Le président Abdel-Fattah Al-Sissi s’est rendu dimanche en Hongrie pour prendre part au sommet du groupe de Visegrad, réunissant quatre pays d’Europe Centrale : la Hongrie, la Pologne, la République tchèque et la Slovaquie.
La visite du chef de l’Etat répondait à un double objectif : participer au sommet qui accueille pour la première fois un pays du Proche-Orient, et confirmer la coopération et la solidité des rapports égypto-hongrois.
Le président Al-Sissi a commencé sa visite lundi par une réunion au sommet avec le chef du gouvernement. La réunion s’est clôturée par une conférence de presse au siège du Conseil des ministres.
Les entretiens du chef du gouvernement hongrois avec le président Sissi et les différents responsables égyptiens ont porté sur les derniers développements de la situation régionale et les efforts internationaux employés dans la lutte contre le terrorisme, la coopération sécuritaire et la stabilisation de la région. Comme l’explique le politologue Hicham Mourad, professeur de sciences politiques à l’Université du Caire, plusieurs raisons font de cette visite une rencontre importante : « L’Egypte, qui axait traditionnellement ses relations sur les pays d’Europe de l’Ouest, en particulier l’Italie, la Grèce ou Chypre, plus proches géographiquement et plus engagés dans les enjeux régionaux, a décidé de se tourner vers l’Europe de l’Est. L’Egypte est le premier pays du Moyen-Orient et d’Afrique à participer au sommet Visegrad, et le troisième sur le plan mondial après le Japon et l’Allemagne, ce qui souligne l’importance de l’Egypte pour ces quatre pays qui forment à leur tour un soutien assez fort à l’Egypte au sein de l’Union européenne ».
Une entente à long terme
L’Egypte et la Hongrie ont de tout temps maintenu de bonnes relations. Les relations diplomatiques entre les deux pays ont commencé en 1928, et l’Egypte est le 1er pays arabe à avoir ouvert une mission diplomatique en Hongrie en 1939. La Hongrie est l’un des premiers pays à avoir soutenu l’Egypte après la révolution du 30 juin. Cette visite vient donc souligner ce rapprochement égypto-hongrois qui s’est remarquablement renforcé ces deux dernières années. Cette visite n’est d’ailleurs pas la première du président Sissi en Hongrie. Le président avait déjà visité son homologue en 2015 et le premier ministre égyptien s’est également rendu en Hongrie au début du mois dernier. Au cours de cette visite, cinq mémorandums touchant à la coopération militaire et internationale, aux médias et à l’aviation ont été signés et une lettre d’intention en collaboration avec le flux Export-Import Bank a été rédigée pour financer l’achat de 700 wagons de train. En novembre 2015, Peter Searto, ministre des Affaires étrangères hongrois, a également effectué une visite au Caire. Quelques mois plus tard, le ministre des Affaires étrangères, Sameh Choukri, qui avait accueilli Searto, s’est à son tour, rendu en Hongrie. En 2014, enfin, Scholte Samjn, vice-premier ministre de Hongrie, en visite en Egypte, avait été reçu par le plus grand imam d’Al-Azhar, le cheikh Ahmad Al-Tayeb.
Mais outre les relations stables entre les deux pays, ce sont surtout leurs intérêts actuels qui ont participé, d’une manière ou d’une autre, à ce rapprochement. « Les récentes évolutions de la région, avec notamment l’avènement de Daech et le problème des réfugiés syriens, ont aidé à l’amélioration des relations entre les pays européens et l’Egypte », affirme Mourad.
Sur le plan sécuritaire, la Hongrie perçoit l’Egypte comme un partenaire stable de la région nord-africaine. « Comme une grande majorité des pays occidentaux, la Hongrie s’inquiète de la montée en puissance du terrorisme », rappelle Saïd Issa, spécialiste des relations internationales au Centre des Etudes Politiques et Stratégiques (CEPS) d’Al-Ahram. « Les risques posés par l’expansion de la menace terroriste à l’Est de la Libye ont réuni les pays européens et Le Caire dans une priorité commune, celle de lutter activement contre le terrorisme en maintenant des partenariats étroits », explique-t-il. La Hongrie, comme beaucoup d’autres pays européens, s’inquiète de la présence en Libye de milliers de terroristes de l’EI. Ceux-ci menacent les frontières sud de l’Europe, à travers lesquelles ils risquent de s’infiltrer. Sachant que leurs activités peuvent également provoquer un exode massif de population vers le vieux continent.
L’Egypte cherche, quant à elle, un soutien international plus large pour sa lutte contre le terrorisme, surtout depuis que la campagne de lutte contre les pays soutenant et finançant des groupes terroristes a débuté.
Coopération économique
L’autre volet de la visite du président en Hongrie est strictement économique. Il s’agit pour l’Egypte d’accélérer les investissements hongrois sur son territoire. Le porte-parole de la présidence a souligné que l’invitation faite à l’Egypte pour participer à cette importante rencontre économique reflète l’attention que portent les pays du groupe de Visegrad au pays des pharaons. Le groupe de Visegrad est la cinquième plus grande économie du continent européen et la douzième mondiale. Ces pays ont réussi à renforcer leur présence au sein de l’Union européenne et ont désormais un poids important dans toutes les institutions de l’UE, en particulier au parlement.
Le porte-parole de la présidence a affirmé aussi que ces quatre pays constituent désormais une base industrielle importante. « Avec ce groupe, nous cherchons à effectuer un transfert de technologie et à moderniser les usines de l’Etat, tout en attirant de nouveaux investisseurs », a affirmé le porte-parole.
Selon les propos du ministre du Commerce et de l’Industrie, Tareq Qabil, les échanges commerciaux entre les deux pays se sont accentués depuis la dernière visite du président Sissi en Hongrie en 2015. Les exportations égyptiennes sur le marché hongrois ont enregistré une augmentation d’environ 198 % pour atteindre 15,3 millions d’euros, par rapport à 5,14 millions d’euros l’an dernier, alors que les importations en provenance de la Hongrie ont diminué et sont passées de 45,77 millions d’euros à 28,6 millions d’euros l’an dernier, soit une baisse de 37 %. Le taux d’investissement hongrois en Egypte a atteint, au cours du premier trimestre de cette année, environ 41,45 millions de dollars pour un total de 58 entreprises. Les exportations égyptiennes sur le marché hongrois comprennent le plastique, les légumes, les fruits, la céramique, le ciment, le coton, des engrais, des tapis et des produits d’éclairage, alors que les importations se sont concentrées dans les générateurs, les appareils électriques, les wagons, les produits chimiques, le fer et les meubles.
L’échange commercial entre les deux pays a atteint 300 millions de dollars l’an dernier, et le nombre de touristes a dépassé les 40 000 touristes l’an dernier.
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