Le président Abdel-Fattah Al-Sissi a participé, à Addis-Abeba, à partir du samedi 27 janvier, à la 30e session de la Conférence des chefs d’Etat et de gouvernement de l’Union Africaine (UA) en présence des 55 dirigeants du continent. Par ailleurs, l’Egypte a été élue présidente de l’organisation en 2019 pour «
son rôle pionnier sur le continent africain, sous la conduite du président Abdel-Fattah Al-Sissi », a indiqué Bassem Radi, porte-parole de la présidence. Il a précisé que l’Egypte sera ainsi membre de la commission africaine troïka, constituée du président en exercice de l’UA, de son prédécesseur et de son successeur. Le président Sissi a assisté, dimanche, à la séance inaugurale du sommet au cours de laquelle le président guinéen, président du sommet en 2017, a félicité son homologue égyptien pour la présidence de l’UA, lui affirmant sa confiance en la capacité de l’Egypte à «
défendre les intérêts africains pendant sa présidence de l’UA ».
Tenu sous le thème « La Corruption et ses répercussions sur le développement en Afrique », le sommet a abordé plusieurs questions d’importance capitale pour le continent, notamment celles relatives à la paix, la sécurité ainsi qu’à la lutte contre le terrorisme. Des dossiers au sujet desquels l’Egypte a formulé sa vision lors du sommet. La lutte contre le terrorisme, la migration illégale, la crise du barrage de la Renaissance, et le renforcement de la coopération égypto-africaine ont été d’autres dossiers sur l’agenda de l’Egypte. En marge du sommet, le président Sissi s’est entretenu avec un nombre de présidents africains, dont le président soudanais, Omar Al-Béchir. Une rencontre au cours de laquelle les deux leaders se sont mis d’accord sur « l’importance de dépasser les différends et de valoriser leurs relations historiques et leurs intérêts mutuels », a indiqué le porte-parole de la présidence, dans un communiqué. Le président Sissi a pris part à un sommet tripartite réunissant l’Egypte, le Soudan et l’Ethiopie.
Une rencontre qui a permis de rapprocher les points de vue entre les trois pays du bassin du Nil sur le dossier le plus controversé, à savoir le barrage éthiopien. Avant de quitter la capitale éthiopienne, le président Sissi a déclaré à la presse que l’ambassadeur soudanais, qui avait été rappelé le 4 janvier pour consultations, regagnera Le Caire. « Rassurez-vous, il n’existe pas de problèmes autour du barrage », a déclaré le président Sissi sur le dossier, sans donner plus de détails. L’Ethiopie n’avait pas réagi à une proposition de l’Egypte de recourir à la médiation des experts de la Banque Mondiale (BM) dans la question du barrage pour faire avancer les négociations techniques.
Lutte contre le terrorisme, une priorité pour l’Egypte
L’Egypte avait un agenda chargé au sommet. Samedi 27 janvier 2018, en prélude au Sommet des chefs d’Etat et de gouvernement, le Conseil de Paix et de Sécurité de l’Union Africaine (CPS-UA) a tenu une réunion dirigée par le président Sissi, qui préside le conseil au mois de janvier. Une réunion à laquelle ont pris part une quinzaine de chefs d’Etats africains et qui a été consacrée à la stratégie africaine de lutte contre le terrorisme et l’extrémisme violents. Les discussions ont souligné la nécessité d’un effort collectif dans la lutte contre ce phénomène et les moyens de faire face à la radicalisation considérée comme le principal facteur derrière la menace terroriste. Le président Sissi a mis en garde contre la menace que représente le terrorisme pour tous les pays du monde. « Notre réunion se tient à un moment où l’on reconnaît de plus en plus l’importance d’intensifier les efforts pour éliminer le terrorisme. Un phénomène qui représente une menace sérieuse pour la paix et la sécurité internationales d’autant plus qu’il sape les efforts de développement », a martelé le chef de l’Etat. Et d’ajouter que cette menace exige une solidarité internationale et une stratégie complémentaire. « Le terrorisme prend de nouvelles dimensions et ne s’arrête plus aux frontières d’un continent, d’une société ou d’une région », a déclaré le président. Il a souligné que les zones de conflits armés ou de troubles constituent un terrain fertile au terrorisme et à l’idéologie extrémiste. « Nous constatons que l’effondrement des institutions de l’Etat a causé un vide politique et sécuritaire dont ont profité les groupes terroristes pour proliférer. D’où la nécessité de s’attaquer à ce phénomène et de dessécher ses ressources financières, logistiques et idéologiques », a déclaré le président.
Le 28 janvier, le chef de l’Etat a assisté à la séance à huis clos des chefs d’Etat au cours de laquelle l’Egypte a été élue, à l’unanimité, présidente de l’UA pour l’année 2019. La réforme institutionnelle de l’Union africaine et la création d’une zone franche africaine ont été au menu des discussions.
Une stratégie gagnante
La participation du président au sommet reflète l’intérêt accordé par l’Egypte au contient noir. Selon l’Organisme général de l’information, le président Sissi a effectué, depuis son arrivée au pouvoir en 2014, 21 visites dans des pays africains, sur un total de 69 déplacements à l’étranger, soit 30 % des visites présidentielles à l’étranger. Il a aussi tenu 112 réunions avec des dirigeants et des responsables africains qui ont visité l’Egypte au cours des trois dernières années. Une agence égyptienne de partenariat pour le développement en Afrique a été créée en 2014 dans le but de soutenir les projets de développement sur le continent.
Une stratégie gagnante selon les observateurs. L’Egypte était absente de la politique africaine depuis la tentative d’assassinat manquée contre l’ancien président Hosni Moubarak à Addis-Abeba en 1995. Pour Hamdi Abdel-Rahman, directeur du Centre des études africaines, l’élection de l’Egypte à la présidence de l’UA en 2019 prouve que cette politique a réussi à gagner la confiance et le respect des pays africains. « La participation de l’Egypte aux sommets africains lui permet de présenter sa vision sur des dossiers vitaux comme l’eau, la lutte contre le terrorisme, la coopération économique interafricaine », affirme Abdel-Rahman. Et d’ajouter : « L’Egypte accorde aujourd’hui beaucoup d’intérêt aux rencontres bilatérales au niveau des sommets en tant que moyen de régler les problèmes ». « Le fait que l’Egypte avait tourné le dos à l’Afrique était une erreur fatale qui a laissé le champ libre à d’autres pays. En renouant avec le continent noir, l’Egypte cherche en premier lieu à multiplier ses cercles d’influence en Afrique », dit Abdel-Rahman. Vision partagée par Tareq Fahmi, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, qui estime : « Le retour progressif de l’Egypte sur la scène africaine est motivé par la volonté de créer une coalition continentale politique et économique pour relever les défis auxquels est confronté le continent », conclut Fahmi, en soulignant que les intérêts de l’Egypte en Afrique vont au-delà de la seule sécurité hydraulique.
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