Des activités musicales, sportives, artistiques, culturelles et de divertissement. Toute une gamme d’activités sur l’agenda du 1er Forum arabe des écoles d’intégration pour les enfants souffrant d’un handicap, qui s’est déroulé du 2 au 6 septembre à Charm Al-Cheikh. Un forum qui vise à échanger les expertises entre les pays arabes en matière d’intégration des élèves souffrant de handicaps dans les écoles publiques. Accordant un intérêt particulier à l’amélioration des conditions de vie de cette catégorie et leur intégration à la société, le président Abdel-Fattah Al-Sissi a inauguré le forum, soulignant que l’intérêt accordé à ce dossier s’inscrit dans le cadre de la stratégie de développement durable de l’Egypte 2030, dont les objectifs incluent le droit à l’éducation pour tous.
Pour éliminer toutes sortes de discriminations à l’égard des handicapés, il a de même consacré une somme de 500 millions de L.E. pour financer le projet du ministère de l’Education destiné à intégrer cette tranche d’élèves dans les écoles publiques (le projet concerne 22 000 écoles). Le président a également annoncé qu’un centre de services pour les personnes souffrant d’un handicap sera établi par le ministère de la Défense. Ainsi, le ministre de l’Education, Tareq Chawqi, a lancé une nouvelle initiative, baptisée « Capables différemment », un programme de sensibilisation qui durera de 4 à 6 semaines et qui vise à faire connaître à ces élèves leurs droits et leurs acquis.
Le pédagogue Kamal Morris salue la tenue de ce forum qui reflète l’intérêt accordé par l’Etat à ce dossier et qui, surtout, permet aux pays participants d’échanger les expériences en matière d’intégration éducative. « Les recommandations de ce forum portant sur la création de centres de services qui se chargeront de présenter des consultations et des services aux élèves souffrant d’un handicap, à leurs parents, aux autres élèves, étaient très importantes et contribueront à faciliter l’intégration des élèves », explique Morris. Il ajoute que cette catégorie, qui représente pourtant entre 10 et 15 % de la société, a été négligée pendant de longues années. « Aujourd’hui, il existe une volonté politique de les intégrer dans la société », loue-t-il.
Pour rappel, le président Sissi avait annoncé l’année 2018 celle des handicapés. D’ailleurs, en 2017, une nouvelle loi sur les handicapés a été promulguée dans l’objectif d’assurer le droit d’environ 11 millions de handicapés à une vie digne et de leur offrir plus de protection sociale et juridique (voir sous-encadré).
Intégrer ces élèves, oui, mais comment ?
La tenue de ce forum coïncide avec l’inauguration de deux premières classes d’intégration dans une école publique au Caire et à Guiza, avec 10 % d’élèves souffrant d’un handicap (avec un maximum de 4 par classe). Un pas important, certes, mais qui doit être suivi d’une formation spécialisée des professeurs aux méthodes d’enseignement nécessaires pour ces élèves. Une tâche difficile. A cet effet, plusieurs protocoles ont été signés. L’un de ces derniers est en coopération avec le ministère des Télécommunications pour la formation de 22 000 enseignants, un autre avec le ministère de la Culture, pour le développement des talents de ces élèves, un troisième avec l’Unicef qui s’occupera des écoles d’intégration primaire dans au moins sept gouvernorats. Cette organisation se chargera de la mise en place des salles de documentation et la formation du personnel administratif, des enseignants et des spécialistes dans ces écoles.
Autre défi, la généralisation de ces mesures. Engi Machhour, conseillère au ministère de l’Education pour les élèves souffrant d’un handicap, indique que le ministère a pris plusieurs décisions pour l’application et la généralisation de l’intégration des handicapés dans toutes les écoles, « d’abord, les écoles publiques, ensuite, les établissements privés ».
Par ailleurs, le ministère de l’Education a défini quelques critères pour l’intégration des élèves handicapés dans les écoles publiques et privées. Ainsi, les élèves atteints de déficiences visuelles (aveugles et malvoyants ou atteints du syndrome d’Irlen), de déficiences auditives, les handicapés mentaux dont le taux d’intelligence n’est pas inférieur à 65 ni supérieur à 84 d’après l’échelle de Stanford-Binet auront droit à l’intégration. De même, tous les degrés d’invalidité motrice et de paralysie cérébrale sont acceptés dans les écoles d’intégration, à l’exclusion des cas graves de paralysie. Les cas d’autisme et d’hyperactivité doivent avoir l’approbation de l’assurance maladie, des hôpitaux publics ou universitaires. Par contre, les étudiants polyhandicapés ne seront pas admis dans les écoles d’intégration, à l’exception des cas de déficience motrice, car ce genre de handicap n’affecte pas le processus éducatif. En outre, selon cette réglementation, le nombre total des enfants handicapés ne doit pas dépasser les 10 % du nombre total d’élèves de la classe avec un maximum de 4 élèves par classe ayant tous le même type de handicap. Et conformément à la loi sur l’éducation, l’âge de scolarisation en première année primaire doit être compris entre 6 et 9 ans.
Permettre la scolarisation pour tous
Jusque-là, seuls 2,8 % des enfants souffrant d’un handicap étaient scolarisés.Une réalité qui va changer, selon la députée Héba Hagras, présidente de la commission de la solidarité sociale au parlement et membre du Conseil national des affaires des handicapés, d’autant plus que les nouvelles mesures viennent répondre à une exigence constitutionnelle que stipule l’article 81, selon lequel l’Etat doit garantir tous les droits aux personnes souffrant d’un handicap, que ce soit du point de vue économique, social, culturel, sportif, éducatif, et même du point de vue des divertissements et des services publics. « Auparavant, les choix étaient très limités et les parents étaient obligés de scolariser leurs enfants dans des établissements ou trop éloignés de leur domicile, ou trop chers. Les familles les plus modestes y renonçaient tout simplement. Aujourd’hui, ce ne sera plus le cas, les enfants auront le droit de se rendre aux écoles les plus proches de leur lieu de résidence et sans frais supplémentaires », précise-t-elle.
Autant de mesures qui, selon Hagras, permettront la scolarisation de presque 90 % des enfants handicapés. Les 10 % restants et souffrant de handicaps graves devront en revanche rejoindre des établissements spécialisés. « Les psychologues assurent qu’un enfant handicapé doit vivre avec les autres, et non pas comme les autres », conclut-il.
Voici les principaux termes de la loi relative aux personnes souffrant d’un handicap
La loi stipule le droit des personnes souffrant d’un handicap à tous les services et les activités. Elle inclut des peines de six mois de prison ou une amende de 10 000 L.E. pour les personnes qui se font passer pour une personne ayant un handicap ou qui aident d’autres personnes à le faire.
La loi incrimine toute forme de discrimination ou de ségrégation à leur égard.
Les personnes handicapées auront accès aux écoles et universités gouvernementales et privées. 10 % des places des résidences universitaires leur sont réservées.
L’Etat consacre 5 % des logements construits aux personnes souffrant d’un handicap. Pour assurer l’application rigoureuse de cette clause, la loi exige une peine de prison de 6 mois à un an de prison ou une amende allant de 10 000 à 30 000 L.E., multipliée par le nombre de cas d’infraction, pour tout responsable ne respectant pas la loi.
Les handicapés profiteront d’une réduction de 50 % sur tous les transports publics. Quant aux véhicules équipés pour répondre à leurs besoins, ils seront exempts de taxes. La loi offre aussi une exemption fiscale pour les personnes souffrant d’un handicap et leurs proches des premier et deuxième degrés qui s’occupent d’elles. Tout handicapé sera par ailleurs couvert par une assurance médicale intégrale.
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