
Le commandant des forces de l’Est du canal pour la lutte contre le terrorisme et le gouverneur du Sinaï du Nord lors de l'inauguration.
Tandis que la guerre antiterroriste progresse au nord du Sinaï, des projets de développement sont mis en oeuvre dans la péninsule. Jeudi 8 novembre, les forces armées ont inauguré la première phase du village exemplaire d’Al-Goufa, le noyau d’une nouvelle agglomération urbaine créé, au centre du Sinaï, par l’armée en coopération avec le gouvernorat du Nord-Sinaï, ainsi qu’avec plusieurs organisations de la société civile.
Le projet exécuté sur deux phases porte sur la construction, au centre du Sinaï, de 100 maisons bédouines exemplaires dont la superficie de chacune est de 200 m2. Le commandant des forces de l’Est du canal pour la lutte contre le terrorisme et le gouverneur du Sinaï du Nord ont inauguré la première phase de ce village, qui comprend 30 maisons entièrement meublées et équipées d’appareils électriques, en collaboration avec l’association caritative Misr Al-Kheir. Lors de la cérémonie, le commandant des forces de l’Est du canal a passé en revue les efforts déployés par les forces armées pour exécuter le plan du développement de la péninsule qui va en parallèle avec la campagne militaire globale antiterroriste Sinaï 2018, lancée en février dernier, pour éradiquer le terrorisme. Pour sa part, le gouverneur du Sinaï du Nord a salué la coopération et la coordination des forces armées avec les ONG, pour la mise en oeuvre de nombreux projets de développement et de services. A cet égard, il a souligné l’importance des services et des infrastructures mis en place au Sinaï au cours des deux dernières années, dont des réseaux d’eau, d’électricité et d’assainissement.
Des projets au service des Sinawis
Convaincu que le sous-développement du Sinaï est l’une des causes du terrorisme, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a annoncé, en décembre 2017, le lancement du projet national pour le développement du Sinaï. En avril 2018, le gouvernement a annoncé avoir débloqué un fonds de 275 milliards de L.E. en faveur du développement de la péninsule du Sinaï. Ce grand projet, qui sera exécuté d’ici 2022, prévoit la création d’un réseau routier, d’aménagements résidentiels et industriels, la construction de 4 usines de désalinisation de l’eau, d’hôpitaux et de réseaux d’égout. Cette décision s’inscrit dans le cadre d’un programme national visant notamment à éradiquer le terrorisme dans la zone. De nombreux projets de développement avaient été lancés en parallèle avec l’opération militaire antiterroriste et sont supervisés par l’armée. Parmi ces projets le creusement de 4 tunnels reliant la péninsule aux villes sur l’autre rive du Canal de Suez, des étangs pour l’élevage des poissons, 15 usines de marbre, 2 lignes de production de ciment, 2 stations d’assainissement de l’eau à des fins agricoles d’une capacité de production d’un million de litres chacune, en plus de 2 000 km de routes. Par ailleurs, 47 écoles et 400 instituts dépendant d’Al-Azhar ont été construits.
Hicham Halabi, expert militaire et professeur à l’Académie militaire Nasser, qualifie cette initiative de « projet pour la sécurité nationale ». « L’Etat est plus que jamais convaincu que la sécurité doit aller de pair avec un plan de développement durable de la péninsule. Les projets de développement ont commencé au centre du Sinaï, qui est la zone la plus poreuse de la péninsule, car ses frontières orientales s’étendent le long d’Israël », explique l’expert, qui souligne l’importance des routes qui relient le Sinaï aux autres provinces. « Ces routes vont faciliter le développement de la péninsule, renforcer sa sécurité et éviter qu’elle ne soit une zone abandonnée qui peut devenir un sanctuaire terroriste », affirme Halabi, saluant le rôle de l’armée qui construit d’une part et combat le terrorisme de l’autre part.
S’attaquer aux racines du mal
Ahmad Kamel Al-Béheiri, chercheur au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram et spécialiste des mouvements islamistes, est d’accord sur le fait que l’option militaire ne peut pas constituer seule une solution durable aux problèmes de la péninsule. Selon lui, le plan de développement de la péninsule en cours aurait dû être mis en place depuis des décennies. « Pour combattre un terrorisme global, il faut faire naître un espoir global. C’est vrai qu’il y a une multitude de facteurs qui ont favorisé la diffusion du terrorisme, notamment au Nord-Sinaï, mais la situation sécuritaire actuelle est aussi le fruit de décennies de négligence du Sinaï. C’était une erreur fatale de laisser le Sinaï isolé, ce qui a favorisé sa transformation en terrain fertile à l’expansion de l’idéologie extrémiste », souligne Al-Béheiri. Il enrichit que la pauvreté, la frustration ou la discrimination sont des facteurs fragilisant n’importe quelle société de sorte qu’elle risque de tomber facilement en proie de l’extrémisme.
La population du Sinaï souffrait de retard économique par rapport aux autres régions.
Selon Al-Béheiri, l’installation d’usines de ciment et de marbre au centre du Sinaï est une stratégie positive. « Ces projets permettent, d’une part, d’attirer la main-d’oeuvre des autres provinces, ce qui favorise l’urbanisation de la région. D’autre part, en offrant des emplois aux Sinawis, l’Etat rétablit des ponts de confiance avec les bédouins pour ne pas laisser la chance aux groupes terroristes d’exploiter leur malaise, notamment les jeunes parmi eux », explique-t-il. Et de conclure : « Aujourd’hui, en oeuvrant en faveur d’une meilleure intégration des bédouins dans la société, l’Etat remédie à un mal qui a sévi pendant de nombreuses années », conclut Al-Béheiri.
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