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Ecoles expérimentales : La réforme qui fâche

May Atta, Mercredi, 09 mai 2018

La décision du ministère de l’Education d’arabiser les matières scientifiques jusqu’en 6e primaire dans les écoles expérimentales a soulevé un tollé parmi les parents.

Manifestations et critiques. C’est ainsi que les parents des élèves des écoles expérimentales (écoles publiques où les programmes sont enseignés en langue anglaise) ont réagi à l’annonce du ministre de l’Education, Tareq Chawqi, sur l’annulation des écoles expérimentales dès l’année scolaire 2019/2020. Dans les écoles expérimentales, les élèves étudient les sciences et les mathématiques en anglais et apprennent aussi l’anglais en tant que deuxième langue. Quant aux autres matières, ils les apprennent en arabe. Il s’agit de quelque 800 écoles où étudient environ 650000 élèves.

La décision de supprimer les écoles expérimentales s’inscrit dans le cadre du plan de réforme globale de l’enseignement pré-universitaire qui entrera en vigueur dès la prochaine rentrée scolaire. Un plan destiné à réformer de fond en comble le système éducatif pour qu’il soit conforme aux normes de qualité internationales. L’arabisation de l’enseignement primaire dans les écoles expérimentales est l’un des traits de la réforme. « L’apprentissage des maths et des sciences en arabe jusqu’à la 6e primaire est une question d’identité nationale. C’est important d’apprendre les langues étrangères, mais cela ne doit pas se faire au détriment de la langue maternelle qui, hélas, n’est pas maîtrisée par la plupart des élèves », a déclaré le ministre de l’Education. Il a ajouté que les mathématiques et les sciences seront enseignées en anglais en préparatoire et en secondaire.

Des arguments qui ne semblent pas convaincre les parents d’élèves. Des dizaines d’entre eux ont manifesté jeudi devant le ministère de l’Education contre cette décision. Pour eux, les écoles expérimentales sont une alternative aux écoles gouvernementales. Elles donnent à leurs enfants une éducation de meilleure qualité en langue étrangère, à l’instar des écoles privées, mais à des frais compris entre 1500 L.E. et 2300 L.E. par an contre 10000 L.E. à 40000 L.E. pour les écoles de langues et 70000 L.E. à 250000 L.E. pour les écoles internationales.

L’initiative des écoles expérimentales a commencé en 1985 avec le but d’offrir une qualité d’enseignement différente de celle des écoles publiques où les élèves étudient toutes les matières en arabe. Les écoles expérimentales étaient donc le choix idéal pour la classe moyenne. « C’est une décision choquante. La raison pour laquelle j’ai inscrit mon fils à une école expérimentale est que je voulais lui apprendre une langue étrangère et lui donner un enseignement différent de celui des écoles publiques », explique Ahmad Hosni, père d’un élève dans une école expérimentale. Avis partagé par Mona Zidane, mère d’une fille scolarisée dans une école expérimentale. « Ce n’est pas pratique de demander à des élèves, qui ont étudié ces matières en anglais pendant 6 ans, de continuer leurs études en langue arabe », s’indigne-t-elle.

Mais pour le ministre de l’Education, cette colère n’est pas justifiée puisque, selon lui, sous le nouveau système qui sera appliqué « les élèves recevront un enseignement de meilleure qualité gratuitement ». Et pour éviter toute confusion, le ministre a décidé que le nouveau système ne sera pas appliqué aux élèves déjà inscrits dans les écoles expérimentales mais seulement aux nouveaux élèves de la maternelle.

Quelle portée ?

Les avis divergent sur l’enjeu et la portée de l’arabisation des matières dans le cycle primaire. Si certains estiment que l’arabisation ne sert pas la réforme envisagée de l’enseignement, d’autres appuient la vocation du ministère de l’Education d’approfondir l’apprentissage de la langue arabe comme moyen de préserver l’identité nationale. Kamal Moghis, expert en pédagogie, explique que cette décision est injuste car elle n’a pas été généralisée à toutes les écoles privées, mais seulement aux écoles expérimentales. « Cette décision encouragera les écoles de langue à augmenter leurs frais parce qu’il n’existera pas d’alternative publique à leur service », affirme Moghis. Vision partagée par Abdel-Salam Noueir, pédagogue, qui estime que les sciences et les mathématiques doivent être enseignées en anglais, surtout que beaucoup d’expressions scientifiques sont d’origine latine. « L’arabisation de ces matières mènera à la détérioration de l’éducation dans les écoles expérimentales », redoute Noueir.

Mais la députée Magda Nasr, membre de la commission de l’éducation au parlement, ne voit pas l’affaire du même oeil. Elle trouve que cette décision est adaptée au nouveau système. Elle explique qu’avec le nouveau système, il n’y aura pas de manuels scolaires dans le sens traditionnel du terme jusqu’à la 4e primaire, mais des sujets abordés et discutés collectivement en classe, à travers lesquels les élèves acquièrent des connaissances. « Cela veut dire que le professeur expliquera la géographie en liaison avec les sciences, l’histoire et parfois les mathématiques dans la même langue », indique la députée, appelant à éviter les préjugés avant de voir les résultats du nouveau système.

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