Le président a profité de la conférence pour tendre la main à ses opposants.
Dans une tentative de montrer l’unité contre les effets potentiellement négatifs du projet de barrage du Nil en Ethiopie sur l’Egypte, le président Mohamad Morsi a prononcé lundi soir un discours devant un auditoire tout islamiste, au cours duquel il a exhorté les participants à rester unis «
face au défi ». Lors de cette «
conférence nationale » organisée par les partis islamistes égyptiens pour discuter des réponses recommandées à la décision récente de l’Ethiopie de détourner le cours du Nil Bleu, le président Morsi a déclaré que «
toutes les options étaient ouvertes » face au projet de l’Ethiopie de construire un barrage sur le Nil Bleu.
« Nous n’appelons pas à la guerre, mais nous n’accepterons jamais que notre sécurité soit mise en danger », a poursuivi le président devant des centaines de ses partisans. « C’est une grande démonstration d’unité qui révèle que nous sommes ensemble pour faire face aux menaces contre le pays … En tant que révolutionnaires libres, nous allons continuer sur notre voie », a dit le président devant les acclamations de la foule.
Mais pour certains observateurs, le discours enthousiaste et rhétorique du président vise à exploiter à son avantage le spectre de la crise au moment où sa popularité semble s’éroder, et surtout à la veille de manifestations populaires de ses opposants prévues le 30 juin pour lui « retirer la confiance ».
Le Caire est toutefois loin d’opter pour une solution autre que diplomatique. Plus tôt dans la journée de lundi, le premier ministre Hicham Qandil a indiqué que son ministre des Affaires étrangères, Mohamad Kamel Amr, allait se rendre « dans les prochains jours » en Ethiopie pour « exposer le point de vue égyptien ». « La part de l’Egypte dans le Nil, qui est de 55 milliards de m3, ne correspond pas aux besoins quotidiens de l’Egypte et aux besoins de croissance. L’Egypte est entrée dans une phase de pauvreté hydraulique depuis cinq ans », a dit le premier ministre dans une allocution devant le Conseil consultatif (Sénat), en expliquant que la part d’eau était fixe mais que les besoins étaient en hausse, ce qui représente « un grand défi pour la stabilité économique et sociale ».
« Nous allons continuer notre projet »
L’Ethiopie a entamé fin mai une déviation du Nil Bleu sur 500 mètres en vue de la construction d’un important barrage hydroélectrique et Le Caire a réagi en affirmant son opposition à tout projet qui pourrait affecter le débit du fleuve en aval « ne serait-ce que d’une goutte ».
Mais l’Ethiopie a déclaré jeudi sa détermination à construire son barrage baptisé « Grande renaissance ». « Nous allons continuer notre projet », a déclaré Getachew Reda, porte-parole du premier ministre éthiopien Hailemariam Desalegn, estimant que la construction du barrage ne dépendait pas « de la volonté de politiciens » égyptiens. Le porte-parole a précisé que l’Ethiopie avait invité le président égyptien pour discuter du barrage, mais qu’il ne sera pas question de « négocier » l’arrêt du projet.
La conseillère pour les affaires politiques du président Morsi, Pakinam Al-Charqawi, a de son côté déclaré que Le Caire allait demander à l’Ethiopie d’arrêter son projet. Une déclaration qui intervient après la diffusion la semaine dernière et en direct d’un débat télévisé lors duquel des figures politiques ont lancé des diatribes contre l’Ethiopie au sujet de son projet. Un chef de parti a ainsi proposé de propager des rumeurs sur un achat par l’Egypte d’avions militaires afin de mettre la « pression » sur l’Ethiopie, alors qu’un autre a estimé que Le Caire devait soutenir les rebelles éthiopiens « pour mettre la pression sur le gouvernement ».
Ces propos ont provoqué une vague de critiques dans les médias et même ont poussé des personnalités n’ayant pas pris part aux discussions à présenter leurs excuses au nom du peuple égyptien. L’ambassadeur égyptien à Addis-Abeba a été convoqué par les autorités d’Ethiopie pour donner des explications sur ces « remarques hostiles ».
Les résultats de la visite à Addis-Abeba du chef de la diplomatie égyptienne sont maintenant attendus. Quant aux discours officiels égyptiens, ils pourraient s’avérer être plus destinés à « la consommation locale » .
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