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Le défi des sols minés reste entier

Chaïmaa Abdel-Hamid, Mardi, 20 juin 2017

22 % du territoire égyptien est truffé de mines anti-personnel et anti-char, séquelles de la Deuxième Guerre mondiale. Lors de la réunion du Conseil de sécurité sur les mines et les explosifs tenue cette semaine, Le Caire a exhorté encore une fois la communauté internationale d'agir.

Le défi des sols minés reste entier
(PHOTO : Al-Ahram)

L’egypte a participé, le 14 juin, à la réunion du Conseil de sécurité sur les conséquences huma­nitaires désastreuses des mines et des restes des explosifs des guerres. Le délégué permanent de l’Egypte auprès des Nations-Unies, l’ambassadeur Amr Aboul-Atta, a déclaré, lors de sa participation à la séance, que « l’Egypte est à la tête des 9 pays touchés par les mines et par leurs conséquences. Prés de 22,7 mil­lions de mines et d’explosifs avaient été implantés sur le sol égyptien pendant la Seconde Guerre mondiale. Or, cette affaire a été ignorée par la communauté internationale ». Il a exhorté sur­tout les Nations-Unies et les pays touchés par ce danger d’adopter un plan urgent pour l’élimination des mines et des explosifs des terrains égyptiens.

Les mines sont propagées sur de vastes superficies au Littoral Nord et dans le Sinaï. La localité d’Al-Alamein, située à une cen­taine de kilomètres à l’ouest d’Alexandrie, a été le théâtre de plusieurs batailles qui ont opposé les Alliés aux pays de l’Axe durant la Seconde Guerre mon­diale en 1942. Cette guerre a laissé à Al-Alamein et ses envi­rons, allant du sud du Littoral Nord jusqu’aux frontières ouest de l’Egypte, environ 17,5 mil­lions de mines enfouies dans plus de 250 000 feddans (1 feddan = 0,62 ha) arables et qui ne peuvent être cultivés tant que toute cette région n’a pas été déminée. Les guerres égypto-israéliennes ont également laissé environ 5,5 mil­lions de mines au Sinaï et dans le Désert oriental. Ces zones minées couvrent 22 % de la superficie de l’Egypte.

Ces mines représentent un réel danger pour les populations locales, principalement les bédouins et les bergers. Les acci­dents mortels sont quasi quoti­diens. Le plus récent a eu lieu le 16 mars dernier à Suez (une ville du Canal), lorsqu’une mine ter­restre a explosé blessant grave­ment 4 personnes. Selon le Journal of ERW and Mine Action, durant les 20 dernières années, 3 200 personnes ont été tuées dans des explosions de mines terrestres et 4 723 s’en sont sortis avec un handicap. L’Egypte déploie, depuis des années, des efforts pour déminer ses sols. Or, ces efforts locaux fournis par les équipes de l’armée demeurent insuffisants.

Une question désormais urgente

Selon les experts militaires, outre la question du danger pour les humains, ce nombre énorme de mines en Egypte entrave aussi les projets de développement dans les régions minées.

Selon les experts militaires, la région d’Al-Alamein est propice à un développement économique, agricole et touristique. Elle ren­ferme 4,8 milliards de barils de pétrole, 13,5 milliards de pieds cubes de gaz naturel, elle inclut également 3 millions de feddans favorables à un développement agricole. Ils présagent que cette région peut assimiler 1,5 million d’habitants en 2022 avec des pos­sibilités intéressantes d’investis­sements touristiques.

Le député Kamal Amer, prési­dent de la commission de la défense et de la sécurité nationale au parlement, déclare : « La ques­tion du déminage est devenue aujourd’hui une urgence pour bien exploiter la région et y atti­rer les investisseurs étrangers ». Il ajoute que même quand des projets d’investissement sont exécutés, leurs coûts sont élevés à cause du déminage préalable du sol.

Ils entravent aussi le processus de développement industriel et de l’installation de nouvelles com­munautés urbaines.

Un dossier complexe

Le déminage est une mission qui requiert beaucoup de moyens. C’est ce qu’explique le général Zakaria Hussein, président de l’Organisme des recherches mili­taires et ancien directeur de l’Académie militaire Nasser, qui affirme que « le déminage n’est pas facile. La sensibilité de ces mines à l’explosion est très forte à cause de la vétusté des facteurs atmosphériques. Ce qui signifie que le fait de s’approcher de ces zones sans équipements de haute qualité est considéré comme une sorte de suicide ».

A ces facteurs s’ajoutent la diversité des genres de mines et antichars, le mouvement des mines à cause des dunes et des changements climatiques pendant plus d’un demi-siècle, l’absence de cartes délimitant les zones minées, le manque de routes pour parvenir aux régions minées, le manque d’équipements sophisti­qués et la hausse de déminage.

Malgré cela, les forces armées égyptiennes ont réussi, depuis 1981, à défricher de vastes superfi­cies au Sahara occidental, dépas­sant les 50 000 feddans, et sont actuellement en train de travailler à déminer 150 000 feddans au Sahara occidental. Le ministère des Affaires étrangères a égale­ment déployé de grands efforts pour entrer en contact avec les Etats concernés, à leur tête la Bretagne et l’Allemagne, et leur demander d’offrir des aides, des équipements et des stages dans le but d’éliminer les mines.

« Les pays qui étaient directe­ment impliqués dans l’implanta­tion de ces mines, notamment la Bretagne et l’Allemagne, doivent assumer leur rôle et leur part de responsabilité. Ces pays doivent fournir à l’Egypte les équipe­ments sophistiqués nécessaires pour le déminage de ces zones, notamment des avions-radars, ou même l'aider à découvrir ces explosifs par satellites », sou­ligne le président de la commis­sion de la défense et de la sécurité nationale au parlement.

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