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L’avenir des coalitions apparaît fragile

May Atta, Mardi, 25 septembre 2012

Trois nouvelles formations ont récemment vu le jour. Réunissant divers partis aux objectifs parfois contradictoires, ces regroupements ne semblent pas destinés à rester unis à moyen terme

L’avenir des coalitions apparaît fragile

Les dernières semaines ont témoigné de la création de plusieurs coalitions politiques de tous bords ralliant aussi bien sympathisants de droite, de gauche, libéraux ou conservateurs. Un seul objectif, souvent non affiché, les rassemble : contrer le pouvoir islamiste.

Le nationaliste de gauche Hamdine Sabbahi, inattendu 3e homme de la présidentielle, est revenu cette semaine avec un mouvement baptisé « Le Courant populaire ». Devant 15 000 personnes rassemblées vendredi soir sur la place Abdine, dans le centre du Caire, Sabbahi a affirmé que son mouvement était « ouvert à tous les partis qui défendent les objectifs de la révolution que résume son célèbre slogan : dignité, liberté, justice sociale ».

Se réclamant de l’héritage du charismatique président Gamal Abdel-Nasser, Sabbahi veut mettre les questions sociales au cœur de son projet, sur fond de grogne émaillée de multiples grèves (conducteurs des bus publics, enseignants, médecins …).

« Un régime de droite (celui des Frères musulmans, ndlr) en a remplacé un autre qui était aussi à droite » (celui de Hosni Moubarak), a-t-il assuré aux nombreux Egyptiens qui redoutent que les difficultés financières et budgétaires du pays ne se traduisent par un tour de vis sur les subventions aux produits de base comme le pain ou les carburants. Des subventions qui pèsent particulièrement lourd sur les finances publiques.

Beaucoup de jeunes se réclamant de la révolution se sont ralliés à son parti, ainsi que plusieurs intellectuels, activistes et journalistes de renom. D’autres partis comme Al-Karama, l’Entente nationale ou la Conférence populaire, envisagent par ailleurs de rallier cette nouvelle formation.

Amr Moussa en rassembleur

Si Le Courant populaire de Sabbahi ne se veut pas une structure partisane, mais plutôt un mouvement populaire, d’autres coalitions ont pris la forme d’une fusion de partis. Ils entendent aussi regrouper leurs efforts pour les élections législatives prévues après la rédaction de la nouvelle Constitution.

Le candidat malheureux de la présidentielle de 2012, ancien chef de la diplomatie et ex-secrétaire général de la Ligue arabe, Amr Moussa, est l’auteur de l’une de ces initiatives. Lundi 17 septembre, il a annoncé la naissance du partiAl-Moatamar, une formation à laquelle se sont joints une dizaine de partis politiques, dont le Front démocratique et Ghad al-sawra.

M. Moussa ambitionne d’en rassembler plus d’une vingtaine. « L’initiative vise à renforcer l’influence de ces partis en faisant entendre la voix de leurs supporters », a-t-il affirmé lors de la cérémonie de lancement du parti. « L’un de nos principaux objectifs est de promouvoir des options modérées représentatives de la majorité des Egyptiens et de préserver l’identité laïque de l’Etat », a ajouté Moussa en allusion au pouvoir islamiste.

Ayman Nour, président du parti Ghad al-sawra qui a rallié la formation de Moussa, souligne qu’il ne s’agit pas d’une coalition provisoire ou d’une alliance tactique à des fins électorales, mais plutôt de la « fusion permanente de plusieurs partis ».

Arrivé deuxième lors de la présidentielle de 2005 face à Hosni Moubarak, Nour a ajouté : « Les membres du nouveau parti s’opposaient à l’hégémonie d’une seule faction politique », toujours en référence aux Frères musulmans. « La révolution a eu lieu pour établir un système civil et démocratique », a-t-il ajouté.

Une dizaine de partis de gauche ont à leur tour annoncé la création de la « Coalition révolutionnaire démocratique ». Réunis mercredi 19 septembre au siège du Parti socialiste, les représentants de cette nouvelle formation ont présenté la déclaration constitutive de cette coalition fondée notamment sur les principes d’égalité, de démocratie, du respect des libertés et de la séparation de la religion de l’Etat.

Formations instables

Ces formations de type « ombrelles politiques », motivées par un sentiment de faiblesse face à un pouvoir islamiste qui reste populaire, ont du mal à convaincre de leur stabilité à long terme. « Lesdits courants politiques sont, de par leur nature, encore plus faibles que les partis uniques sur les plans organisationnel et financier. Il est plus difficile pour un courant de former une administration financière ou d’ouvrir un compte bancaire lorsqu’on est une formation, qui plus est nébuleuse ! », commente Samer Soliman, professeur de sciences politiques à l’Université américaine du Caire.

« Ces courants très larges ne disposent pas de programme politique défini ou de vision commune. Ce sont des entités floues. Il y a peu de chance qu’un regroupement de partis qui ne dispose pas de bases populaires puisse réussir à contrer la montée islamiste », ajoute Soliman.

L’exemple le plus célèbre de ce genre de coalition est l’Association nationale pour le changement formée autour du Prix Nobel de paix, Mohamed ElBaradei, à la veille de la révolution. Après avoir collecté un million de signatures, l’Association s’est disloquée au lendemain de la chute de Moubarak donnant lieu à la naissance d’innombrables petites formations.

Les prochaines élections législatives seront un bon test de l’éventuel succès de ces nouvelles coalitions aux contours souvent trop vagues pour séduire l’électorat l

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