solidarité sociale et de l’Intérieur. Grâce à une campagne intense de dépistage menée l’année dernière et qu’ont subie 12000 conducteurs de bus scolaires, le taux des conducteurs conduisant sous l’influence de drogue a diminué de 12 à 3%. L’accident de la gare centrale du Caire, survenu le 27 février et qui a fait 22 morts et une quarantaine de blessés, a été une sonnette d’alarme quant à l’urgence de s’attaquer avec fermeté au problème des fonctionnaires consommateurs de drogue. En effet, l’enquête a prouvé que le conducteur de train responsable de cette catastrophe était sous l’influence de drogue, d’où l’importance de ce dépistage, notamment au niveau des conducteurs et des cheminots. Depuis l’accident, 5000 cheminots ont fait l’objet d’un dépistage. C’est déplorable que, dans un secteur aussi vital, on ait découvert de nombreux cas de drogués parmi les travailleurs et les conducteurs.
— D’après les résultats de l’analyse du taux de toxicomanie en Egypte qu’a effectuée le fonds, quelle est l’ampleur de ce phénomène ?
— Les résultats finaux de ce dépistage, effectué sur des personnes âgées de 15 à 65 ans, seront annoncés au mois d’avril. D’après les résultats préliminaires, les consommateurs de drogue représenteraient 10,4% de la population, et les toxicomanes 2,4%. Le Tramadol est le stupéfiant le plus consommé, avec un taux de 56%, suivi notamment par le cannabis et l’héroïne. Des taux alarmants, qui nécessitent d’intensifier les efforts pour lutter contre ce fléau menaçant toute une société. Notons que 79 % des crimes sont commis sous l’influence de drogues.
— Quels sont les efforts déployés par le fonds pour endiguer ce phénomène ?
— En 2018, le fonds a traité 116000 cas. Par ailleurs, on a augmenté le nombre de centres de traitement dépendant du fonds, qui est passé de 10 à 22 au niveau du pays. 5 autres devraient être ouverts avant la fin de l’année.
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